L'équipe franco-russe avant le vol à la Station spatiale internationale sur le vaisseau spatial Soyouz-TM 33 en 2001. Sur la photo (de gauche à droite) : Konstantin Kozeev, Victor Afanassiev, Claudie Eniere, Sergueï Zaletine et Nadezhda Kuzhelnaïa. C
Les hommes restent majoritaires dans le domaine de la conquête spatiale. Si dans d'autres pays, de plus en plus de femmes enfilent leur scaphandre pour partir à la découverte des hautes altitudes, cette tendance n'est pas encore au goût du jour en Russie.
Pourtant, un détachement de femmes cosmonautes russes existe déjà depuis cinquante ans. En 1962, cinq femmes accédèrent à cette fonction : Irina Soloveva, ingénieure, Valentina Ponomareva, mathématicienne, Valentina Terechkova, tisserande, Janna Erkina, enseignante et Tatiana Kouznetsova, sténographe.
Les candidates furent soumises à de nombreux tests. L’endurance de leur organisme en cas de températures fut contrôlée dans une chambre isotherme. Après avoir revêtu des combinaisons d’été, les candidates s'installèrent dans le local par une température de 70 degrés. Le taux d’humidité était de 30 %. Elles devaient y rester tant que la température de leurs corps n'avait pas augmenté pas de 2,5°C et que leur pouls n'atteignait pas les 130 pulsations par minute.
Les femmes volèrent ensuite à bord d’un chasseur Mig-15. Au cours d’un seul vol, le pilote pouvait réaliser trois ou quatre virages décrochés et restait environ 40 secondes en état d’apesanteur. Au cours du premier virage, il fut demandé aux jeunes femmes de noter leurs noms, prénoms et nationalités avant d’indiquer la date et de signer. Lors du deuxième, les candidates durent essayer de manger. Elles eurent pour consigne de prononcer une phrase dans un talkie-walkie au cours du dernier.
Les épreuves maritimes étaient également complexes : elles visaient à perfectionner les réflexes des cosmonautes en cas d'amerrissage. Il n'y avait qu'un scaphandre pour tous. Celui-ci n'était donc pas taillé sur mesure et correspondait à une taille standard de 168-170 centimètres, alors que Terechkova et Erkina atteignaient tout juste les 1,64 m et que Ponomareva et Soloveva ne mesuraient que 1,61 m.
D’après les participantes, le casque pressurisé se décollait vers l'avant à l'amerrissage et les écouteurs glissaient sur les yeux. Il fallait imiter le largage d'un parachute, avec les sangles qui traînaient derrière et sur les côtés…et tout cela affublé d'un scaphandre et de gants ! Il leur était difficile d’atteindre les brides, sans parler de les ouvrir. Au moindre retard, le corps commençait à s’échauffer.
Suite à l’examen de préparation au voyage dans l’espace, le groupe fut officiellement présenté à Korolev, fondateur du programme spatial soviétique qui avait toujours exprimé sèchement l’insatisfaction que lui procurait l’existence de ce détachement féminin.
Le 16 juin 1963, Valentina Terechkova et Irina Soloveva se présentèrent sur la base de lancement, équipées de scaphandres. Cependant, au moment de l’enfiler, le scaphandre d’Irina Soloveva présentait une fente au niveau du cou. Il fallut l’échanger rapidement contre celui de Valentina Ponomarevaïa. Si le scaphandre de Terechkova s'était sectionné, le remplacer par celui de quelqu'un d'autre aurait été impossible en raison de leurs différences de taille. Irina Soloveva aurait alors été la première femme cosmonaute.
Valentina Terechkova vola pendant trois jours consécutifs : tout le groupe de femmes était réuni dans le cosmodrome. Le 19 juin, le vaisseau Vostok et Valentina Terechkova atterrirent avec succès À ce stade, tout le détachement savait déjà que Terechkova s’était sentie inutile et n'avait pas réussi à respecter toutes les consignes.
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Le vol triomphal de Terechkova n'ébranla pas les convictions de Korolev, persuadé de l'inaptitude professionnelle de ce détachement de femmes qui fut finalement dissous après sa mort, à l'automne 1969. Seule Terechkova conserva son poste au sein du département de manière purement formelle jusqu'en 1997.
