Les fusées restent introuvables, mais nous échappons à une arrestation

Crédit photo : Artem Zagorodnov

Crédit photo : Artem Zagorodnov

J’ai changé de voiture et maintenant, je voyage avec Inna, Peter et Vadim (membres aussi de l’équipe Lemax). Inna est responsable du département des ressources humaines de la compagnie (elle compte plus de 700 employés), Vadim dirige le département recherche et développement et Peter est responsable de tous les procédés d’énergie pour leur installation.

Nous avions décidé d’aller de l’avant toute la journée en sautant le petit-déjeuner, mais, hélas, en vain. Après avoir roulé cinq minutes, nous avons à nouveau rencontré une route fermée. Un policier armé nous a demandé de faire demi-tour. Pourtant, il subsistait encore une lueur d’espoir. Laissez-moi vous expliquer.

En rebroussant chemin, nous avons abandonné tout espoir de rejoindre la nouvelle capitale du Kazakhstan, Astana – une oasis moderne remplie de monuments dédiés au président constamment réélu –, mais notre système de navigation nous informait que le blizzard avait endommagé une des fusées à mi-parcours dans le pays.

Ainsi en nous dirigeant vers le nord à Omsk, en Russie, nous serons à la fois sur la bonne route pour notre prochaine étape du voyage et il nous restera un faible espoir d’accomplir notre mission après tout.

Il est grand temps de présenter nos plans secrets qui se sont révélés sans succès. Lors de notre dernier grand arrêt à Novgorod, le capitaine de Lemax a réussi à conclure une alliance secrète avec une autre équipe, Notre Alaska (nommée ainsi d’après une prochaine expédition dans le 49e état des États-Unis).

Les deux capitaines avaient décidé qu’il était presque impossible de gagner le cosmodrome de Baïkonour et revenir en Sibérie dans le temps imparti et que sans doute les fusées tant convoitées n’atterriraient pas sur le bord de l’autoroute. Les organisateurs avaient promis de lancer cinq fusées au total, au départ de Baïkonour et pas loin d’Astana.

Inna et Peter, membres aussi de l’équipe Lemax. Crédit photo : Artem Zagorodnov.

Pour recevoir de l’aide supplémentaire, Notre Alaska avait contacté quelqu’un du ministère des Situations d’urgence au Kazakhstan qui avait promis un soutien par hélicoptère (pour de l’argent).

Une fois que la capsule allait atterrir, nous leur enverrions les coordonnées et leur pilote aurait été la récupérer et l’aurait lâchée près d’un autre contact à Astana (si nous y arrivions à temps), qui nous donnerait la fusée. Nous devions récupérer au minimum deux fusées avec cette stratégie (et les deux équipes partageraient la note).

Mais pourquoi pas trois ou quatre fusées ? Cela nous ferait faire une entrée triomphale dans la ville de Ruyan, notre prochaine destination en Sibérie, et peut-être gagner toute la compétition.

Facile, n’est-ce pas ? Toutes nos pensées étaient fixées sur la victoire jusqu’à ce que les organisateurs ne dévoilent un nouveau communiqué de presse qui disait quelque chose comme : « Nous ne tolérerons pas que les équipes s’arrêtent quelque part à Omsk pour boire du thé pendant que des personnes extérieures à la compétition récupèrent les fusées. Cela sera sanctionné par une disqualification de l’équipe ».

Au début, nous étions fâchés. Les organisateurs avaient toujours dit que l’aide extérieure était autorisée parce que ce n’était pas spécifiquement interdit dans le règlement. Notre colère s’est transformée en résignation. Nous avons bientôt appris que l’équipe Cosmos (« l’espace » en russe) était arrivée à Baïkonour et avait récupéré la première fusée. Leur zèle et leur conduite acharnée dans la steppe ont été récompensés.

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Après toute cette pagaille, nous nous accrochions toujours à l’espoir de récupérer l’une des fusées sur le chemin du retour vers la Russie. Mais ce n’était pas près d’arriver. Une demi-heure plus tard, nous avons découvert que la route vers la Russie était fermée. Les Kazakhs avaient trouvé un magnifique moyen de lutter contre les tempêtes de neige, les accidents de voiture et les routes en mauvais état : fermer les autoroutes !

À ce moment-là, les conducteurs étaient en colère. Certains ont dit aux trois officiers qui gardaient le poste qu’ils voulaient simplement traverser. À leur tour, les policiers ont promis de les arrêter.

Un supérieur est arrivé et l’un des membres de mon équipe a expliqué notre situation désespérée. C’est une compétition internationale, disait-il. Nous avons des journalistes, que vont-ils bien pouvoir écrire ? Le supérieur a menacé de la sanctionner parce que j’étais en train de prendre des photos. « C’est un lieu public, je peux prendre des photos si je le veux », me suis-je justifié. « Pas dans la République du Kazakhstan », a-t-il répondu.

Alors que je m’imaginais en train d’écrire un blog du fond d’une cellule d’une prison au Kazakhstan, une voix retentit pour avertir que des policiers étaient bloqués dans la neige. Nous avons envoyé nos tout terrain à leur secours et, bientôt, nous étions en train de dégager leurs véhicules. Ces policiers n’avaient rien contre le fait d’être photographiés, l’un d’eux m’a même décoché un sourire.

Crédit photo : Artem Zagorodnov.

Lorsque nous sommes revenus sur la route, les policiers regardaient ailleurs lorsque nos tout terrain ont calmement passé leur poste de contrôle. À environ minuit, nous avions traversé la frontière russe et roulions vers Ruyan.

Après mûres réflexions, j’ai compris pourquoi les policiers avaient barré cette route. La météo ne s’était pas améliorée et la plupart du temps, nous roulions dans le blizzard.

Dans des circonstances normales, seul un fou serait sorti par ce temps. Le vent souffle constamment et les bords de routes sont jonchés de voitures et de camions (nous en avons dégagé trois aujourd’hui et certains accidents ont l’air grave). De plus, nos fenêtres et nos portières sont complètement gelées, je dois toujours ouvrir la porte avec mon épaule pour dégager la glace.

La visibilité est parfois tellement mauvaise que nous roulons littéralement dans un nuage tout blanc et les phares antibrouillard ne sont d’aucune utilité.

J’ai également appris que la première équipe avec laquelle je roulais, Trust, avait eu un accident. Il n’y a pas eu de blessé ce qui est plutôt miraculeux parce que l’une des voitures a été complètement détruite après avoir heurté un camion de plein fouet. Cela nous rappelle à tous les dangers permanents que nous affrontons au nom de l’esprit d’équipe. 

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