Une scène du film « Enfant 44 ». Source : kinopoisk.ru
L’information publiée sur le site du ministère de la Culture indique que Central Partnership (qui fait partie du groupe Gazprom-Médias) a retiré sa demande de visa d’exploitation, et est prête à « assumer toutes les conséquences commerciales de cette décision ».
Convergence des points de vue
Le film a été visionné le 14 avril par des représentants de la presse, du ministère de la Culture et de Central Partnership. « Les points de vue du distributeur et des représentants du ministère ont coïncidé : la sortie de ce genre de film est inadmissible à la veille du 70e anniversaire de la Victoire dans la Seconde Guerre mondiale », souligne l’information.
« Nous avons apporté des changements au niveau du scénario, de la production et du doublage », a annoncé Central Partnership en citant son directeur général, Pavel Stepanov. Toutefois, le résultat de ce travail n’a pas satisfait la société, a expliqué Pavel Stepanov. « Nous estimons nécessaire à l’avenir de renforcer le contrôle de la part de l’Etat sur la diffusion de films ayant une forte charge sociale », a-t-il fait remarquer dans sa déclaration.
Evaluation du préjudice
Selon un responsable d’une société de production, les dépenses de marketing d’un tel film peuvent se situer entre 100 000 et 500 000 dollars US. La télévision n’a pour l’instant diffusé aucune publicité pour le film. L’erreur a été commise lors de la signature de l’accord en bloc, estime l’interlocuteur de RBC : selon lui, la partie russe devait lire le scénario et comprendre que le film pourrait éventuellement être considéré comme antisoviétique et antirusse, pour le retirer de l’ensemble. Désormais, Central Partnership devra sans doute s’entendre avec le producteur pour que le manque à gagner de la partie américaine soit compensé par la projection du film suivant des studios, estime-t-il.
Le film Enfant 44 de la société américaine LionsGate devait sortir en salle en Russie le 16 avril, la sortie internationale étant fixée au 17 avril. Il devait être diffusé en Russie dans plus de 500 salles, a annoncé à RBC un représentant de Central Partnership.
Enfant 44 (titre original Child 44) a été tourné par le réalisateur Daniel Espinosa qui a réuni à l’écran Tom Hardy, Gary Oldman et Vincent Cassel. Le budget du film atteint 50 millions de dollars.
Mauvais signe
C’est la première fois dans l’histoire du marché russe du cinéma qu’un distributeur rappelle lui-même sa demande de visa d’exploitation, a déclaré Alexandre Rodnianski, producteur et copropriétaire de la société de distribution A Company (qui s’occupe de la projection de films étrangers en Russie).
« C’est un grand manque de professionnalisme : acheter les droits de diffusion, attendre le jour de la sortie en salle, rappeler la demande et, par suite, enregistrer d’importantes pertes », a-t-il dit.
C’est un mauvais signe pour l’ensemble du marché russe du cinéma, estime l’expert : « Jusqu’ici, nous projetions des films avec des personnages soviétiques ou russes loin d’être toujours positifs, mais jamais nous ne nous sommes heurtés à une telle situation, a poursuivi Alexandre Rodnianski. Aujourd’hui, tout ce qui a trait à l’histoire doit apparemment s’inscrire dans un système de coordonnées, ce qui risque d’évoluer en autocensure : nombre de sociétés auront peur d’acheter et de projeter ici des films (historiques). »
Bande-annonce du film Enfant 44. Source : Youtube/SND
Enfant 44 est l’adaptation du roman éponyme de l’écrivain britannique Tom Rob Smith. Le héros du film, Lev Demidov (joué par Tom Hardy), expert du ministère soviétique de la Sécurité d’Etat, enquête sur une série de crimes d’enfants en province. En avançant dans son enquête, il se heurte aux problèmes du système totalitaire : les structures de la sécurité d’Etat refusent de reconnaître l’existence d’un tueur en série, exigent que l’enquêteur renie sa femme et finalement le suspendent de ses fonctions. L’action du film se passe en 1953.
Le livre se base sur la biographie du tueur en série soviétique Andreï Tchikatilo. Cependant, l’auteur indique que « l’un des principaux héros du roman est la Russie soviétique, un monstrueux mélange d’horreur et d’absurdité ».
Texte original en russe publié sur le site de RBC Daily
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