Cinq faits sur le vote des femmes en Russie

Russie, 1918. Des femmes participant aux élections des membres de l'Assemblée constituante.

Russie, 1918. Des femmes participant aux élections des membres de l'Assemblée constituante.

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Il serait erroné de penser qu’elles n’ont pas lutté pour l’acquérir.

1. La plupart des Russes ne savent pas comment les femmes ont obtenu le droit de vote

Les manuels affirment que les femmes russes ont eu le droit de vote en 1917, ce qui laisse penser que la possibilité de se rendre aux urnes leur a été offerte par les bolcheviks conduits par Vladimir Lénine, qui ont renversé et tué le tsar, avant d’établir leur pourvoir pour 70 ans. Toutefois, l’histoire est un peu plus nuancée. Plusieurs mois avant la Révolution d’Octobre, en février 1917, une révolte populaire plaça au pouvoir le Gouvernement provisoire avec à sa tête le prince Gueorgui Lvov. C’est ce dernier qui accorda le droit de vote aux femmes russes. Pourtant il ne resta pas longtemps en place. A cette époque, les femmes de seulement six pays avaient le droit de se rendre aux urnes : la Nouvelle-Zélande, la Norvège, le Danemark, la Finlande, l’Australie et certains Etats d’Amérique.

2. Les Russes ont rassemblé 40 000 personnes à un meeting pour le droit de vote

En 1917, la Russie disposait d’une importante organisation de femmes, la Ligue nationale pour l’égalité des femmes, qui rassemblait des centaines d’unions du pays. Le 3 mars 1917, les journaux publièrent le programme du Gouvernement provisoire qui ne mentionnait pas le droit de vote pour les femmes. A Saint-Pétersbourg, alors capitale de la Russie, les membres de la Ligue se mirent à expliquer aux femmes de toutes les conditions l’importance du vote. La direction de la Ligue soumit ses revendications au prince Lvov, mais celui-ci refusa de les examiner.

Le 19 mars, 40 000 femmes formèrent des rangs pour traverser Saint-Pétersbourg. La procession était ouverte par des cavalières suivies de deux orchestres. La révolutionnaire Véra Figner, déjà d’un âge avancé, se trouvait à bord d’une voiture au milieu de la colonne. Les femmes arrivèrent au siège du parlement pour exiger une rencontre avec les députés. Les négociations se poursuivirent jusque tard dans la nuit. Finalement, Lvov reconnut le droit de vote des femmes.

3. Elles n’ont pas eu le temps avant les révolutions

De puissantes organisations de femmes sont apparues en Russie cinquante ans avant ces événements. Les femmes ont alors eu le droit de suivre des cours à l’Université. C’est après la première révolution russe que les représentantes de l’Union pour l’égalité des femmes formulèrent aux députés l’idée du droit de vote. Les élus engagèrent d’âpres débats à la première réunion de la Douma. Après des déclarations du genre « l’homme et la femme ne sont pas égaux », « les femmes doivent s’occuper du ménage » et « la Douma est encore trop jeune pour des innovations », c’est le professeur Lev Petrajitski qui prit la parole. « Il est souhaitable que la femme fasse de la politique, dit-il. Faire de la politique signifie servir les intérêts communs, s’occuper non de ses intérêts égoïstes, mais penser aux intérêts communs ». Les députés élaborèrent un projet de loi. Cependant, des bouleversements politiques secouèrent le pays, empêchant la Douma de cette législature d’achever son mandat.

4. Les hommes ne voulaient pas laisser voter les femmes

Les premières élections ouvertes à tous se sont tenues en été et au début de l’automne 1917 : c’était des élections municipales. Plusieurs incidents ont été enregistrés à la campagne. Dans un village, les hommes ont annulé les élections en raison de la participation des femmes et ont empêché celles-ci de se rendre aux urnes à la réélection. Dans certaines régions, les paysans n’ont pas laissé entrer les femmes dans les bureaux de vote. Ainsi, les femmes ont dû encore lutter plusieurs années pour leurs droits.

5. Les femmes défendaient elles-mêmes leurs nouveaux droits

La protection des droits du « sexe faible » était assurée par les sections de femmes, des sections de propagande féminines mises en place auprès des autorités. Le pouvoir avait accordé de nouveaux droits aux femmes : une journée de travail de huit heures, l’interdiction de travailler de nuit, le congé maternité et des allocations. En outre, le pays établit un salaire minimum indépendamment du sexe du travailleur. Les droits des deux époux furent reconnus égaux dans le mariage.

Or, les hommes estimèrent que ces sections de femmes avaient une influence néfaste sur la famille. Leurs représentantes furent victimes de centaines d’attaques et même de meurtres. Ces organisations furent dissoutes en 1930. Le leader soviétique Joseph Staline déclara que le pays avait résolu « la question de la femme ».

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