Crédit photos : Tatiana Chramtchenko
« Une certaine rigidité dans l’appréhension [de l’art contemporain] est caractéristique de notre peuple », nous fait part de son constat Iossif Bakstein, directeur de l’Institut de recherche sur l’art contemporain et membre du jury du concours, lors de l’inauguration de l’exposition des nommés. L’objectif d’« Innovation » est justement d’aider les artistes contemporains russes à toucher un public croissant.
Ce prix comprend sept nominations : « Projet de curateur », « Théorie, critique et histoire de l’art », « Projet régional », « Œuvre d’art visuel », « Apport artistique au développement de l’art contemporain » et un prix pour le moins symbolique « Pour le soutien de l’art contemporain russe », qui fut remis cette année au fameux peintre et sculpteur Zourab Tsereteli, à l’origine, en 1999, de la création du Musée d’art contemporain de Moscou.
En plus des experts russes, les membres du jury comptaient des invités de marque tels que Kristoffer Gansing, le directeur artistique de Transmediale, Festival berlinois de la culture numérique, ainsi que Marc-Olivier Wahler, directeur du Palais de Tokyo à Paris. Les genres représentés étaient multiples : photographie, installations, dessin, vidéo, performances. Dans cette diversité, difficile de déterminer les critères sur lesquels le jury se basait pour porter son dévolu.
Le prix « Nouvelle génération », pour un artiste de moins de 35 ans (7800 euros), a été décerné à la jeune moscovite Taous Makhatcheva pour son projet vidéo sur le milieu kitch des rallyes nocturnes au Daguestan, ces courses automobiles effrénées à travers les rues de la ville qui ne laissent pas la police fermer l’œil de la nuit. Pour se faire accepter de ce milieu très fermé, l’artiste a dû « déguiser » sa voiture de vieilles fourrures achetées aux puces. La course à laquelle elle devait participer n’a pas eu lieu en raison d’une intervention policière, mais l’événement n’a pas manqué de faire grand bruit.
Le prix « Projet régional » (12 800 euros) a été remis à deux artistes russe et polonais pour « Anklav », leur travail sur un thème d’actualité, consacré à Kaliningrad, la ville russe entourée de pays européens. Les auteurs ont créé une sorte de carte alternative de la ville, reflétant son histoire.
Le gagnant de la catégorie « Projet de curateur » (12 800 euros) est le travail de recherche « Génération Z : les pionniers des technologies musicales de la Russie des années 1910-1930 », consacré aux pères fondateurs de la musique électronique soviétique, aujourd’hui oubliés mais qui sont à l’origine de la musique électro telle qu’on la connait de nos jours. Pour l’anecdote, cette exposition a déjà été présentée sous le nom de « Sound in Z », en 2008, à Paris au Palais de Tokyo dans le cadre du projet « From one revolution to another ».
Le grand prix pour l’« Œuvre d’art visuel » (20 000 euros) a été décerné à l’artiste moscovite Alexandre Brodsky pour son installation « Cisterna ». Nous faisant pénétrer à l’intérieur d’un gigantesque collecteur sous terrain, l’artiste permet au public d’éprouver le vide, sensation si difficile à atteindre dans le grouillement de nos mégapoles.
Par ailleurs, le British Council et l’Ambassade de France en Russie ont, cette année encore, prévu une récompense spéciale pour la catégorie « Nouvelle génération » et l’on décerné à l’unanimité au photographe Alexandre Gronsky pour sa série sur les banlieues. L’heureux gagnant se verra alloué une bourse de 3 mois pour une résidence à la Cité des arts à Paris ainsi qu’à un séjour au Wysing Arts Centre à Oxford.
Force est de constater que l’un des objectifs essentiels du concours « Innovation » est de promouvoir les artistes contemporains russes à l’étranger. Mikhaïl Mitline, le directeur du Centre national d’art contemporain, a souligné qu’il est question de montrer cette exposition « Innovation » à Londres dans le cadre de l’Olympiade culturelle. En attendant, vous pourrez voir les travaux des nominés jusqu’au 1 mai 2012, à Moscou, au Centre national d’art contemporain.
Lisez sur la page 2 : Marc-Olivier Wahler, directeur du Palais de Tokyo à Paris, a expliqué à La Russie d'Aujourd'hui pourquoi l'art contemporain russe est le bienvenu à Paris.
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Marc-Olivier Wahler, directeur du Palais de Tokyo à Paris, a expliqué à La Russie d'Aujourd'hui pourquoi l'art contemporain russe est le bienvenu à Paris.
La Russie d’Aujourd’hui : Vous avez donné le prix spécial « Nouvelle génération » au photographe Alexandre Gronski, pour sa série de photographies des banlieues urbaines. Pourquoi ?
Marc-Olivier Wahler : Premièrement, parce qu’il a fait du beau travail, c’est certain, mais aussi en raison de son idée de la résedence. C’est à dire de voir ce que l’artiste pouvait faire à Paris. Et j’ai notamment pensé à ce que l’architecture à Paris essaie de changer dans ces prochaines années notamment ce qu’on appelle le Grand Paris. On essaie de pousser les limites du Paris actuel toujours plus loin, et j’ai entendu dire qu’à Moscou il se passe plus ou moins le même phénomène, et que l’on parle désormais de Grand Moscou. Alors on s’est dit pourquoi un artiste de Moscou ne viendrait-il par à Paris pour travailler sur ces idées de périphérie qu’on a observées dans son travail.
Plus concrètement, qu’est-ce que cette invitation peut offrir à l’artiste ?
Il va passer quelques temps à Paris, on va lui faire connaître un réseau, on va lui proposer de rencontrer des gens. Tout ça va lui permettre de développer un travail, une œuvre propre à la géographie de Paris. Et puis il vient avec son background et apporte un peu de Moscou à Paris aussi.
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