Un assortiment de ces mets
délicieux vous attend au coeur de la ville, dans d’authentiques restaurants
ouzbeks, où vous pourrez vous assoir à même le sol sur des coussins
colorés, autour de tables basses recouvertes de tapis orientals. C’est dans
l’un de ces établissements que travaille depuis six ans déjà le chef cuisinier Sherali
Moussaïev. Il vient de Tachkent.
Peu de villes au monde peuvent se
targuer de brasser une telle diversité culinaire nationale : à Moscou, vous pourrez déguster la cuisine
traditionnelle de presque tous les peuples vivant en Russie. La cuisine ouzbèke
connaît une grande popularité auprès des moscovites : plov, samsa, shourpa, lagman, shashlyk et lepeshki,
autant de noms savoureux pour une cuisine exotique.
Les saveurs du plov russe ont envahi Moscou dès le XVe siècle. A l’époque, la capitale russe reçoit pour la première fois la visite d’émissaires de Djaghataï, situé sur l’actuel territoire de l’Ouzbékistan. Quelques quatre siècles plus tard, le khanat de Boukharat (État d’Asie centrale du XVIe au XVIIIe siècle situé sur les territoires actuels de l’Ouzbékistan, du Tadjikistan, du Turkménistan et du Kazakhstan) rallie la Russie. La liste des riches marchands moscovites commence à se remplir de noms ouzbeks. Ils participent à la construction des premières mosquées. En 1921, la rue Spiridonovka donne le jour au premier établissement boukharien. Malgré la longue histoire des relations russo-ouzbèkes, la diaspora ouzbèke ne s’est véritablement formée en Russie qu’après la chute de l’URSS.
La cuisine que dirige aujourd’hui
Sherali Moussaïev est entièrement ouverte : aucun mur ne la sépare de la salle
du restaurant. Regarder le travail des cuisiniers fait partie du show. L’un
d’entre eux met une poêle sur la cuisinière, provoquant des flammes jusqu’au
plafond. Un autre semble jeter un sort au-dessus du chaudron dans lequel cuit
un délicieux plov. Un troisième étale une pâte à pain qu’il enfourne dans un
tandoor (four en terre cuite ouzbek) en les plaquant sur les parois
intérieures. En quelques minutes, les lepechkas (galettes de pain fines) sont
prêtes à être servies.
Comme Sherali, le tandoor dans
lequel sont préparées les lepechkas vient d’Ouzbékistan. Globalement, près de
70% des produits utilisés pour le restaurant viennent de là-bas. « Prenez
par exemple les carottes, précise Sherali, en Russie, poussent des variétés
rouges, plus sucrées, alors que pour le plov, il faut des carottes jaunes,
moins sucrées, que l’on commande en Ouzbékistan ». Tout comme il y a deux
sortes de riz: pour le mariage et pour le plov. Le plov, c’est délicat en
général : « Sur trois chefs qui vont cuisiner selon une seule et même
recette, vous obtiendrez trois plov différents ».
A Moscou, on apprécie l’authenticité (même si le restaurant Uruk a adapté sa cuisine ouzbèke à un niveau gastronomique) et les gens hasardeux ne sont pas les bienvenus. Un chef cuisinier dans un restaurant ouzbek qui se respecte ne peut être qu’Ouzbek. Ceux qui préparent le plov en cuisine auront toujours un emploi bien rémunéré dans la capitale. Même si dans le métro, il sera toujours difficile de les distinguer de leurs compatriotes travaillant sur les chantiers.
Sherali voulait venir s’installer
ici depuis les années 1990, mais sa famille s’y est longtemps opposée. Deux
filles et un fils de seize ans. Puis, ses filles se sont mariées. « Nous
avons décidé ainsi : d’abord je vivrais quelques temps ici, je me construirais une
maison près de Moscou, et puis ma famille me rejoindra. Voilà, dans environ un
an, ils pourront venir vivre ici ».