Le grand bond en avant du judo russe

Khasan Khalmurzaev.

Khasan Khalmurzaev.

Reuters
Aux JO de Rio les judokas russes, tout comme les escrimeurs, ont fait partie des plus médaillés. Pendant les premiers jours de compétition, l'hymne national de la Russie a ainsi résonné plusieurs fois dans la Carioco Arena 2, d’abord avec la victoire de Beslan Murdanov chez les moins de 60 kg, puis suite ausuccès de Khasan Khalmurzaev en moins de 81 kg trois jours après.

Le long chemin jusqu'au podium

Après le triple succès des judokas russes à Londres en 2012 – Arsen Galstyan, Mansur Isaev et Tagir Khaybulaev – les victoires des athlètes russes dans la discipline n'étonnent plus. Pourtant, il n'y a encore pas si longtemps, les résultats de la Russie en judo n'étaient pas brillants : l'équipe avait remporté le bronze et deux médailles d'argent aux JO de Sydney en 2000, puis quatre médailles de bronze en 2004 à Athènes. En 2008 à Pékin, aucun judoka russe n'était monté sur le podium.

Après une telle débâcle, il a été décidé de doter l'équipe d'un nouvel entraîneur : le choix est tombé sur l'Italien Ezio Gamba, champion olympique en 1980. Sous sa direction, les judokas russes ont commencé à briller sur le tatami, remportant huit décorations olympiques, dont cinq médailles d'or en seulement quelques années de travail.

Enzio Gamba et Vladimir Poutine. Source : APEnzio Gamba et Vladimir Poutine. Source : AP

Mansur Isaev souligne que Gamba a réussi à libérer psychologiquement les athlètes. « Sur le plan technique, l'entraîneur principal n'intervient pas tellement. Il va seulement corriger, suggérer. Par contre, l'atmosphère a beaucoup changé, l'équipe est devenue beaucoup plus unie. Quand on s'entraîne, tout le monde s'entraide », témoigne le judoka pour RBTH.

Malgré cette atmosphère de camaraderie, la concurrence interne est toujours aussi intense. Médaillé d'or cette année à 30 ans, Beslan Mudranov avait déjà tenté sa chance lors de deux olympiades. En 2012, il n'avait pas été retenu pour aller à Londres après avoir perdu son combat pour une place dans l'équipe face à Arsen Galstyan.

Et jusqu'au dernier moment, Khasan Khalmurzaev, champion olympique 2016 à seulement 22 ans, n'était pas certain d'aller à Rio tant la concurrence était rude dans sa catégorie de poids en Russie.

Traditions sportives caucasiennes

Tous les champions olympiques russes de ces dernières années en judo sont originaires du Caucase, où les sports de combat sont très populaires. « Dans le Caucase, on a la lutte dans le sang. La vie est un combat et tu dois toujours remporter la compétition. On cultive cette idée depuis l'enfance », remarque Mansur Isaev.

Ce succès des sportifs caucasiens avait été prédit il y a six mois encore par le président russe Vladimir Poutine, alors qu'il avait assisté à un entraînement des judokas de l'équipe olympique russe. « Beaucoup m'ont dit aujourd'hui que les principaux concurrents de la Russie seraient les Japonais. Nous avons beaucoup de respect pour ces derniers. Ils ont inventé le judo », avait souligné le président.

Avant de continuer : « Quand j'ai demandé à l'un de nos sportifs d'où il venait, il m'a répondu qu'il était Kabarde [un peuple du Nord Caucase, ndlr]. Avec tout le respect que l'on doit aux Japonais, les Kabardes sont plus forts que les Japonais ».

Un large soutien

Vladimir Poutine n'est pas seulement un grand admirateur des sports de combat orientaux, mais possède lui-même le 8e dan en judo et le 9e dan en taekwondo. « Vladimir Vladimirovitch, bien sûr, aime ce sport et le pratique depuis l'enfance. C'est pourquoi il vient nous rencontrer pratiquement avant chaque compétition importante. Nous nous imprégnons de cette énergie et allons de l'avant », raconte Mansur Isaev.

 Beslan Mudranov et Vladimir Poutine. Crédit: Alexei Nikolsky / TASS Beslan Mudranov et Vladimir Poutine. Crédit: Alexei Nikolsky / TASS

Du reste, le décollage du judo russe ne s'explique pas tant par cette affection du président que par les investissements croissants dans la discipline. Les succès des Russes lors des JO de Londres en 2012 ont entraîné une importante augmentation des subventions étatiques. Entre 2013 et 2016, les dépenses annuelles pour les sportifs de tout niveau sont passées de 310 millions à 445 millions de roubles (de 4,3 à 6,1 millions d'euros).

A l'horizon 2020, selon le programme de développement du judo en Russie, les dépenses vont être portées à 508 millions de roubles (7 millions d'euros).

Aujourd'hui, 24 centres spécialisés s'occupent de la préparation des judokas, alors qu’on en dénombrait seulement trois en 2012. D'ici 2020 leur nombre va passer à 52.

Les investisseurs privés s'intéressent également à la discipline. Par exemple, le champion olympique Khasan Khalmursaev va donner sa prime de 4 millions de roubles (55 000 euros) afin de développer le judo parmi les enfants d'Ingouchie, sa région natale.

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