Les événements récents en Russie m’ont fait revenir avec nostalgie vers les sauvages années 90. Je ne suis pas sûre de la raison. C’est peut-être parce que j’étais plus jeune et plus insouciante ou que j’étais plus optimiste et pleine d’espoir sur la vie dans la nouvelle Russie.
Durant cette sombre époque, l’hôtel Métropole était le centre de rencontre des expatriés. Tout le monde résidait et mangeait là, dans un élégant restaurant souterrain appelé le Teatro.
Malheureusement, le Teatro n’existe plus – il est devenu un vulgaire night-club destiné aux criminels louches de classe C. Toutefois, dans les années 1990, avant l’époque où les roubles étaient convertibles, le Teatro était un restaurant résolument extravagant à « devises fortes », et cela représentait pour moi un traitement de faveur réservé uniquement aux grandes occasions.
Mon plat préféré du Teatro était les pâtes au saumon fumé accompagnées d’une sauce crémeuse à la vodka. Ce plat a depuis lors été recréé sans cesse sur la scène florissante des restaurants moscovites, mais, en ce temps-là, c'était une association vraiment étrange pour la Russie.
Les Russes tels que mon beau mari russe ont grandi en pensant que les pâtes n’étaient qu’un plat d’accompagnement dépourvu de culture, d' une valeur bien moindre que celle des pommes de terre.
L’unique plat de pâtes méritant une place de choix dans la cuisine soviétique classique sont les «macaronis po flottski» (macaronis à la viande hachée) ou pâtes navales : une espèce de bouillie de viande hachée peu ragoûtante, sans sauce et des coquillettes. Cela n'a jamais été le plat favoris de quiconque.
Pourtant, par la suite, mon beau mari russe et ses copains m’ont rencontré et se sont mis à manger beaucoup de pâtes durant ces années de vaches maigres à l’époque de la perestroïka.
L’approvisionnement en nourriture était irrégulier et souvent limité, mais les ingrédients pour le plat fétiche du Teatro étaient généralement disponibles. Le saumon fumé ou salé se trouvait toujours en abondance: conserver le poisson, soit en le fumant au-dessus de copeaux de bois, dans un fumoir spécial, ou en macérant les filets de poisson au sel et au sucre est une tradition culinaire perpétrée depuis des siècles en Russie.
Concernant les autres ingrédients, la vodka, naturellement, se trouvait toujours à portée de main ainsi que certains types de produits laitiers, et, bien que j’ai souvent été forcée de remplacer le Parmesan par quelque chose de moins noble, j’étais bientôt capable de perfectionner ma propre version de ce que j’avais coutume d’appeler les «pâtes perestroïka».
Vingt ans plus tard, je pense qu’il est convenable d’attribuer une place d’honneur aux pâtes perestroïka dans le répertoire de la cuisine «fédérale» (de 1991 à nos jours). Cette époque, j’en suis certaine, restera gravée dans les mémoires comme un moment de haute créativité et d’innovation, encore davantage que la période impériale qui a produit tant de plats significatifs issus des cuisines de l’aristocratie francophile de Russie.
La période fédérale restera en mémoire comme l’époque de la redécouverte et du renouveau de l’intégrité des ingrédients, des recettes et des saveurs traditionnels. Nous nous en souviendrons pour son expérimentation frénétique de nouvelles méthodes de cuisine, son incitation à une nourriture plus saine et son enthousiasme pour les produits locaux ainsi que l’exploration et l’incorporation d’arômes et d’assaisonnements des quatre coins du globe.
Chapeau bas aux chefs fédéraux qui ont su fusionner avec succès toutes ces innovations durant l’une des époques les plus passionnantes de l’histoire culinaire russe!
Ingrédients
Pour 4 personnes
1 cuillère à soupe d’huile d’olive • 1 cuillère à thé de sel de table • (375 grammes) 1-1/2 tasse de saumon légèrement salé ou fumé, finement découpé en dés • (500 grammes) 1 livre de pâtes, telles que des «penne», «rigatoni» ou «orecchiette pugliesi» • (250 ml) 1 tasse de crème fraîche • (125 ml) ½ tasse de vodka à l’arôme citron • 2 cuillères à soupe de beurre • (75 ml) 1/3 de tasse de fromage Parmesan, finement râpé • 1 petite pincée de poivre rose concassé • 4 échalotes, coupées en dés fins • 4 cuillères à soupe d’aneth ciselée
Préparation
1) Remplissez une casserole d’eau froide. Ajoutez l’huile d’olive et du sel. Amenez l’eau à ébullition forte et plongez-y les pâtes. Réduisez la chaleur à feu moyen puis cuisez pendant 12 à 15 minutes, jusqu’à ce que les pâtes soient «al dente» ou encore légèrement croquantes. Décantez ½ tasse de l’eau des pâtes et mettez-la de côté.
2) Tandis que les pâtes cuisent, faites fondre le beurre dans une petite casserole. Ajoutez la crème fraîche et fouettez-la jusqu’à liaison. Ajoutez progressivement le fromage, en remuant à l’aide d’un fouet ou d’une spatule en bois pour lier le fromage au mélange de beurre/crème jusqu’à ce qu’il soit soigneusement incorporé. Ajoutez la vodka et cuisez à feu doux pendant 2 minutes. Parsemez de grains de poivre de Cayenne et réservez.
3) Egouttez les pâtes dans une passoire puis remettez-les dans la casserole à feu doux. Ajoutez la moitié de l’eau des pâtes et terminez la cuisson de celles-ci en les mélangeant bien à l’eau. L’eau va progressivement se mélanger à l’amidon des pâtes et s’évaporer. Rajoutez de l’eau si nécessaire.
4) Incorporez la crème, le beurre et le mélange de fromage et mélangez jusqu’à ce que les pâtes soient bien recouvertes de sauce. La vodka va s’évaporer pendant que la sauce cuit encore pendant 1 minute à feu doux. Ajoutez le saumon et les échalotes puis remuez pour bien mélanger le tout.
5) Garnissez avec de l’aneth et servez immédiatement.
6) Si vous désirez un peu de verdure avec votre sauce rosée, envisagez l’ajout de légumes tels que des petits pois frais, des pointes de jeunes asperges ou des courgettes coupées en dés.
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