La 2e Biennale industrielle a ouvert ses portes à Ekaterinbourg

Vladimir Seleznev, originaire d’Ekaterinbourg, a décoré une salle entière avec les slogans des campagnes électorales récentes. Crédit : Tatiana Andreeva

Vladimir Seleznev, originaire d’Ekaterinbourg, a décoré une salle entière avec les slogans des campagnes électorales récentes. Crédit : Tatiana Andreeva

Les artistes ont présenté des œuvres d’art contemporain et des ballets dans l’enceinte d’usines en fonctionnement.

Des dizaines d’artistes venus de 30 pays différents (Russie, Allemagne, États-Unis, Bulgarie, etc) sont venus participer à la 2e Biennale industrielle d’Ekaterinbourg, à 1755 km de Moscou. Ils se sont penchés sur le thème de « l’industrialisation régionale et ses interactions avec la culture contemporaine », en transformant les usines de l’une des plus anciennes régions industrielles de Russie en résidences artistiques.

Pour s’exprimer, les artistes contemporains ont ainsi pu disposer de « Ouraltransmach », une usine de matériel de montagne ; du musée-réserve naturelle de Nijni-Taguil ; du musée d’histoire et d’architecture de Neviansk (une tour élevée au XVIIIe siècle par un industriel célèbre de l’Oural qui y fabriquait de la fausse monnaie ou  fondait en douce de l’or et de l’argent issus de ses mines) ; la principale imprimerie de l’Oural et le stade central de Ekaterinbourg. Une trentaine de projets se sont installés dans l’imprimerie « L’Ouvrier de l’Oural », dont la moitié est désaffectée aujourd’hui.

Les espaces qui ont été retenus pour la Biennale sont ceux dont les propriétaires ont donné leur accord. Il reste encore de nombreuses entreprises fermées et secrètes dans l’Oural. Une semaine avant le début de l’exposition, les artistes se sont complètement immergés dans la vie industrielle, en observant le travail des ouvriers.

L’usine « Ouraltransmach » accueillera un ballet en un acte, créé par l’Opéra de Ekaterinbourg comme une synthèse de la chorégraphie contemporaine, la musique électronique et classique, l’art moderne et l’architecture industrielle. Les ouvriers participeront aussi à la représentation.

La Biennale durera jusqu’au 22 octobre, et devrait accueillir entre 60 à 100 000 visiteurs selon les estimations. Pendant les préparatifs, les gens s’étonnaient déjà. L’une des installations n’était qu’un amoncellement de boites en carton vides, sans que l’on sache s’il s’agissait de déchets ou d’une future œuvre d’art. En réalité, c’était un élément d’une gigantesque installation de l’artiste bulgare Netko Salakov, intitulée « Tout ce que vous avez toujours rêvé de faire à certaines personnes, surtout avec l’élite politique, faites-le avec ces cartons ». Non moins mystérieuse est l’immense tache jaune sur un mur, avec cette modeste légende : « J’ai confié cette tache jaune à l’assistant de l’exposition mais j’ai complètement oublié pourquoi ».

L’artiste turc Kutluk Ataman a assemblé 40 postes de télévision dont chacun diffuse une interview avec un habitant d’un ghetto turc. Vladimir Seleznev, originaire d’Ekaterinbourg, a décoré une salle entière avec les slogans des campagnes électorales récentes. Au premier abord, les inscriptions sont invisibles. Elles n’apparaissent que sous un éclairage particulier. L’auteur considère que les promesses électorales ne sont d’actualité que pendant la campagne. Après les élections, on les oublie. C’est pourquoi les slogans disparaissent quand on éteint la lumière, et on voit apparaitre l’inscription « En vain. En vain… »

L’Américain Nikolas Freiser suggère que les règles du marché libre rappellent une partie de base-ball. Il a donc proposé aux ouvriers de l’usine métallurgique de Nijni Taguil d’y jouer avec lui.

« À chaque artiste, son usine » - telle est la devise de la Biennale. Mais cet espace industriel, à quoi ressemble-t-il ? En général, c’est un local abîmé aux murs délabrés, avec des machines-outils vétustes. « Y introduire des œuvres d’art est un art particulier », a noté le critique d’art Alexandre Stepanov, membre de l’Union des artistes. 

James Morgan (États-Unis)

« J’ai créé une installation sur le thème de la vallée de titane de l’Oural. Nous avons visité l’endroit où avait été construite la première usine. Je viens moi-même de la « silicone valley » américaine. Une équipe importante a participé au projet, des gens venus de 13 fuseaux horaires. Il y a eu la barrière de la langue aussi, mais j’ai eu de la chance avec cette équipe ».

Léonid Tichkov (Russie)

« J’espère que les visiteurs de la Biennale ne se limiteront pas à simplement regarder les images et tout le reste mais feront avec l’artiste le chemin de l’intention à la création de l’œuvre d’art, qu’ils soient émus ! L’artiste, quand il créé, est ému, il découvre une nouvelle vision, et j’aimerais que le spectateur soit impliqué dans le processus, qu’il devienne un co-créateur ».

Mathieu Martin (France)

« La Biennale m’a permis de créer mon premier projet de taille : repeindre le symbole révolutionnaire de la ville d’Ekaterinbourg, le château d’eau blanc, l’embraser de nouveau, telle une flamme. C’est mon premier projet en Russie. Et j’ai l’impression qu’un tel projet aurait été impossible en France, alors que c’est si simple ici. Si j’avais pu faire la même chose dans mon atelier, je n’aurais pas parcouru 5000 km. Mais je voulais travailler avec un élément du paysage urbain, et je n’en trouve pas de tels dans mon pays ».


Nikolas Freiser (États-Unis) 

« C’est mon premier séjour en Russie et je me délecte de la générosité des gens qui m’entourent. Tout le monde est très enthousiaste pour mon projet et prêt à tout pour m’aider. Votre ville, Nijni Taguil, ressemble à une communauté fermée qui aime son histoire ».

Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.

Ce site utilise des cookies. Cliquez ici pour en savoir plus.

Accepter les cookies