Vaincre le cancer grâce au virus de l’herpès

Antionkoran-M

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​La jeune biologiste russe Irina Alexeïenko met au point un médicament capable de soigner le cancer de la tête et du cou sur la base du virus de l’herpès. A en juger d’après les études précliniques, la substance accroît l’efficacité de la radiothérapie de 63%. La jeune scientifique y a un intérêt particulier, car sa mère est atteinte d’un cancer.

Irina Alexeïenko, qui met au point son nouveau remède de thérapie génique baptisé AntioncoRAN-M, est poussée dans ses études par son cas personnel : il y a deux ans, les médecins ont diagnostiqué un cancer de la tête et du cou à sa mère. Durant le traitement, Irina a réalisé que les médicaments anticancéreux étaient trop chers. Elle s’est alors mise à créer une nouvelle substance plus accessible aux malades.  

Son produit possède deux propriétés : il tue lui-même les cellules cancéreuses et il encourage le système immunitaire du malade à les détruire. Selon les tests sur les animaux, la radiothérapie devient de 18% à 71% plus efficace. 

Associer gène tueur à immunostimulant

Irina Alexeïenko travaille à l’Institut de génétique moléculaire de l’Académie des sciences de Russie. En collaboration avec ses collègues de l’Institut de chimie bioorganique et de la biologie du gène, elle a mis au point le nouveau médicament qui contient le virus herpès simplex (HSVtk) tuant les cellules cancéreuses, ainsi que le gène humain responsable de la synthétisation des cytokines GM-CSF, protéines stimulant la réponse immunitaire.

« L’association du gène tueur à l’immunostimulant permet de détruire les cellules cancéreuses et d’enclencher une réponse immunitaire spécifique : les cellules tumorales sont anéanties en plus grand nombre, tandis que la probabilité de métastases baisse », a raconté Irina Alexeïenko.

Selon elle, sa découverte ne possède pas de concurrent sur le marché. Il existe toutefois des médicaments qui contiennent un seul gène (HSVtk ou GM-CSF), présent dans AntioncoRAN-M. L’Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux (FDA) a autorisé au mois d’octobre la prescription d’Imlygic, pour le traitement de lésions cutanées liées au cancer, de la société BioVex. Ce médicament contient le virus herpès de type 1 génétiquement modifié T-VEC.

A l’heure actuelle, les chercheurs réalisent des études précliniques d’AntioncoRAN-M à l’Institut Herzen d’oncologie. D’après les premiers résultats, la survie moyenne augmente de 63% quand la radiothérapie est associée à la prise d’AntioncoRAN-M.

« Nous avons prouvé l’efficacité du produit sur les animaux en montrant notamment qu’AntioncoRAN-M est capable d’accroître l’action de la radiothérapie sur le cancer de la tête et du cou, a poursuivi Irina Alexeïenko. Nous prévoyons d’entamer prochainement des essais cliniques ».

Entrée onéreuse sur le marché 

Selon Ivan Glouchkov, adjoint au directeur général de la société pharmaceutique russe Stada SIC, l’organisation de tous les essais cliniques et l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché pourrait coûter à la Russie entre 3 et 5 millions d’euros.

« Des sociétés étrangères souhaitent nous acheter le produit et réaliser des tests en dehors de la Russie. Mais si AntioncoRAN-M se montre efficace lors des essais cliniques, il nous reviendra alors au même prix qu’un médicament étranger très cher, a expliqué Irina Alexeïenko. Pour l’instant, nous n’avons pas l’intention de vendre notre remède ».

En octobre dernier, le projet s’est retrouvé sur la liste des finalistes du festival de start-ups de l’accélérateur Generation S. Irina Alexeïenko indique qu’elle et ses collègues reçoivent d’ores et déjà des propositions de la part d’investisseurs potentiels.

« Nous analysons aujourd’hui les données scientifiques, les résultats des études et les possibilités de partenariat avec les concepteurs d’AntioncoRAN-M. Leurs idées peuvent servir à la mise au point de plusieurs, voire de nombreux médicaments innovants, a déclaré Youlia Baïbikova, directrice des innovations extérieures et des partenariats du géant pharmaceutique Sanofi. Le grand avantage de ce médicament est l’accessibilité des technologies de fabrication et la possibilité d’augmenter rapidement la production ».

Selon elle, il convient encore de résoudre certains problèmes, notamment de trouver la forme médicamenteuse la plus efficace et de préciser les doses. La conclusion sur les avantages et les inconvénients du produit ne pourra être faite qu’après avoir obtenu tous les résultats des essais cliniques. Mais le grand problème lié à l’emploi de substances innovantes est l’attitude prudente des médecins envers les nouveaux médicaments.

« Pour convaincre les médecins de l’efficacité du traitement du cancer par le nouveau médicament, il faudra investir en marketing des dizaines de millions d’euros », a fait remarquer Ivan Glouchkov.

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