La Scientologie bannie de Moscou

L’église de Scientologie de Moscou.

L’église de Scientologie de Moscou.

Lori/Legion Media
Fin novembre, le tribunal municipal de Moscou a donné raison au ministère de la Justice qui réclamait la fermeture de l’église de Scientologie de Moscou. Les représentants de l’organisation ont déjà annoncé qu’ils contestaient la décision et avaient l’intention de faire appel. Notre correspondant s’est rendu à l’église de Scientologie de Moscou et a discuté avec un spécialiste de l’étude des sectes.

L’église de Scientologie de Moscou occupe un petit bâtiment près du centre-ville et, malgré sa récente interdiction par la justice, fonctionne normalement : les panneaux à l’entrée invitent à passer un test gratuit et garantissent une réponse à toutes vos questions. Les réponses se sont avérées être assez particulières.

Les intérieurs du QG des scientologues moscovites rappelle plus le hall d’un centre d’affaires qu’un lieu de culte : il y a des télévisions partout et un guichet de réception juste à l’entrée. La femme derrière le guichet affiche un sourire de professionnelle, indique qu’elle s’appelle Aliona et vous propose son assistance. Je lui demande de me parler de la Scientologie et la vie de ses disciples. Aliona me prie de ne rien enregistrer sur mon dictaphone et de ne pas discuter avec elle directement, mais de m’asseoir sur le canapé et de regarder une vidéo sur le fondateur de la doctrine Ron Hubbard.

Hubbard et l’argent

Ron Hubbard est un écrivain de science-fiction qui a d’abord élaboré la Dianétique – une théorie sur la guérison du corps par l’esprit, puis fondé une organisation religieuse basée sur cette théorie. Les critiques des scientologues ont un avis très négatif sur la Dianétique, qu’ils qualifient de fausse science dangereuse pour la santé, comme sur la Scientologie. Par exemple, Alexandre Dvorkine, théologien et spécialiste de l’étude des sectes, estime que « la scientologie est l’une des organisations totalitaires les plus dangereuses et destructrices, un service spécial international qui recueille les informations sur chaque personne qui tombe dans sa sphère d’influence ».

À l’église, on n’entendra rien de tel. Sur l’écran, Ron Hubbard est loué sur fond d’une musique agréable. Il y est partout – sur les photos, les tableaux et les couvertures de livres. Tous les livres sont disposés sur des étagères munies d’inscription « Achetez aujourd’hui ! ». Ils sont en vente. Dans un entretien avec RBTH, Alexandre Dvorkine assure que les disciples de Hubbard monétisent volontiers leur religion : « La Scientologie est également une pompe à sous. Pour atteindre les plus hauts échelons dans cette secte, il faut au minimum 800 000 dollars et 15 ans de vie. Selon mes observations, on reste dans la Scientologie tant qu’on a pas épuisé tout son argent ou sa santé psychique ».

Le sens fuyant

Je tente de discuter avec Aliona, mais elle sourit de nouveau, me demande de passer sur un autre canapé et de regarder une autre vidéo : « Vous comprenez, toutes les réponses aux questions sont présentées dans les vidéos ». J’essaie alors d’interroger une autre collaboratrice du centre. Je demande à Sacha, une femme d’une trentaine d’années à la voix enthousiaste et fluette : « Pourquoi ne pouvez-vous pas m’en parler vous-même, avec vos propres mots ? ». « Et bien, nous n’avons pas fait ces vidéos pour rien ! », plaisante Sacha avant de me proposer un bonbon.

À l’église de Scientologie, on évite les sujets qui fâchent. À ma dernière question, « Quelle est votre réaction face à la critique de la Scientologie et aux accusations qui lui sont adressées ? », la collaboratrice de l’église répond de manière évasive : « Vous comprenez, le premier problème que rencontre l’homme est la mauvaise interprétation des mots. Globalement, beaucoup de « fausse information » est diffusée sur la Scientologie ». Puis, elle m’enjoint à regarder une autre vidéo et je quitte cette « église » clinquante.

Les problèmes de l’interdiction

Conformément à la décision du Tribunal municipal de Moscou, l’activité de l’organisation « Église de Scientologie de Moscou » ne relève pas de la loi sur la liberté de culte, ce qui a motivé son interdiction judiciaire. Le tribunal précise également que le terme de scientologie est enregistré en tant que marque, l’église de Scientologie de Moscou n’ayant pas le droit de prétendre au titre d’organisation religieuse. Les scientologues contestent la décision du tribunal et ont l’intention de faire appel auprès de la Cour suprême.

Alexandre Dvorkine estime que la lutte contre la scientologie est un processus difficile, mais nécessaire : « La difficulté de la bataille juridique avec cette secte réside dans le fait même que leur statut juridique est flou : il s’agit de nombreuses organisations avec différents statuts, dont les noms ne comprennent pas forcément le terme scientologie. Il est impossible de les liquider avec une seule décision de la justice ». 

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