Pour le moment, la loi sur l’interdiction de fumer ne concerne que les écoles, les hôpitaux et les établissements de l’État. Crédit : Itar-Tass
Tous les fumeurs russes connaissent sur le bout des doigts le prix de leur marque de cigarettes préférée. Ils les achètent tous les jours à côté d’autres articles, raison pour laquelle la moindre variation de prix se ressent directement. Les organes de régulation ont tenu compte de ce paramètre en augmentant la part des accises. Ils considèrent en effet que le citoyen moyen préfère épargner que fumer.
Avec 2 786 cigarettes consommées par adulte, la Russie occupe la 4ème place au classement des pays comptant le plus de fumeurs établi par l’Organisation mondiale de la santé. Mais d’après les analystes, le nombre de fumeurs devrait baisser de 5% par an grâce aux nouvelles mesures, dont la hausse des accises.
Ces taxes augmentent chaque année en Russie. La plus forte hausse a été observée lors des deux dernières années avec une augmentation de près de 100%. Et cette cadence devrait se confirmer à l’avenir. D’ici 2015, ces charges devraient encore doubler pour atteindre 21,05 euros pour 1 000 pièces, plus 9% du prix.
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Une autre mesure, déjà en application, est la loi sur l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Elle n’est en vigueur que depuis juin 2013 mais a déjà réussi à se refléter sur les producteurs. Durant les neuf premiers mois de 2013, la production de cigarettes a baissé de 5,5% par rapport à la même période l’année précédente. Selon les prévisions des spécialistes, le marché du tabac continuera à se rétracter, avec notamment une baisse de 9 à 11% en 2014.
Pour le moment, la loi sur l’interdiction de fumer ne concerne que les écoles, les hôpitaux et les établissements de l’État. Il faudra attendre 2014 pour qu’elle s’applique aux cafés et restaurants. Toutefois, plusieurs commerces se soumettent déjà à la nouvelle législation.
Alexeï Savine, directeur de la communication de la chaîne de bars « Dorogaïa, ia perezvoniou » (« Ma chère, je vous rappelle »), souligne que les restaurateurs prennent parfois seuls des mesures anti-tabac, souvent beaucoup plus efficaces que celles de l’État, en interdisant de fumer dans leurs établissements même sans loi spéciales. « Dans la plupart des cas, ils le font spécialement pour les clients car l’odeur du tabac prend le pas sur le goût », explique-t-il.
L’influence des nouvelles taxes et accises sur les personnes qui soit arrêtent de fumer ou de boire, soit limitent leur consommation, est presque prouvée. « Les nouvelles impositions ont en effet déjà considérablement aidé à lutter contre le tabac et l’alcool. Les cigarettes et la boisson ne sont d’ailleurs pas une nécessité vitale et il est possible de s’en passer, contrairement à la nourriture », indique Esben Tranholm Nielsen, conseiller en gestion du ministère danois de l’Agriculture et de l’Alimentation.
Les associations du secteur de la santé sont également optimistes pour le moment. « La hausse de 10% du prix du tabac a entraîné une chute de 3 à 13% de la demande dans les pays d’Europe de l’Est. Pour 11,5% des personnes qui commencent à fumer, le prix est devenu le principal argument pour abandonner cette habitude nocive », explique Renat Laïchev, président de l’ONG « Les enfants russes sont éduqués et en bonne santé », prenant ainsi comme exemple l’expérience étrangère. Selon lui, même si la baisse n’est pas importante au départ, les mesures portent leurs fruits avec le temps. « Au Brésil, les premières lois visant à lutter contre le tabagisme n’ont pas produit de résultats extraordinaires. Seulement 2% des fumeurs avaient ainsi arrêté. Aujourd’hui, ce chiffre s’élève déjà à 8% », ajoute le militant.
Les entreprises spécialisées dans le tabac ont néanmoins tendance à évaluer les statistiques d’une autre manière. Anatoli Vereshaguine, directeur de la communication de Japan Tobacco International en Russie, constate que la loi n’est pas en vigueur depuis assez longtemps pour tirer de telles conclusions. Selon lui, les accises ne poussent pas toujours les clients à arrêter de fumer. Ces derniers se tournent simplement vers les cigarettes contrefaites ou de contrebande, raison pour laquelle la part du marché noir a triplé l’année dernière, atteignant 6%.
Alexandre Liouty, directeur des relations d’entreprises pour « BAT Russia », partage l’avis de son collègue, mais y ajoute l’influence des facteurs économiques. D’après les observations de BAT, la hausse des prix n’a pas d’impact considérable sur le nombre de fumeurs. Elle pousse plutôt à chercher des alternatives moins chères. Des productions clandestines voient ainsi le jour en Russie, parfois même en provenance d’autres pays. C’est pourquoi, selon Alexandre Liouty, même si les statistiques montrent une baisse de la demande, le nombre de fumeurs n’a en réalité pas vraiment changé. Une partie d’entre eux se tourne tout simplement vers la production illégale. « Pour nous, la hausse des prix est la principale raison de la chute de la consommation de produits légaux. Rien que pendant les sept dernières années, les taxes ont été multipliées par six. Si le prix moyen d’un paquet de cigarettes était de 16 roubles (0,35 euro) en 2006, il est désormais de 43 roubles (0,95 euro). En 2014, il passera même à 52 roubles (1,15 euro) seulement à cause des accises », précise-t-il. Selon les estimations de son entreprise, les ventes légales de cigarettes seront en 2013 de 7 à 8% moins élevées que l’année précédente.
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