Fifagate : y aura-t-il une piste russe ?

Le président de la FIFA Joseph Blatter lors du 65e Congrès de la FIFA à Zurich, le 28 mai 2015. Crédit : Reuters

Le président de la FIFA Joseph Blatter lors du 65e Congrès de la FIFA à Zurich, le 28 mai 2015. Crédit : Reuters

Les arrestations pour corruption de responsables de la Fédération internationale de football (FIFA) ont provoqué une vague de rumeurs sur l’avenir du football mondial et sur le sort des Mondiaux 2018 en Russie et 2022 au Qatar. Les experts russes évoquent les retombées de ce scandale à retentissement.

La police suisse a arrêté le 27 mai dernier à Zürich, à la demande des autorités américaines, sept responsables de la FIFA, notamment deux vice-présidents de l’organisation, Jeffrey Webb et Eugenio Figueredo. La justice américaine les soupçonne d’extorsion de fonds, de fraude et de blanchiment d’argent durant vingt-quatre ans. Des représentants de médias sportifs et de sociétés de marketing sportif sont soupçonnés d’avoir versé des pots-de-vin aux dirigeants de la FIFA pour une somme totale de plus de cent millions de dollars US en échange de droits médiatiques et de marketing sur des compétitions organisées en Amérique latine. L’entente relative à ces actes aurait été conclue aux Etats-Unis, où ont également eu lieu les préparatifs, alors que les paiements auraient transité par des banques américaines. Fait intéressant : toutes ces arrestations ont été opérées à la veille de l’élection du président de la FIFA prévue pour le 29 mai. Joseph Blatter, 79 ans, qui brigue un cinquième mandat, ne figure pas sur la liste des personnes arrêtées. Il était jusqu’ici le grand favori de cette élection : le coefficient de sa victoire chez les principaux bookmakers atteignait 1,11, tandis que celui de son concurrent, le prince jordanien Alin bin al-Hussein, 39 ans, était de 6,00.

Eventuel départ des sponsors

Alicher Aminov, expert russe du football et candidat à la présidence de l’Union du football de Russie, estime que la situation actuelle met en péril les positions de Joseph Blatter. « Le régime de Blatter est stable grâce à sa générosité envers des dizaines de pays du « tiers monde ». Il redistribue une grande partie des ressources toujours croissantes versées par les sponsors au profit des fédérations nationales et ces dernières le soutiennent aux élections. La corruption est un phénomène qui n’est pas en mesure d’étonner le « tiers monde » et tant que Joseph Blatter pourra résister à la pression américaine, il pourra être certain que dans ses pensées l’Afrique est avec lui. A l’heure actuelle, la voix du Mali, par exemple, est égale à celle de l’Angleterre », a-t-il expliqué.

Mais un éventuel refus des sponsors de coopérer avec la FIFA pourrait avoir des conséquences, a poursuivi Alicher Aminov. « Si les grands sponsors commencent à se retirer, la donne changera radicalement. Sans transferts généreux, les sentiments des Africains envers Joseph Blatter risquent de tarir. Et sans leur soutien, il éprouvera de grandes difficultés avec les Américains et les Européens qui cherchent à compromettre le président de la FIFA. Cela étant, il réalise clairement qu’il lui reste très peu de temps pour prouver à tout le monde que tout restera comme par le passé. »

L’UEFA exerce elle aussi une pression sur Joseph Blatter : le président de l’Union des associations européennes de football, Michel Platini, a exigé un « redémarrage » des activités de la FIFA et a demandé à Joseph Blatter de démissionner.

A quoi doit s’attendre la Russie ?

Nombre de personnalités haut placées sont mécontentes du fait que la liste des personnes arrêtées ne comporte aucun représentant de Russie ni du Qatar, pays hôtes des Mondiaux 2018 et 2022. Une nouvelle enquête contre les deux pays a été demandée par le premier ministre britannique, David Cameron, le nouveau président de la fédération de football d’Ukraine, Andreï Pavelko, et l’ex-président de l’UEFA, Lennart Johansson.

Dans le même temps, Walter De Gregorio, directeur de la communication et des affaires publiques de la FIFA, a déclaré que pour le moment tout restait inchangé : le Mondial 2018 se déroulera en Russie et le Mondial 2022 se tiendra au Qatar. Le président russe Vladimir Poutine a lui aussi réagi au scandale en soulignant que les arrestations au sein de la FIFA étaient sans rapport avec la Russie et que les Etats-Unis cherchaient ainsi à empêcher une éventuelle réélection de Joseph Blatter. Le directeur des relations avec la presse au département d’Etat américain, Jeff Rathke, a indiqué en réponse que les accusations contre les fonctionnaires de la FIFA (parmi lesquels il y a des citoyens américains) s’inscrivaient exclusivement dans le cadre de la lutte contre la criminalité.

Selon Valéry Tchoukhry, ancien dirigeant du bureau de la FIFA à Moscou, la Russie n’a rien à redouter. « L’actuelle procédure engagée pour corruption est loin d’être la première à la FIFA. Des affaires pénales ont en outre été intentées contre plusieurs organisateurs des Jeux olympiques à Salt Lake City en 2002 et à Atlanta en 1996, également pour pots-de-vin. Toutefois, aucun dossier n’a été soumis à la justice. La FIFA traverse un nouveau scandale de corruption sans grands bouleversements. Personne ne s’est encore jamais vu retirer le droit d’organiser une grande compétition. Je pense qu’il en sera ainsi cette fois-ci également. La FIFA vivra un nettoyage de ses rangs, Joseph Blatter gardera son poste et la Russie et le Qatar se prépareront tranquillement aux championnats du monde », a affirmé Valéry Tchoukhry lors d’un entretien avec RBTH.

 

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