La démographie en hausse

Image de Viktor Bogorad

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Malgré le reproche fait par certains au Service fédéral russe des statistiques (Rosstat) sur le manque d’exactitude des chiffres du recensement de la population, les facteurs indirects tels que la hausse des ventes de détail, y compris dans le secteur alimentaire, confirment que la situation démographique n’est plus aussi catastrophique qu’il y a dix, voire même cinq ans.

En Russie, les points négatifs comme la faiblesse des institutions, la corruption, la fuite des capitaux, la forte dépendance à l’égard du prix du baril ont malheureusement tendance à éclipser les grandes avancées que connaît le pays. Cela a été particulièrement flagrant en 2011, où les investisseurs étrangers se sont détournés de la Russie, invoquant des risques politiques accrus et une importante fuite de capitaux.

Pourtant, la croissance économique est toujours au rendez-vous et il est probable qu’elle se poursuivra cette année encore, malgré un léger ralentissement. Ce qui permet de conclure que les facteurs positifs sont plus nombreux que les négatifs.

Un des facteurs contribuant à maintenir cette croissance est l’amélioration de la situation démographique. Selon Rosstat, fin 2009, la population russe était de 141,9 millions d’habitants; en 2010, elle était de 142,9 millions, un chiffre bien plus élevé que prévu. Et en 2011, elle aurait augmenté d’environ 100 000 personnes pour atteindre 143 millions de résidents permanents. La migration n’est pas la seule raison de cette amélioration démographique.

En Russie, la population a arrêté de diminuer vers 2007-2008, pour se stabiliser, avant d’enregistrer une légère augmentation en 2010. Toutefois, le processus de déclin avait déjà ralenti quelques années auparavant pour laisser place à une dynamique plus forte que les pronostics « les plus optimistes ».

L’allongement de l’espérance de vie, qui avait chuté pour les hommes comme pour les femmes au début des années 90, est également un signe encourageant. En 2009, la moyenne de 68,7 ans était de nouveau atteinte (62,8 pour les hommes et 74,7 pour les femmes). Si l’on se fie aux données de 2010-2011, ces chiffres continuent de grimper.

Depuis les années 2000, la natalité augmente progressivement tandis que la mortalité baisse. L’accroissement naturel de la population reste négatif mais dans une moindre mesure que ces vingt dernières années. Les grandes causes de mortalité propres à la population russe par rapport aux pays développés, comme les accidents de la route, l’alcool ou la drogue sont toujours d’actualité mais les chiffres ont tendance à baisser. C’est, semble-t-il, le résultat d’une amélioration du bien-être conjuguée à des mesures efficaces de l’ État pour stimuler la natalité.

Indéniablement, l’immigration a joué un rôle crucial dans la stabilisation démographique de la Russie. Les immigrés sont en majeure partie des personnes en âge de travailler, ce qui a contribué à renforcer la part de la population active (alors qu’une baisse de plus de 500 000 personnes par an était attendue en 2006-2007). L’immigration a permis à la Russie de maintenir une certaine stabilité, sans avoir un plus grand nombre de bouches à nourrir par travailleur.

Le flux d’immigration le plus important a été observé au début des années 1990, venu en grande partie des ex-pays de l’Union soviétique. Après une période de baisse, l’immigration a repris depuis six ou sept ans. Le fait plus marquant est que le flux ne provient pas uniquement d’alliés proches mais également de la Géorgie ou des pays baltes.

Notons également qu’en 2011, le solde migratoire de la Russie était positif avec certains pays développés comme l’Allemagne et Israël (sans parler de la Grèce). Bien sûr, le volume des échanges migratoires avec ces pays est sensiblement moindre qu’avec l’Asie centrale mais force est de constater que la tendance observée se confirme. Les investissements directs à partir de ces pays s’accompagnent d’un renfort de capital humain, souvent constitué de cadres supérieurs.

La Russie est-elle un pays attractif ? C’est une affaire de goût. Mais le solde migratoire positif est en tout cas un très bon signe. La Russie peut donc être une source de revenu pour des travailleurs immigrés, motivés, qui vont peu à peu influer sur le milieu social et politique du pays.

Toutefois, il ne faut pas omettre le rôle crucial joué dans cette amélioration démographique par les programmes sociaux de soutien à la natalité, ainsi que par le contexte de croissance économique qui a renforcé la confiance en l’avenir au sein de la population russe. Les autorités semblent aujourd’hui prêtes à prendre en compte l’importance du facteur démographique et à adopter les mesures nécessaires pour libéraliser les lois sur l’immigration. La politique sociale devra être axée sur le retour à l’équilibre démographique dans le pays, ce qui passe par une hausse de la natalité et une baisse de la mortalité.

Evguéni Gavrilenkov est économiste en chef à la banque d’investissement « Troïka Dialog ».


Article initialement publié dans Vedomosti

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