Source : clementbriend.com
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Invité à Moscou par l'Institut de design et d'architecture Strelka et par le Musée polytechnique de Moscou, et dans le cadre du festival Polytech qui s'est déroulé au VDNKh du 23 au 25 mai, l'artiste de 31 ans raconte à RBTH sa conception de l'art de la projection, ses travaux passés et son expérience russe.
Clément Briend est diplômé de l'Université Louis Lumière en photographie et enseigne également cette discipline à l'Université de Valencienne. Contre toute attente, il se dirige vers ce domaine après des études de physique peu fructueuses, mais qui le conduisent inévitablement à établir des parallèles entre l'art et les sciences. « Nos yeux sont deux mini projecteurs, dans le sens où ils transforment ce qu'il perçoivent en images : la rétine, c'est l'écran et le cristallin, la lentille. Ce n'est pas une métaphore mais un fait réel », explique-t-il.
Grâce à ce mélange de notions artistiques et scientifiques, il crée un concept d'assemblage qui lui est propre : transformer un simple appareil photo en projecteur. L'invention possède de multiples avantages, notamment de moindres coûts et une adaptation avec le matériel photographique permettant une meilleure prise de vue et différents angles. Une version améliorée de l'appareil donc, qui le fait passer du statut de photographe à celui de projectionniste.
« Les êtres humains sont des projecteurs, nous avons donc tous un énorme potentiel artistique et créatif, c'est cette idée que j'aimerais propager », déclare le photographe. Effectivement, il déplore le fait que selon l'analyse scientifique de la façon dont on voit les choses, chacun de nous crée énormément via le processus de représentation de l'image, mais rares sont ceux qui en fabriquent quelque chose.
Clément Briend Crédit : Emilie Pouzat |
En six ans de pratique concrète, Clément a eu l'occasion d'exercer à l'étranger, notamment à Berlin, ville marquée par de nombreuses rencontres, « J'ai passé quelques mois là-bas, hébergé par des amis, des amis d'amis, des connaissances... des gens très différents les uns des autres mais très ouverts, qui m'ont livré leur vision personnelle de Berlin. C'est une ville très attrayante, et parfaite en terme de développement artistique ». Le photographe met alors en place la série « In-Berlin », où sont projetées en intérieur des images de la ville en perpétuel changement. Le but est d'utiliser la projection d'une manière innovante ; en tant qu'élément d'une photographie. C'est plus tard, au Cambodge, qu'il élabore un premier projet Street-art, donnant aux arbres des visages de créatures divines. En France, des projets ont aussi été réalisés, par exemple à l'occasion du dixième anniversaire du festival annuel « Rock en scène ». L'idée était de mêler le festival rock avec divers bâtiments appartenant au patrimoine national. Ainsi, on peut voir les foules de spectateurs en délire projetées sur des monuments nationaux français, réunissant la population et leur patrimoine culturel.
En raison du côté attrayant et spectaculaire de la projection, les exigences requises sont souvent oubliées. « Il ne s'agit pas uniquement d'envahir un espace, la seule chose qu'on ajoute, c'est l'image, mais il faut avant tout s'adapter au lieu, composer avec ce qui existe déjà. Le Street-art paraît libre et facile mais il y a beaucoup de contraintes à prendre en compte ». De même, le jeune Français insiste beaucoup sur l'importance d'un message à véhiculer et participe à des actions associatives depuis un an et demi, car selon lui, la projection n'a pas seulement un but artistique. Il se considère même comme un média, neutre mais libre de choisir ses engagements, en projetant pour défendre les droits de l'Homme, le droit au logement, à l'éducation ou encore l'association Jeudi noir (dénonçant les abus liés à la crise immobilière). L'essentiel est d'exprimer le potentiel de la projection intelligemment.
Face à un succès fleurissant, l'artiste répond à un nombre croissant de demandes provenant de l'étranger, dont la Russie, qu'il qualifie de sidérante : « Paradoxalement et en dépit d'énormes différences, les dimensions, les grandeurs, les voitures, le rapport à l'argent...me rappellent beaucoup les États-Unis. Je trouve les Russes très excentriques dans le comportement et le style, ils se soucient peu du regard de l'autre », confie-t-il. « Aussi, professionnellement, on sent que ça bouge ! J'ai pu remarquer que la moyenne d'âge des dirigeants d'importantes structures, du moins dans le secteur artistique et culturel, était vraiment inférieure aux normes françaises, ils sont dynamiques, n'ont pas peur de prendre des initiatives, de sortir des sentiers battus. C'est ce qui nous manque en France », souligne-t-il. Cependant, un projet exclusivement russe n'est pas prévu dans l'immédiat, à moins d'y effectuer une vraie préparation qui donnerait un sens, et serait donc légitime. Pour l'instant, le photographe-projectionniste ne se sent pas le droit d'imposer quoi que ce soit dans un pays à l'histoire si vaste, ou l'art n'est pas qu'une démonstration superficielle, mais délivre un vrai message.
Après avoir développé ses propres créations, Clément aimerait les enseigner et envisage la publication d'un livre pour partager la réflexion, qui s'ajoute à la projection. Le but est de montrer que ce n'est pas seulement un « jouet », mais qu'elle implique un but, un sens et un savoir-faire. Dans l'idéal, l'ouvrage serait accompagné d'un kit permettant de confectionner soi-même le fameux appareil photo-projecteur, et d'en étudier les possibilités.
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