TITRE : Histoires de Cimetières
AUTEUR : Boris Akounine
TRADUIT par Paul Lequesne
ÉDITIONS : Noir sur Blanc
Grigori Tchkhartichvili, mieux connu sous le pseudonyme de Boris Akounine, vient prêter main forte au célèbre auteur de romans policiers pour un livre singulier à deux voix. Dans une introduction intitulée, non sans ironie, « Éclaircissements » l’auteur nous avoue s’être dédoublé en « Grigori Tchkhartichvili, raisonneur professionnel, et Boris Akounine, animateur et amuseur public » pour faire partager sa quête : s’approcher du mystère de la mort et comprendre la peur qu’elle suscite.
Soucieux d’évacuer le tragique et la peur, Grigori Tchkhartichvili prend soin de choisir six cimetières de grandes métropoles qui n’abritent pas ou peu de tombes récentes ; du Vieux cimetière Donskoï à Moscou, au Père-Lachaise, en passant par Highgate à Londres, ou par le cimetière étranger de Yokohama, « un lieu d’inhumation de dilettantes de la mort dans un pays où l’on sait mourir avec art », sans oublier celui de Green-Wood à New York « un véritable Elysée, un jardin d’Eden », ou encore celui du mont des Oliviers à Jérusalem.
La déambulation dans les cimetières est agrémentée par des photographies de Tchkhartichvili. Chaque lieu et ses pensionnaires nourrissent la réflexion de l’auteur et éclairent à leur façon une facette des relations de l’homme à la mort.
Akounine lui, livre à chaque fois une nouvelle inspirée par les lieux, agrémentée d’illustrations qui font pendant aux photographies.
Quand Tchkhartichvili, l’orientaliste, interroge : « Tout cet océan d’énergie nerveuse et spirituelle ne peut d’un coup disparaître sans laisser de traces… » c’est Akounine qui répond en mettant en scène au milieu des vivants, d’illustres défunts : la Saltytchikha, criminelle sanguinaire, Oscar Wilde ou Karl Marx nous donnant à voir ce qui est pressenti : les morts ne partent pas et les générations présentes coexistent avec les générations passées dans« des dimensions temporelles différentes. ».
Lorsque Tchkhartichviliconfesse : « Si seulement je savais comment retenir le temps qui s’échappe, agripper son mystère … Il convoque Akounine : « alors j’écris des romans qui parlent du XIXe siècle… j’ignore moi-même ce que je cherche à obtenir : à tirer de leurs tombes ceux qui ne sont plus, où à me glisser moi-même dans leurs vies ».
Etplus encore que le mystère de la mort, c’est, avec une mise en abime, le mystère de l’écriture qui nous est livré car « le talent d’écrivain ne consiste par à savoir inventer ce qui n’existe pas, mais à prêter une sorte d’oreille intérieure, permettant d’entendre des textes déjà écrits quelque part. »
Tchkhartichvili, l’orientaliste, etAkounine, l’auteur de polars, mêlent leurs partitions avec beaucoup de malice et d’habileté pour explorer un sujet grave avec talent et légèreté et c’est pour notre plus grand plaisir.
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