La pétition contre la Douma peut avoir des conséquences dramatiques pour les relations entre la Russie et les Etats-Unis.

Illustration : Sergueï Elkine

Illustration : Sergueï Elkine

Le contentieux entre la Russie et les Etats-Unis au sujet des listes Magnitski et « Dima Yakovlev » risque de se solder par une rupture des relations diplomatiques.

La Douma (chambre basse du parlement) a menacé de réagir « symétriquement » jusqu’à la rupture des relations diplomatiques avec Washington, si les députés qui ont soutenu la « loi de Dima Yakovlev » se retrouvent inscrits sur la liste Magnitski. Une telle extension de la liste est exigée par les auteurs d’une pétition publiée sur le site de la Maison Blanche. Les experts soulignent que la plupart des signataires ont des noms russes.

La pétition a obtenu le 23 décembre le nombre nécessaire de signatures qui oblige l’administration présidentielle à la traiter, c’est-à-dire plus de 37 000. Elle avait été publiée le 21 décembre, dans la rubrique du projet « We the People ». Pour être prise en considération, elle devait être signée avant le 20 janvier par au moins 25 000 personnes.

« Nous, soussignés, considérons l’adoption de « l’acte Magnitski » comme une mesure profondément prorusse, qui peut aider les citoyens russes à poursuivre en justice ceux qui participent à la corruption et à l’enfreinte des droits de l’homme. Nous sommes outrés par le comportement des législateurs russes, qui ont transgressé toutes les limites possibles d’humanité, de responsabilité et de bon sens, en décidant de mettre en jeu la vie et le bien-être de milliers d’orphelins russes, dont certains, malades ou handicapés, risquent d’être privés de chances de survie, si l’interdiction sur les adoptions internationales entre en vigueur », dit la pétition.

Les auteurs appellent « l’administration américaine à identifier ceux qui sont responsables pour le vote de cette résolution, et à les inclure dans la liste Magnitski ».

Vendredi 21 décembre, la Douma a approuvé en troisième et finale lecture la « loi Dima Yakovlev », une réponse à « l’acte Magnitski », qui, entre autres, interdit aux Américains d’adopter des enfants russes.

Le président du comité à la Douma des relations internationales, Alexei Pouchkov, a souligné que les relations entre Moscou et Washington risquent de se détériorer, si la Maison Blanche décide de satisfaire la demande des pétitionnaires. « Si cela arrive, nous répondrons par la même chose, et alors la situation se retrouvera dans une impasse totale et se muera en guerre politique ouverte entre nos deux pays. Je ne pense pas que l’administration américaine souhaite un tel scénario », a déclaré le parlementaire à l’agence russe Interfax. Viatcheslav Nikonov, son adjoint, confirme : « La réaction à une telle action ne peut être que négative. Et le cas échéant, la réponse sera symétrique », a déclaré le député, en précisant qu’il est difficile de trouver des antécédents dans toute l’histoire des relations diplomatiques. « Cela peut être le premier cas de l’histoire quand se pose la question de sanctions contre les législateurs d’un autre État, à une échelle aussi importante. Ce serait un scandale sans précédent, à la limite de la rupture des relations diplomatiques ».

Le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, quant à lui, a prévenu, à l’antenne de Russia Today, contre la dénonciation de l’accord signé avec les Etats-Unis en novembre sur les adoptions. « Je comprends la position en faveur de l’interdiction de l’adoption d’enfants russes par des familles américaines, mais nous devons absolument conserver l’accord en vigueur. Sans quoi nous n’aurons plus la possibilité de rendre visite aux enfants qui ont déjà été adoptés et vivent actuellement aux Etats-Unis. En d’autres termes, les adoptions futures peuvent être gelées », cite l’agence RIA.

Les politologues attirent l’attention sur ceux qui soutiennent la pétition. Yan Vaslavski, chargé de cours à la chaire de théorie politique du MGIMO, assure que l’administration ne prendra pas de décision avant d’avoir vérifié les noms des signataires.

« Il n’y a que des noms et des prénoms russes. Ce qui nous dit deux choses : soit il s’agit de nos citoyens, que l’on a envie d’appeler « éléments » de la société russe qui essayent de profiter de la situation et vont cafter à l’étranger. Ou alors ce sont des gens qui ont déménagé un jour aux Etats-Unis, ont renoncé à leur citoyenneté russe et maintenant ils se préoccupent de la vie du peuple russe, alors qu’ils ont changé d’adresse depuis longtemps. Du coup, il n’est pas clair s’il s’agit de citoyens américains », a expliqué Vaslavski.

La directrice générale de l’Institut de recherche de politique étrangère, Veronika Kracheninnikova, considère que « le département d’État qui gère la liste Magnitsky n’ira pas y inclure 400 législateurs russes », car il a « besoin de la Russie pour la Syrie, l’Iran, le transit des cargaisons de l’OTAN de l’Afghanistan, etc. Il est clair cependant que ces pétitions confirment le passage à un tout autre niveau de confrontation avec la Russie dans le champ de l’information et de la propagande », conclut Kracheninnikova.

Publié sur le site de Vzgliad le 23 décembre 2012.

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