Boulykine vit et joue en Europe depuis déjà cinq ans. Twente est son 6ème club étranger. Crédit : Getty Images / Fotobank
28ème étage
L’Alpha Tower est située à proximité de la place centrale, mais on peut également l’apercevoir de la gare. L’attaquant de Twente Dmitri Boulykine vit au 8ème étage de ce gratte-ciel. Bien que les énormes fenêtres de son appartement offrent une superbe vue sur Enschede, il nous propose de monter tout en haut, sur la terrasse panoramique du 28ème étage.
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La gestion du sport en question
Boulykine vit et joue en Europe depuis déjà cinq ans. Twente est son 6ème club étranger après le Bayer Leverkusen, Anderlecht, le Fortuna Düsseldorf, Den Haag et l’Ajax, mais il continue de tout comparer avec la Russie.
Nous prenons donc l’ascenseur. Le panorama de la ville est impressionnant, même si Enschede est loin d’être Amsterdam. « Et encore moins Moscou », souligne avec ironie Boulykine. La ville ne compte que 160 mille habitants. Elle se trouve à deux pas de l’Allemagne mais comme les frontières n’existent plus en Europe, les Allemands aiment visiter Enschede. Boulykine se rend souvent dans la capitale néerlandaise, où il garde des connaissances de son passage à l’Ajax, ainsi qu’à Düsseldorf où il a également joué.
Installé au 28ème étage, Dmitri parle avec plaisir du football russe. Sans dédain, mais avec une certaine distance. Boulykine compare en permanence son quotidien actuel avec la vie en Russie. Malgré cinq années passées à l’étranger, il dit toujours « chez nous », « notre » ou « à la maison » lorsqu’il s’exprime sur la Russie. Et il parle du football russe comme d’un ami proche mais un peu fantasque :
« De l’Europe, la situation des clubs russes paraît bizarre », explique Boulykine en haussant les épaules avec perplexité. « On ne comprend pas qui dirige quoi, qui amène quels joueurs ou qui fait quoi. J’estime devoir transmettre mon expérience, mais j’ai peur que certains ne veulent pas de mes conseils. Beaucoup d’entraîneurs étrangers ont été confrontés à ce type d’incompréhension. Ils ont proposé de bonnes solutions pour le développement les clubs. Malheureusement, ils ont chaque fois reçu la même réponse : les choses doivent rester comme elles l’ont toujours été. Peut-être que la coupe du monde qui sera organisée dans le pays apportera des changements, permettra d’améliorer le niveau du football russe et modifiera le fonctionnement dans son ensemble ».
À la maison
Dmitri est parti en Occident sur une déception. En Russie, il avait la réputation surprenante d’un joueur sans conteste talentueux, mais qui ne s’intéressait au foot qu’entre ses sorties en boîte de nuit. Les six derniers mois avant son départ en Allemagne, il a été laissé sur le banc du Dinamo Moscou, ne jouant que très peu. C’est pourquoi en 2007, Boulykine a décidé de partir afin de prouver à tous qu’il était un footballeur de haut niveau.
Cela lui a surtout réussi à Den Haag. Durant la saison 2010-2011, il y a planté plus de 20 buts et a permis à son équipe de se qualifier pour l’Europe League, ouvrant ainsi la voie à son transfert dans le légendaire club de l’Ajax. Mais cette dernière mise traditionnellement sur les jeunes, et malgré des statistiques intéressantes, Boulykine n’a pas été retenu. D’ailleurs, il ne devrait pas rester très longtemps à Twente non plus. Il souhaite en effet finir sa carrière en Russie : « Je me sens très bien en Europe, mais il y a peu de chances que je reste vivre ici. Je suis né à Moscou, où je possède une maison, et ma famille est restée là-bas. J’ai envie de rentrer en Russie pour me rendre utile. Avant de goûter à l’Europe, je ne savais même pas comment bien faire les choses et quelle voie suivre. Que ce soit dans le football ou au quotidien. dans notre pays, tout dépend malheureusement de personnes qui ne s’en rendent également pas compte ».
Histoire de la rue voisine
Après une discussion « enregistrée », Dmitri nous invite à regarder un match : son Twente joue en Europa League contre les Espagnols de Levante. Boulykine n’a pas fait le voyage à cause d’une blessure. Il s’estimait prêt à jouer, mais les médecins du club ont préféré de pas prendre de risques.
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Aux Pays-Bas, Boulykine vit seul mais sa femme lui rend souvent visite. Dmitri s’apprête d’ailleurs à chercher son épouse à l’aéroport et propose de nous déposer à Amsterdam. Il révèlera encore quelques secrets sur le chemin « pour contourner les problèmes » : « Vous savez comment éviter les amendes sur les routes ? Selon la législation allemande, la police doit présenter une photographie de l’avant de la voiture avant d’infliger une amende. Alors que pour la loi néerlandaise, elle doit disposer d’une photo de l’arrière du véhicule. C’est pourquoi certains immatriculent leur voiture en Allemagne. Ainsi, lorsqu’ils sont verbalisés pour une infraction aux Pays-Bas, ils refusent de payer, jugeant les accusations infondées car les photographies ne montrent pas le visage du conducteur ».
« Cependant, les Européens respectent généralement les lois. Quand tu leur expliques qu’on peut toujours trouver des échappatoires, ils t’écoutent et sont d’accord avec toi. Mais ils finissent toujours par dire : « non, ce n’est pas bien ». La réalité russe est souvent difficile à comprendre pour les Européens. Je leur raconte fréquemment l’histoire du Dinamo qui ne voulait pas me vendre tout en me laissant sur le banc malgré mon salaire énorme. Et ils n’en croient pas leurs yeux. J’explique la mentalité russe avec la phrase suivante : « notre rue fait la fête lorsque la rue voisine connaît des problèmes ». Et même s’ils ne comprennent pas l’intérêt de souhaiter du mal à la rue voisine, les étrangers reconnaissent toute l’originalité de notre vision du monde ».
La route vers Amsterdam
Nous fonçons vers Amsterdam. « Je n’y vais plus si souvent que cela », dit Dmitri, avec une tristesse dans la voix qui nous fait curieusement penser aux rumeurs sur sa vie nocturne à Moscou.
« Non, ça n’a rien à voir », sourit Boulykine. « Quand je jouais à l’Ajax, presque tout le monde me connaissait. Tous les Néerlandais s’intéressent tous au football. Que ce soit dans la capitale, à La Haye ou à Enschede, les gens me reconnaissaient dans la rue, me regardaient, s’approchaient, me saluaient et me souhaitaient bonne chance. Je ne me sens pas comme chez moi aux Pays-Bas, mais je suis content d’apporter du bonheur aux gens. Par exemple, un homme m’a dit un jour : « Dmitri, vous êtes l’idole de mon fils. Il vous suit et a acheté les mêmes chaussures que vous !". En Russie, on ne voit pas ce genre de comportements ».
Paru sur le side de Moskovskie Novosti le 13 novembre.
/p
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