Huit femmes furent ensuite choisies pour effectuer des vols vers les stations orbitales au sein du détachement Energia. Pourtant, seulement deux d'entre elles eurent la chance de voler dans l'espace : Svetlana Savitskaïa, fille d’officier général, et Elena Kondakovaïa, femme de Valeria Rioumine, cosmonaute adjoint du directeur général.
Nadejda Koujelnaïa était la dernière femme à faire partie du corps des cosmonautes jusqu'à 2004. Ses parents n’étaient pas hauts placés dans la hiérarchie. Considérée comme une grande spécialiste, elle n’a pourtant jamais volé en dix ans de service.
Elena Serova est actuellement la seule femme à faire partie de Roskosmos et son avenir est encore incertain : elle a intégré le centre en 2006 mais n'a pourtant aucun vol à son actif.
Les résultats des recherches portant sur l'influence des voyages dans l’espace sur la santé des femmes ne sont pas encourageants. Voilà quelques points soulevés par le dernier compte-rendu publié par la NASA.
1. Le niveau de radiation au moment des vols en orbite terrestre basse puis dans l'espace compromet tout désir de grossesse. En effet, pour qu’une grossesse reste possible, le taux de radiation ne devrait pas dépasser 500 µR (pas plus de 50 µR par mois). Dans la station spatiale internationale, le niveau changeait en fonction de la situation de la station dans l'espace mais pouvait atteindre 35 000 µR sur neuf mois. L'influence de l'espace peut conduire à une absence d'ovulation et une réduction du taux d'œstrogènes. Ce phénomène entraîne la décalcification des os et conduit à l'ostéoporose (phénomène plus important chez les femmes que chez les hommes).
2. En l'absence de gravité, les risques d'endométriose, trouble hormonal des organes féminins, peuvent augmenter en raison de la stagnation sanguine au sein des organes du petit bassin.
3. Il est conseillé aux astronautes de faire congeler leurs ovules et leurs spermatozoïdes avant tout vol s'ils espèrent un jour devenir parents.
Rostislav Beleda, expert russe en navigation spatiale et élève de médecine a travaillé pendant 14 ans sur les principales pathologies sexuelles au sein de l'hôpital central de recherche scientifique spatiales Il est persuadé que les vols spatiaux ont des répercussions négatives sur toutes les fonctions du corps féminin, notamment les fonctions reproductives, par nature très fragiles. Aucune des cosmonautes américaines n'a eu d'enfants après les vols. Les hommes ont également rencontré des complications : s’ils ne sont pas devenus stériles, ils n’en étaient pas moins impuissants.
Après de nombreuses années de recherche, la communauté scientifique internationale a malheureusement réalisé qu’il était impossible à ce jour de se reproduire dans l’espace. Les équipages de la station spatiale internationale ont mené des expériences à plusieurs reprises sur des poussins de caille japonais qu’ils avaient envoyés dans l’espace. Tous les poussins sont morts. Certains sont morts à bord de la station. Les autres n'ont pas supporté l'atterrissage. Ils ne pouvaient pas se nourrir normalement ni s'orienter dans l'espace. Ce constat reste à ce jour sans explication.
Enfin, des statistiques américaines concernant la vie des femmes qui ont voyagé dans l’espace ont été réalisées de manière indépendante. Aucune d’entre elles (elles furent plus de 30) n'eut d'enfants par la suite. Il n'y a aujourd'hui qu'un couple d’astronautes américains : Margaret Seddon et Robert Gibson. Le couple que constituaient Ronald Sega et Bonnie Dunbar s'est séparé l'an dernier. Ils n'avaient pas d'enfants. 63% des hommes astronautes et 80% des femmes présentent des dysfonctionnements sexuels.
Le manque de confiance en l’avenir du programme de pilotage russe et les répercussions qu’entraînent les voyages spatiaux sur la santé des cosmonautes ont conduit Vitali Davydov, directeur adjoint de Roskosmos, à reconnaître l'année dernière que le nombre de candidatures féminines au concours d'admission était trop faible.
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