L’OTAN se rapproche des frontières russes mais dit vouloir dialoguer avec Moscou

Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg parle lors d'une conférence  dans le cadre du sommet de l’OTAN à Varsovie le 9 juillet 2016.

Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg parle lors d'une conférence dans le cadre du sommet de l’OTAN à Varsovie le 9 juillet 2016.

Reuters
Les experts militaires russes constatent que l’OTAN « veut la paix, mais prépare la guerre » et affirment que Moscou ne prendra pas de mesures de rétorsion.

L’Alliance atlantique prévoit de déployer quatre divisions supplémentaires en Pologne et dans les pays baltes : cette décision a été annoncée lors du sommet de l’OTAN à Varsovie. L’accord prévoit le déploiement de 4 000 militaires, qui seront mis en rotation dès 2017.

Du point de vue formel, l’Alliance ne viole pas l’Acte fondateur Russie-OTAN signé en 1997. Selon l’entente des deux parties, l’Alliance s’engage à ne pas déployer « d’importants contingents militaires » à proximité du territoire de la Russie.

En outre, les membres de l’OTAN ont annoncé que l’élément européen de la défense antimissile américaine était sur le point de devenir opérationnel au degré initial. Ce qui signifie que les forces américaines de la base aéronavale de Rota en Espagne, les radars déployés en Turquie et les missiles intercepteurs basés en Roumanie sont désormais au diapason pour parer à d’éventuels dangers menaçant l’Alliance.

Les bâtiments des forces navales américaines continueront de pénétrer dans la mer Noire, ce qui – c’est évident – suscitera une réaction négative de Moscou. Les deux parties auront des contacts prochainement : une réunion du Conseil Russie-OTAN est prévue le 13 juillet. La direction de l’Alliance a d’ores et déjà annoncé son souhait d’adopter plusieurs « mesures de confiance » dont le fonctionnement de transpondeurs (système d’identification ami/ennemi) sur les avions militaires de l’OTAN et de la Russie, ainsi qu’un accord sur la prévention d’incidents en haute mer et dans l’espace aérien. Si les deux entités se mettent d’accord, la tension dans leurs relations diminuera substantiellement.

Mais pour l’heure, ces relations sont loin d’être au beau fixe. Selon le président américain Barack Obama, qui a fait une déclaration au Financial Times à la veille du sommet de l’OTAN, la menace que représenterait la Russie pour la sécurité territoriale de l’Europe est du même ordre que les activités des terroristes de Daech [organisation interdite en Russie, ndlr]. La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a répondu que « dans le domaine politique et militaire, l’OTAN existait de l’autre côté du miroir » et « concentrait ses efforts pour endiguer une “menace inexistante“ depuis l’Est ».

Les résultats du sommet vus par la Russie

Vladimir Evseïev, expert militaire et directeur adjoint de l’Institut des pays de la CEI, estime que depuis le début de la crise en Ukraine, l’Alliance a retrouvé, aux yeux des citoyens de ses pays membres, sa raison d’être qui avait disparu avec la désintégration de l’Union soviétique : faire face à Moscou.

« Sur l’aspect politique, l’inexistante “menace russe“ et les défis réels des terroristes de Daech aideront l’Alliance à renforcer son union à l’époque du Brexit et de la croissance d’autres forces centrifuges en Europe », a-t-il expliqué.

Selon lui, les résultats du sommet sont modérément négatifs pour Moscou : ils auraient pu être plus défavorables, mais aussi plus favorables. « C’est un certain compromis. Formellement, l’Alliance proclame sa disposition à coopérer, mais de fait, elle pratique une politique moins de dissuasion que d’intimidation de la Russie. Elle veut la paix, mais prépare la guerre », a-t-il indiqué.

Pour Viktor Mourakhovski, rédacteur en chef du magazine Arsenal de la patrie, la Russie ne prendra pas de mesures supplémentaires pour réagir aux décisions et aux déclarations politiques de l’OTAN.

« Le ministère russe de la Défense se base sur le potentiel militaire réel de nos partenaires au sein de l’OTAN et non sur les déclarations de dirigeants ou de politiques. Il applique le projet sur les forces armées approuvé par le président et échelonné jusqu’en 2025. Dans le cadre de ce document, le pays déploie de nouvelles unités dans son district militaire Ouest et procède à la modernisation de son armée en la dotant d’armements sophistiqués », a noté Viktor Mourakhovski.

Des mesures de rétorsion ont été prises en janvier dernier, lorsque le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a annoncé la mise en place de trois nouvelles divisions (une division en temps de paix comptant jusqu’à 13 000 hommes) sur le vecteur occidental pour parer aux décisions qui avaient été déjà prises par l’OTAN et qui n’ont été qu’entérinées juridiquement à Varsovie.

L’OTAN s’étendra-t-elle en Asie ?

En parallèle, les Etats-Unis et l’OTAN pourraient se tourner vers l’Asie, fait remarquer Vladimir Evseïev. « L’administration américaine réalise que pour maintenir son règne politique et militaire dans le monde, il est indispensable non seulement de renforcer son influence en Europe, mais de la développer en Asie pour contenir le danger émanant de la Chine », a-t-il souligné.

Il a rappelé que Washington avait entamé la construction de douze destroyers à missiles guidés pour renforcer ses forces navales dans la région Asie-Pacifique.

« Prétextant la dégradation des relations avec la Russie, les Etats-Unis se déplaceront vers la région Asie-Pacifique. Cette tendance ira croissant avec l’arrivée au pouvoir du nouveau président, que Trump ou Clinton occupe le Bureau ovale », a-t-il annoncé.

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