Combien de présidents la Fédération de Russie compte-t-elle ?

En dépit de sa division aussi multicouche, l’espace russe est très stable. Crédit : RIA Novosti

En dépit de sa division aussi multicouche, l’espace russe est très stable. Crédit : RIA Novosti

Le système de division administrative de la Fédération de Russie est bien complexe. Le pays compte des régions, des territoires, des républiques et des districts fédéraux. Théoriquement, en vertu de la Constitution, toutes ces entités sont égales, mais dans la pratique, elles se distinguent par toute une série de particularités. Cette forme très complexe d’organisation de l’Etat est héritée de l’Empire russe et de l’Union soviétique.

Le concept de gouvernorat est né en Russie au début du XVIIe siècle, sous Pierre Ier. Ensuite, leur nombre a augmenté régulièrement suite à l’intégration de nouveaux territoires. Au début du XXe siècle, le système est devenu plus complexe : émergent des « oblasts » (régions) et des territoires subordonnés.

Durant l’ère soviétique, la division en régions se faisait selon le principe ethnique. Des Républiques soviétiques socialistes autonomes, des régions autonomes et des districts nationaux (plus tard des « districts autonomes ») apparaissent sur la carte de la Russie. La plupart des premières républiques autonomes de l’URSS ont été fondées sur la base de gouvernorats dominés par une quelconque minorité ethnique. Ensuite, les régions autonomes y ont été converties. 

Après la dislocation de l’URSS, les anciennes autonomies, régions et territoires de la République socialiste fédérative soviétique de Russie ont été rebaptisés en sujets fédéraux de Russie. Quant aux anciennes Républiques soviétiques socialistes autonomes, elles ont reçu leurs propres noms, tel le Tatarstan. La forme de la division administrative et territoriale de la Russie moderne est règlementée par la Constitution. En outre, la division actuelle résulte de l’élargissement de certains sujets durant la seconde moitié des années 2000 (six sur dix districts autonomes ont été supprimés). Suite à toutes ces modifications, la Fédération de Russie compte aujourd’hui 21 républiques, 9 territoires, 46 régions (oblasts), deux villes d’importance fédérale (Moscou et Saint-Pétersbourg), quatre districts autonomes et une région autonome. 

La région (oblast en russe) est l’unité administrative la plus fréquente en Russie. Non fondée sur un principe culturel ou ethnique, elle s’organise autour d’une grande ville. Elle est dirigée par le gouvernement local et le gouverneur. On y trouve également le parlement qui adopte des lois d’importance régionale – il s’agit principalement de l’adaptation de la législation fédérale aux réalités de telle ou telle région. La loi suprême fondamentale y est la charte. On ne trouve actuellement en Russie qu’une seule région autonome, le Birobidjan. L’organisation de cette région autonome juive ne diffère guère de celle des autres « oblasts » du pays, elle a juste gardé son appellation historique. 

Du point de vue de la gestion, les territoires ne se distinguent pas des régions. Toutefois, ils dépassent ces dernières en termes de superficie. Certains territoires sont formés de plusieurs régions. 

Le district autonome est une entité territoriale faisant partie d’un autre sujet fédéral de Russie – d’une région ou d’un territoire – mais bénéficiant de droits étendus. Les districts autonomes sont des foyers de concentration de minorités ethniques.

Contrairement aux régions et aux territoires, les républiques sont des entités étatico-nationales, soit une forme d’étatisme d’un tel ou tel peuple de la Fédération de Russie. Prenons à titre d’exemple le Tatarstan peuplé par la plupart des Tatars de Russie. Ce territoire est géré par un président et la constitution y est la loi fondamentale. La république a le droit d’introduire une langue officielle au même titre que le russe. 

 « Les régions sont très diverses, ce qui est difficile pour la gestion. Il faut bénéficier d’une multitude de mécanismes,  mettre en place beaucoup de stratégies », explique Vladimir Kagansky de l’Institut de Géographie de l’Académie des sciences de Russie (RAN). « La Russie moderne est un empire, si l’on juge en termes d’espace. C’est un espace centralisé et polarisé par la relation « centre-périphérie» que ce soit de point de vue politique ou ethnique et d’autant plus économique ».  

La seule explication à ce mécanisme complexe est l’inertie historique, explique Pavel Koudioukine du Haut collège d'économie. « L’organisation actuelle a été prédéterminée par celle de l’Empire russe d’abord et de l’URSS ensuite », estime-t-il.

M.Koudioukine explique qu’en vertu de la Constitution du pays tous les sujets fédéraux sont égaux entre eux. Mais du point de vue de la législation, les républiques ont leurs constitutions, quant aux autres entités, elles ont des chartes. D’ailleurs, les constitutions régionales comprennent parfois des assertions curieuses. Ainsi, celle du Tatarstan dit que la république en question est un sujet de droit international, ce qui est, bien évidemment contraire à la législation fédérale », indique-t-il. Récemment a vu le jour la tendance de désigner les chefs de républiques russes par un autre titre que « président » et il paraît que l’on renonce bientôt à cette appellation. La République russe de Bachkirie a été la première à y renoncer.  

En 2000, a vu le jour une nouvelle forme de division qui reprend exactement à sa création le découpage du pays en districts militaires. Il s’agit des districts fédéraux, une des premières grandes décisions du président Vladimir Poutine. A ce jour, on en compte huit : du Centre (Moscou), du Sud, du Nord-Ouest, d’Extrême-Orient, de Sibérie, de l’Oural, de la Volga et du Nord-Caucase (créé en 2010 sous le président de l’époque Dmitri Medvedev). 

Ces districts ont été mis en place suite à la nécessité de coordonner les organes du pouvoir locaux. Durant les années 1990, les chefs des départements fédéraux dans les régions sont devenus très proches des élites locales et défendaient les intérêts régionaux et non pas ceux fédéraux.

Toutefois, en dépit de sa division aussi multicouche, l’espace russe est très stable. « Le pays fait penser aux matriochkas (poupées russes) emboîtées l’une dans l’autre, résume Natalia Zoubarevitch, directrice de Programme national de l’Institut indépendant de la politique sociale. Ce mécanisme est une garantie contre toute désintégration. Il y a bien évidemment des éléments fragiles, mais ils ne sont pas nombreux ».

 

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