Sabotage raté en Crimée : quel message veut faire passer l’Ukraine?

Un groupe d’agents ukrainiens a été démantelé en Crimée : où va la situation dans la péninsule ?

Un groupe d’agents ukrainiens a été démantelé en Crimée : où va la situation dans la péninsule ?

Le Service de sécurité de Russie (FSB) a annoncé avoir arrêté plusieurs saboteurs ukrainiens en Crimée. Kiev nie toute implication. Les experts russes ne croient pas à la sincérité des déclarations officielles de l’Ukraine qui cherche, selon eux, à déstabiliser la Crimée pour attirer l’attention de l’Occident sur la situation dans la péninsule.

Le Service fédéral de sécurité a annoncé le 10 novembre l'arrestation d'un groupe de saboteurs ukrainiens à Sébastopol envoyés, d’après le FSB, pour attaquer des sites militaires et des bâtiments administratifs.

Une source anonyme de l’agence Interfax a déclaré que les trois hommes étaient tous des cadres du renseignement militaire ukrainien, qu’ils avaient plaidé coupable et qu’ils faisaient actuellement leurs dépositions. Il a été établi à titre préliminaire que les militaires ukrainiens prévoyaient de « lancer des attaques contre des centrales électriques, des stations d’épuration d’eau et le réseau gazier de la Crimée », indique-t-on de même source. Le FSB fait remarquer que le groupe avait en sa possession des engins explosifs puissants, des armes et des munitions, des moyens de communication et des cartes des établissements à attaquer.

Le ministère ukrainien de la Défense ne commente pas l’information et se dit perplexe face aux informations du FSB : « Comment peut-il y avoir des groupes de renseignement ukrainiens en Crimée occupée ? ». Les autorités ukrainiennes ne reconnaissent pas le changement de statut de la Crimée et qualifient la presqu’île de territoire occupé par la Russie.

Subversions et effet de propagande

Les experts interrogés par RBTH estiment que les militaires ukrainiens louvoient et ne veulent pas assumer de responsabilité pour l’échec de cette opération dont l’objectif était de faire passer un message de propagande.
Selon Sergueï Gontcharov, président de l’Association internationale des anciens combattants de la section antiterroriste Alpha, ces subversions visaient à prouver l’existence d’une lutte de la population locale contre la Russie.

« L’objectif est de déstabiliser la Crimée et de faire croire à l’échelle internationale que les habitants de la péninsule ne veulent pas vivre en Russie. Et qu’il existe une organisation clandestine ayant entamé une lutte armée », renchérit Mikhaïl Alexandrov, du Centre des études politiques et militaires de l’Institut des relations internationales de Moscou.

Les experts soulignent que de telles opérations deviennent cruciales aujourd’hui, à la lumière de l’arrivée prochaine de Donald Trump à la Maison Blanche. En juillet dernier, Donald Trump a affirmé que les Criméens avaient préféré la Russie à l’Ukraine. Dans ce contexte, l’Ukraine a besoin d’arguments témoignant que la population de la Crimée ne veut pas vivre en Russie, notamment pour influer sur la position du futur leader américain, a expliqué Mikhaïl Alexandrov.

Forts idéologiquement, mais peu professionnels

Les analystes rappellent que ce n’est pas la première arrestation des saboteurs ukrainiens. Le 10 août, le FSB a annoncé qu’un réseau d’informateurs ukrainiens avait été démantelé en Crimée. Un commando a été repéré dans la nuit du 7 août à la frontière avec l’Ukraine : son arrestation a fait un mort parmi les hommes des services secrets russes. Une autre tentative d’incursion a été effectuée le lendemain, faisant un mort parmi les militaires russes. Deux saboteurs ont été arrêtés. Ils ont avoué travailler pour le renseignement militaire ukrainien.

Vitaly Tsymbal, spécialiste de la sécurité nationale de l’Académie présidentielle russe de l’économie nationale et de l’administration publique, estime que les services secrets ukrainiens ont échoué les deux opérations en raison d’une mauvaise coordination. Les experts lient également le manque d’efficacité du renseignement ukrainien à l’implication dans de telles opérations de participants aux hostilités dans l’est du pays, formés idéologiquement, mais peu professionnels. Ainsi, l’un des hommes arrêtés en août, Evgueni Panov, était membre d’un bataillon de volontaires qui a pris part au conflit dans le Donbass.

Toutefois, il ne faut pas non plus exclure qu'il s'agisse d'une initiative individuelle, sans lien avec les services spéciaux ukrainiens, souligne le politologue ukrainien et chef de la fondation Politique ukrainienne Konstantin Bondarenko, ajoutant qu'il existe toujours un nombre considérable de « têtes chaudes » qui considèrent que leur État a cédé la Crimée et le Donbass.

« D'ailleurs, le  manque de professionnalisme de l'opération semble en témoigner. Ils ont décidé de régler par eux-mêmes ces questions. Ceci explique aussi la réaction de l'État ukrainien, car personne ne les y a envoyés officiellement », poursuit l'expert.

Et d'ajouter que lors de l'arrestation, une carte de visite de l'ex-leader de Secteur droit (groupe d'extrême-droite nationaliste interdit en Russie, ndlr) Dmitri Iaroch avait été retrouvée sur les saboteurs. Or, cette organisation est en conflit avec les forces de l'ordre ukrainiennes.

Les analystes estiment que pour le moment, la Russie ne réalisera pas de démarches brusques en réagissant à ces opérations ukrainiennes. « Moscou marquera une pause et attendra que se précise la position de la nouvelle administration américaine (sur la crise russo-ukrainienne) », a affirmé Mikhaïl Alexandrov.

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