Quelle politique envers Moscou pour les deux candidats qualifiés au second tour?
ReutersLes analystes russes estiment qu’en cas de victoire au second tour, Emmanuel Macron durcira sa politique envers la Russie par rapport à l’actuel président François Hollande.
Bien qu’il se positionne sur la scène politique comme un novice qui évite la traditionnelle division en gauche et droite, Emmanuel Macron est le candidat de l’establishment français, un candidat du mainstream, a déclaré dans une interview à RBTH Iouri Roubinski, directeur du Centre des études françaises de l’Institut de l’Europe.
La preuve en est le soutien qui lui a été accordé tant par le représentant de la gauche, Benoît Hamon, que par celui de la droite, François Fillon, après leur échec au premier tour.
Emmanuel Macron est un candidat « synthétique » composé de différentes briques politiques emboîtables, ce qui lui vaut une ressemblance avec le jeu de construction Lego, a affirmé Andreï Souzdaltsev, vice-doyen de la faculté de la politique internationale et de l’économie mondiale de la Haute école d’économie (Moscou). En France, il arrange tant les socialistes que les centristes et, à l’échelle internationale, il s’oriente vers les centres de pouvoir existants : Washington et Berlin.
Il est certain qu’Emmanuel Macron suivra le sillage de la politique étrangère allemande. Or la politique de Berlin envers Moscou est assez stricte. Par conséquent, il est très probable que le président Macron sera encore moins bienveillant envers Moscou que ne l’était son prédécesseur François Hollande. Les experts font pourtant remarquer qu’Emmanuel Macron est un technocrate pragmatique qui évaluera nettement son potentiel et qui n’ira vraisemblablement pas jusqu’à exacerber sciemment les relations avec la Russie.
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Dans tous les cas, il est évident que les relations avec le Kremlin sont loin de définir la position des politiques français. Toujours d’après Iouri Roubinski, la ligne de clivage entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen passe par les axes « globalisme-patriotisme » et « progressisme-conservatisme ».
Andreï Souzdaltsev définit un peu autrement les divergences entre ces deux candidats. Pour lui, Marine Le Pen offre à la France la possibilité d’émerger « du tourbillon qui aspire la France en tant que grande puissance ». Car le pays joue un rôle de moins en moins important sur la scène internationale, a-t-il constaté.
Bien que les chances d’Emmanuel Macron de remporter le second tour soient élevées, une victoire de la présidente du Front national n’est pas totalement à exclure, indiquent les experts. Tout le monde se rappelle de la victoire surprise de Donald Trump à la présidentielle de novembre dernier aux États-Unis, alors que la quasi-totalité des observateurs avaient donné gagnante sa rivale, Hillary Clinton.
Marine Le Pen, en cas de victoire, adoptera une attitude assez favorable envers la Russie, affirment les analystes qui rappellent sa récente visite à Moscou et sa rencontre avec le président Vladimir Poutine. Dans le même temps, soulignent les experts, la présidente du FN n’appliquera pas la volonté du Kremlin, et pratiquera une politique indépendante.
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Plusieurs raisons pourraient donner « un coup de pouce » à Marine Le Pen. Ainsi, a fait remarquer Iouri Roubinski, le candidat de gauche Jean-Luc Mélenchon, chef du mouvement France insoumise qui a totalisé presque 20% des voix, ne soutiendra publiquement aucun des candidats. Ses électeurs pourraient se tourner vers Marine Le Pen qui est un personnage politique hors système.
L’expert est certain que la présidente du FN obtiendra une partie des voix des autres candidats au premier tour, tant de droite que de gauche. En ce qui concerne cette dernière, ce sera l’extrême-gauche, et les représentants des « couches populaires ».« Une grande partie des électeurs socialement démunis et mécontents votent pour le FN pour protester », a-t-il noté.
Andreï Souzdaltsev constate lui aussi que Marine Le Pen possède une certaine réserve de voix. Il évoque les 20% d’électeurs qui ne sont pas venus aux urnes dimanche dernier et indique qu’il y a parmi eux des partisans du FN qui pourraient se mobiliser au second tour.
Le trait particulier de leur comportement électoral est qu’ils n’affichent pas leurs opinions politiques en raison de la réputation dont pâtit le FN en France. Mais au second tour, quand les passions politiques atteindront leur apogée, ils pourraient se rendre aux urnes. Dans le même temps, Igor Bounine, président de la fondation Centre des technologies politiques, estime que Marine Le Pen pourrait profiter du report des abstentionnistes de droite, qui refuseront de voter pour le centriste Emmanuel Macron.
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