Après tout, que feriez-vous si vous découvriez que le monde devait disparaître soudainement et brutalement ? Source: Shutterstock / Legion media.
Les rédacteurs de La Russie d'Aujourd'hui sont globalement d’accord : la fin du monde n’aura pas lieu le vendredi 21 décembre. Mais cependant, les disciples de la Fin des Temps nous donnent l’occasion de faire une pause. Vivons-nous pleinement nos vies ? Comment passons réellement le temps qu’il nous reste, que cela soit deux jours, vingt ans ou plus ? Après tout, que feriez-vous si vous découvriez que le monde devait disparaître soudainement et brutalement ?
Les écrivains russes sont réputés à travers le monde pour leur existentialisme profond et infaillible. Dans l’esprit du moment, nous avons demandé aux auteurs les plus doués de répondre aux questions : « Comment passeriez-vous votre dernière journée ? Et si le Ravissement se produisait ? Qu’aimeriez-vous faire ? » Voici les réponses que nous avons reçues des héritiers littéraires de Tolstoï. A consommer sans modération !
German Sadulaev :
« Je ne suis pas pleinement convaincu par cette fin du monde massive le 21 décembre ou à n’importe quel autre date, il me semble que ce bordel va continuer ici encore longtemps. Mais chacun d’entre nous attend sa propre fin du monde. Parce que nous avons tous besoin de your own personal Jesus, et en fait, ce n’est pas une chanson de Depeche Mode, ils ne font que rependre le monstre sacré qu’était Johnny Cash, mais cela, vous le savez probablement. Chaque jour peut être notre dernier, c’est pour cela qu’il faut vivre chaque jour comme si la fin du monde devait avoir lieu le lendemain. Mon projet pour demain ? A 11 heures, je vais chez le notaire mettre mes documents en ordre. Ensuite, direction la salle de sport pour soulever de la fonte. Dans la soirée, je m’assieds avec un livre et je lis. Que lire ? Le Bhagavad-Gītā bien évidemment ! Enfin, je vais me coucher. Quand je me réveillerai, le monde aura déjà changé… »
Gary Shteyngart, auteur russo-américain des bestsellers le Manuel de russe débutant, Absurdistan et la Vraie histoire d’amour super triste :
« Je rattraperais pas mal d’heures de sommeil en retard. Je suis sûr que la fin du monde sera très bruyante, alors j’aimerais bien me reposer un peu avant que la fête ne commence ! »
Alexandre Ilitchevski n’a pas voulu disserter sur la fin du monde, et il existe effectivement des sujets un peu plus importants dans le monde réel :
« Je vous prie de vouloir m’excuser, mais aujourd’hui ce n’est pas le moment des réflexions futiles sur la fin du monde. La Duma a adopté une loi pour interdire l’adoption. Je suis désolé, mais c’est cela la plus terrible honte pour la Russie. »
Dmitri Bykov :
« Si je savais que la fin du monde était sur le point d’arriver, je passerais certainement le plus de temps possible avec ma famille, avant je n’y parvenais pas à cause du travail. Nous trouverions un endroit pour nous reposer ensemble. Mais je vais me dépêcher de vous dévoiler un secret : la fin du monde n’aura pas lieu, elle se produit tous les jours quand quelqu’un meurt. Mais, au même moment, la vie se régénère chaque jour. »
Sergueï Chargounov :
« Je vais essayer de répondre avec philosophie ; Léon Tolstoï disait qu’un paysan a besoin d’apprendre à vivre et à mourir, c’est-à-dire savoir comment se comporter devant la finitude de la vie. Mais Tolstoï était à cet égard assez paradoxal car il disait également qu’il fallait recommencer chaque jour. En d’autres termes, il invitait à se détacher du mode de vie traditionnel et habituel de la paysannerie; il appelait constamment à un renouvellement complet. C’est pour cette raison, il me semble, que l’intérêt pour la fin du monde concerne, disons, seulement les gens soumis à l’habitude. L’écrivain, lui, se doit de comprendre que la fin du monde a trait au personnel, que chacun a une vie limitée qui n’est pas très longue, et qu’il faut parvenir à en faire quelque chose. Bien souvent, les gens qui parlent de la fin du monde sont ceux qui ne veulent pas s’interroger sur la fuite du temps.
Je pense que si la fin du monde devait se produire de manière inattendue, j’agirais selon le principe : « Fais ce qu’il faut, et advienne que pourra ». Et je jouerais encore avec mon enfant, je continuerais à écrire mon roman bien que ça soit le dernier, je l’écrirais comme l’avant-dernier, pensant, qu’il y en aurait un autre.
On peut se souvenir de Pouchkine et son Festin pendant la peste. Ce n’est pas seulement une mise en accusation de l’indifférence, mais c’est aussi et surtout un hymne à la fête envers et contre tout. Les conditions dangereuses excluent à juste titre le recours à l’hystérie et à la nervosité. J’ai eu l’occasion plus d’une fois d’assister à des opérations de guerre, j’ai vu que les gens se comportent avec assez de réserve : dans les discours, dans les habitudes, dans les manières, les comportements sont correctes. S’il y avait une menace imminente, alors évidemment, il y aurait une flambée de la maraude et de la folie, mais beaucoup opteraient pour une variante paradoxale et vivraient comme si la vie continuait et resteraient eux-mêmes. La vie est un étrange dessein, chacun a un rôle qu’il convient d’interpréter jusqu’au bout, jusqu’à ce que le théâtre soit enflammé de toutes parts. »
Zakhar Prilepine considère lui que l’on peut même s’abstenir de penser à de telles choses :
« Je ne sais pas ce que je ferais ; probablement ce que je fais habituellement. Je m’efforcerais simple de vivre le plus possible sans penser à cela. »
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