Sergueï Narychkine : « En politique on distingue les catégories d’« adversaires », de compagnons, de collègues, de « membres d’une même équipe », dans laquelle on trouve son leader ». Crédit : Itar-Tass
Parmi les évènements politiques discutés ces derniers temps, on compte « l’affaire » de l’ancien député Guennadi Goudkov. Il est difficile de ne pas remarquer, que l’éviction de son mandat coïncidait avec sa bruyante activité oppositionnelle. Ne vous apparaît-il pas que la Douma a créé un précédent dangereux, en annulant le mandat d’un député pour des raisons politiques ?
Avant de vous répondre, je souhaiterais faire remarquer que les journalistes se doivent d’être objectifs et indépendants. C’est pourquoi je vous recommanderais de ne pas chercher des associations là où il n’y en a pas. Guennadi Goudkov est une personnalité connue au sein de l’opposition. Pendant tout ce temps, personne ne l’a dérangé. Et aujourd’hui encore personne ne le dérange. Et son mandat fut annulé pour de toutes autres raisons. La loi concernant le statut des députes, son quatrième article, interdit aux députés d’entrer dans la composition des organes de direction d’organisations commerciales et d’avoir une activité entrepreneuriale. Les matériaux présentés à la commission de la Douma démontrent que Goudkov a effectivement eu une telle activité. La chambre l’a confirmé.
Admettons. Mais M. Goudkov est-il le seul dans cette situation ? D’autres députés n’ont-ils pas des activités similaires ?
Vous savez semble-t-il que des demandes ont été faites à mon adresse par les dirigeants d’autres partis, afin de vérifier si d’autres députés ont aussi de telles activités. J’ai confié ces informations à la commission. La commission travaille. Et aucune requête ne sera laissée de côté.
Et si la commission découvre des violations similaires de la part des députés, notamment de la part des députés de « Russie Unie » ?
Le parlement agira strictement selon la loi. Sans se dérober.
Cet été, la Douma a adopté une loi selon laquelle les organisations non gouvernementales, qui reçoivent de l’argent de l’étranger, doivent s’appeler « agents étrangers ». Cette formulation est considérée comme offensante par un grand nombre de défenseurs des droits de l’homme.
Il me semble qu’il faut séparer le droit des émotions. L’espionnage, est un crime pour lequel on peut recevoir jusqu’à 20 ans d’emprisonnement si je me rappelle bien. Personne n’accuse de crime ces organisations non gouvernementales (ONG) qui existent et travaillent avec les moyens d’organisations étrangères. Personne ne les poursuit ou n’interdit leur activité. La question est toute autre : nos concitoyens ont le droit de savoir, avec quels fonds l’activité politique d’organisations non commerciales est financée. Nous devons créer les conditions, quand le business, et la société « sortent de l’ombre ». Les législateurs ont proposé aux ONG de « sortir de l’ombre ».
Et pourtant la question est encore dans la dureté des formulations. Pourquoi est-il interdit de choisir un mot plus neutre ?
Le terme d’« agent » est très répandu dans le monde entier, et il est, de mon point de vue, suffisamment neutre. Les formules d’« agent commercial » ou d’« agent fiscal » ne vous effraient pas ?
Sur l’agenda de la Douma se trouvent des modifications à la loi « Sur le service étatique civique ». On souhaite interdire aux fonctionnaires de posséder des biens immobiliers à l’étranger. N’y a-t-il pas dans une telle initiative une sorte de populisme ouvert ?
Aujourd’hui ce projet est activement discuté, non seulement à la Douma où différents points de vue sont exprimés de la part des députés, des scientifiques de la part de la communauté des experts. Les discussions se poursuivent et j’espère qu’une décision optimale sera trouvée. Mais je suis certain que les buts des initiatives ne peuvent être atteints qu’à l’aide des instruments proposés dans le projet de loi.
L’équipe qui est aujourd’hui au pouvoir est souvent accusée de clanisme, que tous les postes gouvernementaux seraient occupés par des gens dont la biographie se croise avec celle de Vladimir Poutine. Considérez-vous qu’il y a du clanisme ou non ?
Un tel terme ne convient pas. En politique on distingue les catégories d’« adversaires », de compagnons, de collègues, de « membres d’une même équipe », dans laquelle on trouve son leader. Prenons les élections présidentielles françaises. Le nouveau président a apporté à son équipe, a changé le gouvernement, l’appareil présidentiel. Sont arrivés des gens aux vues proches du nouveau président, avec lequel il a évidemment travaillé auparavant. Mais cela reste des professionnels dans leurs sphères. C’est un processus normal, une procédure normale. Cela a lieu également en Russie.
Ces six derniers mois, le monde entier a discuté, de la chanteuse Madonna aux députés du Bundestag et au maire de Reykjavik, c’est l’« affaire » des Pussy Riot. En tant que citoyen et législateur, considérez-vous que la sanction est légale et juste ?
D’un point de vue moral, je considère cet acte répugnant. Je regrette beaucoup, que les membres du groupe ne se repentent pas de leurs actes. En ce qui concerne la décision de justice, je ne voudrais pas donner de jugement. Vous me posez cette question en tant que président de la Douma. Je considère qu’à un tel poste il n’est pas admissible de porter un jugement sur la justice.
Article original (en russe) disponible sur le site de Rousski Reporter.
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