Kiev, Ukraine, le 29 juin 2014. Des combattants du bataillon Donbass, prenant part à l'opération punitive menée par Kiev, lors d'une manifestation sur la place de l'Indépendance.
Maxim Nikitin/TASSScénario N°1 : la tentation de la guerre éclair
Malgré les accords et les visites des observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur la ligne de démarcation, des échanges de tirs se poursuivent dans le Donbass faisant de nombreuses victimes. Depuis début septembre 2015, l’intensité des bombardements est certes retombée, mais n’a pas été réduite à néant. Récemment, un combat de trois heures a secoué la ville de Mariinka, dans la banlieue de Donetsk. Au moins trois personnes ont été blessées.
La guerre ne lâche pas la région. Pis, la reprise des hostilités massives est de nouveau à craindre dans le Donbass, estime Mikhaïl Remizov, président de l’Institut de stratégie nationale (indépendant). « La tentation de trancher le nœud gordien demeure forte, surtout à Kiev. L’équilibre militaire dans la zone du conflit s’est fortement déplacé à la faveur de l’armée ukrainienne qui pourrait très bien envisager le scénario de la guerre éclair », a déclaré l’analyste.
Ce scénario est possible si le pouvoir de Kiev est conscient qu’il serait improbable d’adopter les amendements à la constitution relatifs à la décentralisation de l’Ukraine et au statut spécial pour les régions rebelles du Donbass. En effet, le président Petro Porochenko, qui a signé les accords de Minsk – la feuille de route pour la paix dans le Donbass –, ne dispose pas de la majorité au parlement permettant d’adopter des modifications à la loi fondamentale. De nombreux députés estiment que les amendements proposés, jugés d’ailleurs insuffisants par les Républiques populaires autoproclamées de Donetsk et de Lougansk, représentent une trop grande concession vis-à-vis du Donbass. Si, dans cette situation d’impasse parlementaire, la pression sur le président ukrainien est accrue, Kiev cherchera une solution et pourrait recourir à la force, simulant une provocation dans le Donbass, par exemple. L’armée ukrainienne serait alors « contrainte d’y répondre », estime M. Remizov, et, devant l’escalade du conflit, le respect des accords de Minsk passerait au deuxième plan.
Toutefois, cette éventualité reste faible. L’un des deux autres scénarios, pacifiques, paraît plus réaliste.
Scénario N°2 : les dirigeants ukrainiens parviendront à un compromis
D’autant que l’expérience précédente du règlement militaire de la crise dans le Donbass n’inspire pas beaucoup d’espoir : les troupes ukrainiennes ont subi une série de défaites sensibles. Ainsi, le risque lié à l’utilisation de la force peut paraître trop important.
D’autres considérations pourraient contraindre les parlementaires ukrainiens à succomber à la pression et à voter les amendements à la constitution. Igor Bounine, politologue et président de la fondation indépendante Centre des technologies politiques, souligne que Kiev ne souhaite pas être accusé de l’échec des accords de Minsk. « Si les amendements à la constitution ne sont pas adaptés, les États-Unis et l’Europe seront conscients que la responsabilité de cet échec incombe à l’Ukraine », explique l’expert, convaincu que « dans cette situation et avec la pression commune [des pays occidentaux], les deux tiers [des votes des députés] nécessaires seront réunis à la Rada [parlement ukrainien, ndlr] ».
Cependant, la plupart des observateurs doutent que les amendements requis puissent être adoptés par la Rada. Un autre scénario leur paraît plus probable. Il s’agit de la conservation du statut quo actuel.
Scénario N°3 : aucune évolution
Incapable pour le moment de faire voter les amendements par le parlement et soucieux de ne pas porter la responsabilité de l’échec des accords de Minsk, le pouvoir ukrainien cherchera à modifier leur interprétation de manière à obliger Moscou à agir en premier, estime Vladimir Jarikhine, collaborateur de l’Institut des pays de la CEI. Il a, cependant, peu de chances d’y parvenir, souligne-t-il.
Pour le reste, l’imitation de la mise en œuvre des accords de Minsk se poursuivra. « Tout ce que fait le président Porochenko est une tentative de conserver le pouvoir grâce à des pseudo-réformes », estime Andreï Iermolaïev, directeur de l’Institut de recherches stratégiques Nouvelle Ukraine, basé à Kiev. L’imitation durera tant qu’une nouvelle formule politique de règlement du problème du Donbass, question centrale de la vie politique ukrainienne, n’est pas trouvée. Toutefois, sans un dialogue avec les insurgés, il est impossible de trouver une telle formule. Kiev s’y refuse et, depuis le début du conflit voici près de deux ans, ne qualifie ses adversaires dans le Donbass que de « bandits et terroristes ». Dans cette impasse politique, « le pouvoir cherche des moyens de se préserver pendant au moins deux ans encore », jusqu’à la prochaine élection présidentielle, résume M. Iermolaïev.
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