L’Abkhazie à l’ombre du grand frère russe

Alexandre Ankvab,  président de l'Abkhazie. Crédits photo : Itar-Tass.

Alexandre Ankvab, président de l'Abkhazie. Crédits photo : Itar-Tass.

L’ancien vice-président Alexandre Ankvab est devenu, le 26 août dernier, le troisième président de cette république qui s’est séparée de la Géorgie et rapprochée de la Russie.

L’Abkhazie est un coin subtropical du Caucase, situé sur les rives de la mer Noire. Prisé pour ses stations balnéaires du temps de l’URSS, ce petit bout de paradis est aujourd’hui à l’abandon. La région a été durement touchée durant le conflit mené en 1992-93 contre la Géorgie dont elle voulait se séparer. La majorité des Abkhazes dé­tiennent un passeport russe et, par conséquent, sont en droit de voter aux élections présidentielles en Russie. Mais c’est leur ­propre scrutin présidentiel qui a animé la saison estivale.


Pour un touriste de passage, la procédure électorale peut pa­raître étrange. Dès l’aurore, les gens se pressent aux bureaux de vote, bien avant l’ouverture officielle du vote. « Il y a encore une semaine, j’ai appelé Ankvab et je lui ai dit que je voterais pour lui » , raconte Evgueni, un rapatrié né à Soukhoumi, la capi­tale de l’Abkhazie, et rentré au bercail au moment de sa re­traite. Cette accessibilité du pouvoir n’est pas une nouveauté en Abkhazie. Sergueï Bagapch, le prédécesseur d’Ankvab, aimait aller à la rencontre de la population locale. D’ailleurs, de nombreuses réunions informelles se tenaient dans un petit café du bord des quais, non loin de l’administration présidentielle.


Le président s’asseyait à une table, commandait une tasse de café turc, allumait une cigarette. N’importe quel visiteur pouvait s’asseoir à sa table et discuter avec lui. Ce café présidentiel est appelé, aujourd’hui encore, la brekhalovka (du verbe russe brekhat , qui signifie tenir une conversation légère).


La Russie apporte une aide électorale à l’Abkhazie en contribuant à l’organisation du travail du centre de presse et à l’accueil des observateurs. Après le scrutin, les Abkhazes se rassemblent autour des bureaux de vote, se hissent aux fenêtres, et suivent attentivement le dépouillement. Les résultats officiels sont annoncés le jour suivant, à midi, mais dans les quartiers généraux, les résultats sont connus à peine cinq heures après la fermeture des bureaux de vote.


Evgueni est satisfait : son favori, Alexandre Ankvab, l’a emporté au second tour le 26 août. Le président de la Fédération de Russie, Dmitri Medvedev, a félicité le nouvel élu dans lequel les Abkhazes sont nombreux à voir, ironiquement, leur Vladimir Poutine. Mais il revenait à Medvedev de souhaiter « un renforcement des relations russo-abkhazes ».


Issu de la police, Ankvab cultive l’image d’un homme dur (il a survécu à quatre tentatives d’élimination au cours de sa carrière politique) et ferme, qui sera capable de remettre de l’ordre dans un pays dont la survie dépend du soutien économique de Moscou. Le nouveau président, qui es­time que l’Abkhazie a besoin de l’injection de liquidités russes pendant encore 5 à 10 ans, a « confirmé le cap sur le partenariat stratégique avec la Russie » . La Russie a été la pre­mière, dès 2008, à reconnaître la souveraineté de l’Abkhazie à l’issue d’une ­guerre éclair avec la Géorgie. Pour sa part, l’Union éuropéenne maintient son soutien à l’intégrité territoriale de la Géorgie. Seuls trois autres pays, dont deux îles minuscules du Pa­cifique, ont depuis emboîté le pas à Moscou.


À défaut de reconnaissance diplomatique, l’Abkhazie a obtenu celle de la Fédération internationale de... domino ! Le mois prochain, sa capitale Soukhoumi accueillera les championnats du monde de cette discipline où sont représentés tous les pays ­membres des Nations Unies !

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