Netanyahu, médiateur entre la Russie et la Turquie ?

Le président russe Vladimir Poutine et le premier ministre israélien Benjamin Netanyahuand lors d'une rencontre à Moscou.

Le président russe Vladimir Poutine et le premier ministre israélien Benjamin Netanyahuand lors d'une rencontre à Moscou.

Mikhail Metzel / TASS
Moscou et Ankara baissent le ton : cela signifie-t-il que les deux pays seraient prêts à entamer le dialogue ? Est-ce que le premier ministre israélien pourra y contribuer, se demandent les experts.

Le 7 juin dernier, le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, s’est rendu en visite à Moscou, officiellement à l’occasion du 25ème anniversaire de la mise en place des relations diplomatiques entre la Russie et Israël. Toutefois, certains experts y croient déceler un ordre du jour secret : la Russie et la Turquie chercheraient un médiateur pour normaliser leurs relations, et Israël convient très bien à ce rôle.

Unerhétoriquemoinsagressive

Ces derniers temps, la rhétorique de Moscou et d’Ankara est devenue moins agressive. Ainsi, pendant sa visite en Grèce, le 27 mai, le président russe Vladimir Poutine a fait une déclaration inattendue sur son souhait de normaliser les relations avec la Turquie. « Nous n’avons pas entendu d’excuses. Nous n’avons pas constaté de volonté de réparer les dommages. Nous entendons des déclarations sur le souhait de relancer les relations. Nous aussi nous voulons les relancer. Ce n’est pas nous qui les avons détruites. Nous avons de notre côté tout fait pour qu’au fil des décennies, les rapports russo-turcs atteignent un niveau élevé de partenariat et d’amitié », a-t-il souligné.

Ankara a réagi trois jours plus tard. Le 30 mai, le ministre turc des Affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a proposé de mettre en place un groupe de travail en vue de normaliser les relations bilatérales.

Le Kremlin a cependant indiqué qu’aucun groupe de travail ne serait capable de venir à bout du problème qui ne peut être résolu que par la direction turque. Répondant aux questions des journalistes le 31 mai, le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré : « Je comprends avec difficulté ce que la Russie attend de nous comme premiers pas. En tant qu’Etat, nous ne sommes pas fautifs. Nous souhaitons développer nos relations avec la Russie »

Le porte-parole du président russe, Dmitri Peskov, a dû rappeler encore une fois aux responsables turcs que Moscou attendait de leur part des excuses, des indemnisations et le procès des coupables.

La Turquie est-elle prête à des concessions ?

« Moscou a précisé de manière claire et nette ses positions, a fait remarquer Viktor Nadeïn-Rayevski, spécialiste de la Turquie à l’Institut de l’économie mondiale et des relations internationales de l’Académie des sciences. La Turquie se doit d’agir en conséquence ».

Toutefois, il doute qu’Ankara accepte des concessions. « Les Turcs souhaitent vivement redresser les relations avec la Russie. Ils subissent de lourdes pertes économiques, aussi bien dans l’agriculture que dans le secteur touristique. La Turquie cherche une échappatoire pour normaliser les relations, mais je ne pense pas qu’Erdogan vienne s’excuser personnellement, car cela porterait un coup à sa réputation ». Or, d’après Viktor Nadeïn-Rayevski, sans excuses, il ne sert à rien de parler de normalisation.

Israël n’est pas le meilleur candidat au rôle de médiateur

Le sujet d’éventuels médiateurs dans le conflit russo-turc a été soulevé à plusieurs reprises. Il a été question du président azerbaïdjanais Ilham Aliev, du leader kazakh Noursoultan Nazarbaïev et de la chancelière allemande Angela Merkel. Toutefois, ces conjectures n’ont jamais dépassé le stade des discussions entre experts. A l’heure actuelle, on évoque la candidature de Benjamin Netanyahu.

Les experts questionnés par RBTH estiment que le premier ministre israélien n’est pas le meilleur candidat. « Le choix de Benjamin Netanyahu en qualité de médiateur est pour le moins illogique, a poursuivi Viktor Nadeïn-Rayevski. La Turquie et Israël ont besoin d’un médiateur entre eux, car ils n’ont toujours pas rétabli leurs relations à 100% ».

En mai 2010, l’assaut israélien contre la flottille en route vers Gaza avait provoqué un tollé international. Les gardes-frontières israéliens avaient ouvert le feu contre une flottille humanitaire qui cherchait à briser le blocus de Gaza, et avaient tué huit passagers turcs. Les relations entre les deux pays se sont sérieusement dégradées, et les relations diplomatiques ont été réduites.

L’analyste turc Hasan Oktay, directeur du Centre des études stratégiques du Caucase, estime pour sa part qu’Israël pourrait s’imposer en médiateur dans le règlement du conflit russo-turc. « L’homme politique turc Tugrul Türkes, connu pour ses bonnes relations avec Israël, a été nommé le 7 juin vice-premier ministre, ce qui n’est pas fortuit. Israël pourrait très bien devenir médiateur et garantir la sécurité dans la région. Aussi bien la Russie que la Turquie sortiraient gagnantes de cette médiation ».

Viktor Nadeïn-Rayevski semble d’un tout autre avis. « Les rumeurs sur la médiation de Benjamin Netanyahu ne sont qu’une invention des reporters et rien de plus », a-t-il affirmé pour conclure.

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