L’Égypte sur le chemin du régime militaire

Qui après Morsi ? Crédit : Reuters

Qui après Morsi ? Crédit : Reuters

Sur fond d’opposition politique interne en Égypte, La Russie d'Aujourd'hui a recueilli les opinions des politologues russes au sujet de l’avenir de la plus grande nation du Proche Orient.

Dans son entretien avec RBTH, Marina Sapronova, professeur à l’Institut d’État des relations internationales de Moscou explique que l’Égypte connaît actuellement une transformation de son système politique et du gouvernement qui ne peut, tout simplement, pas être rapide car, au sein de la société égyptienne, il n’y a pas de consensus sur le chemin que devra prendre son développement. La situation est également compliquée à cause des changements qui secouent la région tout entière.

Selon l’interviewée, la situation en Égypte est entre les mains des militaires : « L’armée est la seule force organisée qui jouit de la confiance de la population. Elle est capable de prendre le contrôle du processus politique et de rétablir l’ordre. L’armée jouera le rôle de protecteur, puis rendra le pouvoir aux civils, organisera les élections ».

Par ailleurs, Marina Sapronova est convaincue que les touristes étrangers qui prévoient de se rendre en Égypte n’ont rien à craindre, les stations balnéaires les plus courues sont loin des centres d’activité politique et l’Égypte a tout intérêt de protéger son secteur touristique des débordements car le secteur emploie un égyptien sur dix et rapporte plus que l’exploitation du Canal de Suez.

Alexandre Vavilov, professeur à l’Académie Diplomatique du Ministère des Affaires étrangères de Russie, dans son entretien avec le journal Vzgliad, a dit : « Dans l’histoire égyptienne contemporaine depuis 1952, l’armée joue un rôle important et décisif lors de chaque secousse politique. La situation actuelle est, de nouveau, perturbée, difficile à maîtriser. L’armée a, bien entendu, affirmé qu’elle est avec la population, comme elle l’a toujours été, donc elle pourra servir d’élément d’organisation pendant une période, puis passera au deuxième plan. L’Égypte compte de nombreuses forces politiques qui ont acquis une expérience et le goût de la vie politique ».

Concernant le destin de Mohammed Morsi renversé par l'armée égyptienne mercredi soir, Alexandre Vavilov souligne que, pour le moment, il ne voit pas de figure capable de réunir tous les Égyptiens : « Le Tamarrud est une formation amorphe, fortuite. Leur programme est négatif, non constructif. Maintenant, qui après Morsi ? »

En outre, l’expert n’exclut pas l’éventualité d’un régime autoritaire : « Les Égyptiens ordinaires, analphabètes à 30 % regrettent l’ordre. Ils n’ont pas besoin de la démocratie. Ce qui compte pour eux est de nourrir leurs familles ».

Nikolaï Sourkov, professeur agrégé du département d’études orientales de l’Institut d’État des relations internationales de Moscou a indiqué que la situation égyptienne s’empire plus rapidement que prévu: «Au départ, les libéraux égyptiens n’avaient pas l’intention de destituer Morsi pour éviter d’aggraver l’instabilité politique. Ils souhaitaient attendre les prochaines élections présidentielles pour accéder au pouvoir pacifiquement. Mais les problèmes économiques ont joué leur rôle ».

« Dans le cas présent, l’intervention des militaires est la seule chance d’éviter une nouvelle effusion de sang et de rétablir un semblant d’ordre. Mais je n’exclus pas qu’ils soient obligés de rester au pouvoir assez longtemps, car la société égyptienne est très polarisée, il n’y a pas d’hommes politiques qui conviennent à tout le monde », constate le spécialiste.

Il a également noté que les militaires devront très rapidement demander l’aide internationale afin de parvenir à nourrir la population et à éviter de nouveaux soulèvements : « Dans ces conditions, les donateurs extérieurs, les pays occidentaux en premier lieu, doivent comprendre que la stabilité de l’Égypte, et donc la stabilité de tout le Proche-Orient, dépend d’eux également ».

Dans son interview à La Russie d'Aujourd'hui, Nikolaï Sourkov ajoute que les évènements de la place Tahrir ne doivent pas être lus uniquement à travers le prisme de la politique intérieure : « Ils auront des conséquences majeures sur toute la région. L’Égypte est le plus grand pays du Proche-Orient, il sert d’exemple à tous les autres. De nombreux observateurs du monde arabe considèrent la nouvelle confrontation place Tahrir à au Caire comme la bataille finale entre les islamistes et les laïques qui déterminera le schéma que la région empruntera pour son développement, soit islamique soit occidental ».

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