La première banque islamique de Russie a le vent en poupe

AK Bars a mis trois ans avant de parvenir à répondre à toutes les conditions requises pour lever des fonds islamiques. Crédit : Lori/Legion Media

AK Bars a mis trois ans avant de parvenir à répondre à toutes les conditions requises pour lever des fonds islamiques. Crédit : Lori/Legion Media

Seule banque de Russie fonctionnant selon les règles islamiques, AK Bars, dont le siège est basé au Tatarstan, vient de publier son rapport. Il s’est avéré qu’il est moins cher d’emprunter selon ce modèle que d’émettre des Eurobonds. Les experts estiment que sur fond de sanctions occidentales frappant une partie du marché financier russe, la finance islamique pourrait constituer une alternative aux marchés européens des capitaux.

Le coût des fonds levés selon les règles de la charia pourrait être moins élevé que celui des emprunts traditionnels, comme le montre le rapport de la banque russe AK Bars – la première à publier les résultats de ses activités menées conformément aux standards islamiques. Le rapport informe qu’au cours du premier semestre 2014, la banque a réussi à lever 800 000 euros à un taux de 5,37%, à l'aide d'un instrument appelé mourabaha à un taux de 5,37%. À titre de comparaison, deux émissions d’Eurobonds de la banque sont actuellement en circulation pour un montant de 850 000 euros, les taux respectifs étant de 8,75% et 8%. Le service de presse de la banque a expliqué à RBTH que compte tenu des difficultés accrues qu'ont banques russes afin de lever des capitaux sur les marchés classiques à cause des sanctions européennes et américaines, la finance islamique devenait de plus en plus pertinente.

Perspective optimiste

« La perspective du schéma utilisé par AK Bars pour lever des fonds est tout à fait optimiste. Une telle approche peut être utilisée dans d’autres régions à population majoritairement islamique », explique Youri Youdenkov, professeur de la faculté des finances et de la banque de l'Académie russe de l'économie nationale. Il précise que compte tenu du versement d’une partie des revenus de la banque dans les projets d’investissement d’AK Bars contre les fonds investis, l’efficacité globale de la banque n’est pas très différente de celle du schéma classique : la banque accueille des dépôts et émet des crédits.  

L’analyste de Finam Management Anton Soroko précise que la différence principale entre une banque islamique et un établissement classique est l’interdiction de facturer des intérêts. Ainsi, le financement utilisant des capitaux islamiques s’apparente souvent à un investissement dans un projet – l’organisme créditeur assume les risques au même titre que l’emprunteur, mais le bénéfice varie en fonction du succès du projet. « Ainsi, la banque a tout intérêt à investir dans les projets les plus profitables, ce qui est important pour le développement de l’économie dans son ensemble », explique Soroko. L’analyste explique notamment que l’instrument mourabaha utilisé par AK Bars est un contrat commercial dans lequel le vendeur indique directement les dépenses liées à l’achat des marchandises commercialisées et les revend à un tiers en plusieurs versements avec une prime sur le prix initial. L’acheteur connaît le montant de la prime à l’avance. Outre la mourabaha, la banque islamique dispose également d’un instrument de leasing – Idjara, ainsi que d’un équivalent islamique aux obligations – les Sukuk, explique Soroko.

Marché réduit

Ernst & Young évalue le marché global des actifs islamiques en 2013 à 1,30 trillion d’euros. Toutefois, l’une des principales difficultés est le choix de l’objet de la mourabaha : le commerce est interdit aux banques russes. Aussi, les banques utilisent toutes sortes de détours. Par exemple, les métaux précieux sont exclus de l’interdiction, ils sont la base du mécanisme utilisé par AK Bars. En outre, la banque doit répondre à un certain nombre de critères pour pouvoir lever des crédits auprès des investisseurs islamiques. Elle ne peut, notamment, pas financer le commerce d’alcool ou de jeu, participer à la construction de fermes porcines. AK Bars a mis trois ans avant de parvenir à répondre à toutes les conditions requises pour lever des fonds islamiques. L’une des principales banques russes détenue par l’État, VTB, a annoncé en 2010 qu’elle avait l’intention de lever des fonds par le biais des Sukuk. Toutefois, le projet n’a pas été réalisé.

« Une nouvelle tendance apparaît : attirer le capital bancaire islamique, qui fonctionne selon un principe tout à fait nouveau pour les Européens, sur le marché russe », explique Soroko. Globalement, le marché russe est relativement intéressant pour ce type de transactions, l’objectif de la direction est de correctement présenter les nouvelles opportunités aux investisseurs. « Nous estimons que les perspectives de financement selon les normes de la charia en Russie sont élevées. C’est particulièrement pertinent en ce qui concerne les projets d’infrastructure nécessitant de l’argent « peu cher » et « long », explique l’analyste en chef d’UFS IC Ilya Balakirev. Aussi, il estime que « la popularité de ce type de financement est amenée à croître à l’avenir »

 

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