« Les ingénieurs informaticiens malvoyants sont très demandés aujourd’hui et le seront sans doute à l’avenir », affirme Pavel Ossipov, directeur pour le développement d’Elita Group, la première société russe à avoir conçu un smartphone, Elsmart, et un ordinateur portable, ElBraille, pour les personnes atteintes de cécité.
Adi Kouchner, ingénieur informaticien. Source : Archives personnelles
Les appareils pour malvoyants ont été mis au point par des malvoyants – une équipe d’informaticiens et de programmeurs qui s’est formée au cours des trois dernières années. Jusque-là, la société fondée par l’entrepreneur malvoyant Nousret Adiguezalov était un simple distributeur de matériel étranger.
« Parfois, nos clients qui avaient acheté un appareil de typhlotechnique, par exemple un ordinateur personnel, revenaient chez nous avec leur propre application pour jeux », a poursuivi Pavel Ossipov, en notant que sa société leur proposait tout de suite un emploi.
Ainsi, il a été possible de former une équipe de vingt membres – développeurs, programmeurs et spécialistes du design d’ordinateur – dont la plupart travaillent à domicile. Le salaire des informaticiens malvoyants est à peu près le même que pour leurs collègues sans handicap, aux alentours de 800 euros par mois. Elita Group a l’intention d’augmenter le nombre d’informaticiens malvoyants.
Les handicapés participent également à la renaissance des métiers artisanaux. Par exemple, dans le cadre du projet Un Filet à provisions pour redonner l’espoir, des personnes atteintes de cécité réalisent cet accessoire pour les courses. Les filets étaient très populaires en Union soviétique où les ménagères ne s’en séparaient jamais.
L’association régionale Perspektiva (Perspective) défend depuis 1997 les droits des handicapés en Russie et les aide à trouver un emploi en organisant des formations d’entraîneurs, des cours et des stages dans de grandes sociétés telles que Nestlé, KPMG ou Volvo.
« Nous sommes pionniers dans ce domaine [celui de la recherche d’un emploi pour les handicapés, ndlr] et nous nous en occupons depuis treize ans », indique Sofia Pak, coordinatrice des projets d’emploi de Perspektiva. Elle fait remarquer que les personnes à capacités limitées trouvent aujourd’hui un emploi plus facilement qu’auparavant. « Le monde international des affaires a adopté une attitude loyale envers l’insertion professionnelle de ces personnes », constate-t-elle.
L’année dernière, la section moscovite de Perspektiva a été contactée par 458 handicapés en recherche d’emploi. Mais seulement 154 ont trouvé du travail. « Entre 30% et 40% de cas d’embauche, c’est un résultat normal pour nous, poursuit Sofia Pak. Nous conseillons à certains de suivre des cours, par exemple, d’anglais, tandis que d’autres acceptent un travail temporaire ».
D’après la liste des offres d’emploi publiées sur le site de l’organisation, il est possible de devenir designer 3D et de travailler à domicile en touchant 1 000 euros ou être responsable des médias sociaux avec un salaire de quelque 500 euros en période d’essai. En outre, il existe des offres d’emploi de cuisinier, de représentant de la gestion de la relation client (GRC), de programmeur ou de gestionnaire.
A titre de comparaison, on peut rappeler que le salaire d’un sourdaveugle (personne à la fois malvoyante et malentendante, ndlr) est bien plus bas : environ 150 euros. Cette différence est due aux dépenses supplémentaires liées à l’organisation du lieu de travail et à une productivité moins élevée.
Les agences de placement s’occupent également de la recherche d’emplois pour les handicapés. Ainsi, sur 317 000 offres d’emploi publiées sur l’un des principaux moteurs russes de recherche d’emploi HeadHunter.ru, 18 000 sont proposés à des personnes présentant un handicap. Ce sont le plus souvent des emplois dans les TIC, le marketing, le secteur bancaire ou celui des ventes.
Toujours d’après Sofia Pak, l’erreur la plus répandue parmi les demandeurs d’emploi est une mauvaise présentation. « Il importe de parler non pas de la maladie ou des difficultés, mais de se concentrer sur les moyens de remédier à la situation », souligne-t-elle. Ainsi, de nombreux malvoyants sont capables de travailler avec Microsoft Office et l’employeur peut même faire des économies : ils n’ont pas besoin d’écran ni d’ordinateur de bureau, car ils disposent de leur matériel spécial.
Avant de chercher un emploi pour un handicapé, il faut savoir s’il est assez motivé, raconte Ioulia Plenkova, directrice du programme Intégration sociale de Ré-union, fondation de soutien aux personnes atteintes de surdicécité. « Moins de 10% des sourdaveugles en âge de travailler que nous avons questionnés souhaitent avoir un emploi », précise-t-elle.
Ces personnes ne voient souvent pas de raison de travailler et préfèrent vivre avec leur pension ou l’aide de la famille, explique-t-elle. En outre, elles sont rares à croire qu’il est possible de trouver un travail à hauteur de leurs capacités.
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