Garder la ligne en Russie

Crédits photo : Lori/Legion Media.

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Moscou est le dernier endroit pour faire un régime : cela prend deux fois plus de temps de perdre un kilo que de prendre 500 grammes.

Dee Dee, une expatriée fraîchement débarquée dans la capitale russe gémit: « Y a-t-il un centre Jenny Craig à Moscou ? »

 

« Bien sûr », lui réponds-je, avec une pointe de sarcasme. « Je suis étonnée que tu ne l’aies pas remarqué. C’est juste là, sur la Place Rouge, entre Target et Whole Food ».

 

Hélas, non. Il n’y a même pas de réunions Weight Watchers dans le coin. Américains, si vous avez le mal du pays, vous trouverez un McDo à presque chaque coin de rue, un KFC et un Chili récemment ouvert sur la Nouvelle Arbat. Moscou est le dernier endroit pour faire un régime : cela prend deux fois plus de temps de perdre un kilo que de prendre 500 grammes, et stocker des fruits frais dans le frigo, de la viande maigre ou des grains entiers est un vrai parcours du combattant. Est-il étonnant que les femmes expatriées aient du mal à lutter contre les kilos ?

 

J’ai rencontré Dee Dee autour d’un café Latte, et après beaucoup de persuasion, Larissa, la serveuse, a accepté de les préparer avec seulement 1,8 pourcent de matière grasse au lieu des 3,5 habituels.

 

« J’ai pris 22 livres (10 kilos) en deux mois ! Je n’ai pas tout de suite remarqué parce que la balance de ma chambre d’hôtel était en kilos. En fait, je pensais avoir perdu un peu de poids, mais quand notre conteneur est arrivé avec ma balance, j’ai été horrifié. Pensez-vous qu’il ait pu être déréglé durant le voyage ? ».

 

« C’est fort possible », lui dis-je pour la rassurer.

 

« Et regardez, toutes ces filles maigres », elle agite sa main vers la rue Tverskaïa. « Êtes-vous en train de me dire qu’elles se nourrissent en permanence de lait riche en matières grasses et de frites ?» .

 

« C’est la génération Banane », lui réponds-je. La théorie douteuse de la Génération Banane est un baume apaisant pour toutes les femmes expatriées qui gardent prudemment un oeil sur la jolie secrétaire de 40 kilos de leur mari. La génération Banane correspond à cette génération de Russes anormalement grands et minces entrés dans la puberté juste après la Perestroïka, quand les Etats vassaux comme Cuba payaient leur dette à la Russie en fruits, inondant les rayons préalablement vides de bananes. Et selon la théorie, la banane produirait des poussées de croissance anormalement élevée.

 

« C’est ridicule », se moque Dee Dee. « Elles suivent forcément un régime ».

 

En 20 ans de vie à Moscou, j’ai vu des centaines de régimes aller et venir. Dans le début des années 90, certains vendeurs hyperactifs dans le métro abordaient les passants dans leurs vestes en cuire crasseuses, « Vous voulez perdre du poids ? Demandez-moi comment ». Très vite, un programme révolutionnaire plus connu sous le nom de New Ways les a remplacé. Les boissons et les poudres New Ways étaient en fait fabriquées à partir de poudre de talc dans une usine douteuse et obsolète de la banlieue de Minsk. Les pilules amaigrissantes de Thaïlande ont jouit d’une énorme popularité, jusqu’à ce que survienne une série d’hospitalisations.

 

Et puis le président Vladimir Poutine a introduit le brièvement populaire régime du Kremlin, un programme innovant qui élimine sucres, amidons et alcool, ne laissant que les protéines et les légumes. Une diète éclipsée par l’arrivée de la méthode Atkins. Enfin un régime conçu pour les Russes !

 

Dee Dee et moi avons opté pour une solution très expatriée. Nous avons créé notre propre groupe de soutien à la Weight Watchers, recrutant facilement d’autres expatriés en tant que nouveaux membres. Nous avons organisé des réunions à quelques reprises pour se peser, mais le projet a vite sombré en bureau des plaintes autour de verres de vin. Qui a été un moyen très efficace d’accumuler les kilos !

 

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