Les BRICS prêts à faire bloc

Les présidents des BRICS. Crédit : EPA

Les présidents des BRICS. Crédit : EPA

C’est tout un programme que la Russie, pays hôte du sommet des BRICS, a inscrit à l’ordre du jour, notamment la création de nouvelles institutions financières. Avec un défi : faire converger les intérêts des uns et des autres.

Apparue à ses débuts comme une simple union formelle entre pays émergents attractifs pour les investisseurs boursiers, le groupe des BRIC - devenu BRICS depuis l'adhésion de l'Afrique du Sud - s'est transformé en un club des pays unis non seulement par des caractéristiques économiques mais aussi par leur position commune sur certains grands dossiers mondiaux.

Leur sentiment « de sous-représentation dans les organisations internationales occidentales » est l'un des facteurs principaux qui consolident ce bloc de cinq États, estime Dmitri Souslov, de l'École des hautes études en sciences économiques. 

Vers un monde multipolaire

Le groupe s'est fixé comme objectif principal de favoriser une transition vers un monde multipolaire régi par le droit international. Or, les BRICS évoluent en premier lieu non pas vers la création d'outils alternatifs de gouvernance mondiale mais vers le renforcement de ceux déjà existants, explique Dmitri Souslov : « Puisque l'Occident ne veut pas partager ses positions dominantes et les utilise à des fins politiques, les BRICS sont en train de créer des institutions mondiales parallèles. Il ne s'agit pas, par exemple, de remplacer la Banque mondiale par la Banque de développement des BRICS, mais d'unir tous ces fondements de la gouvernance mondiale ».

Selon Sergueï Vesselovski, de l'Institut d'État des relations internationales de Moscou, les BRICS ne cherchent pas à mettre en place une organisation centralisée à part entière.

« Pour l’instant, aucun pays de ce groupe n’est prêt à assumer la lourde responsabilité de regrouper tout le monde autour de lui en prenant la direction économique et politique », explique-t-il.

Ce ne sera pas non plus un bloc orienté vers une intégration horizontale comme l’Union européenne. « Il est impossible pour les BRICS de s’intégrer, et ce pour de nombreuses raisons. Tout d’abord, les pays membres sont situés à une très grande distance les uns des autres ; ensuite, ils se caractérisent principalement par leur rapport très délicat à leur propre souveraineté et à leur liberté d’action », souligne le rédacteur en chef du magazine Russia in global affairs, Fedor Loukianov.

Selon M. Souslov, il est peu probable que les BRICS se dirigent vers une réelle institutionnalisation. Ils garderont plus probablement la forme d’un forum avec un système de présidence tournante.

Toutefois, pour améliorer leur efficacité dans le format actuel, ils doivent perfectionner leur coordination dans tous les domaines, estime l’académicien Gueorgui Tolaraïa. « Pour conjuguer leurs positions en politique extérieure, ils doivent commencer par signer une déclaration de principes sur lesquels les BRICS appuient leur action, à l’image de l’accord de Bali [pour les pays de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), ndlr]. Il faudrait aussi créer une commission intergouvernementale (...) pour coordonner leur collaboration économique », explique l’expert.

Pourquoi la Russie a besoin des BRICS 

Au vu du fort potentiel des BRICS, la Russie accorde une grande importance à sa participation au groupe. Par ailleurs, elle joue elle aussi un rôle crucial dans ce bloc.

« Même si la Russie n’est pas le pays le plus puissant du groupe, elle contribue à son unité : c’est le seul pays membre qui a des liens cordiaux avec tous les autres, déclare Dmitri Souslov. Ensuite, c’est le seul pays membre qui souhaite la mise en place d’un nouvel ordre mondial. La pensée stratégique russe place l’existence des BRICS dans un cadre idéologique ».

Les BRICS sont d’autant plus importants pour Moscou que l’on assiste à de nouveaux désaccords avec l’Occident. Ce groupe peut en effet être un outil permettant de réformer le système mondial dans son ensemble, sans se limiter à sa composante économique.

C’est justement pour cette raison que la Russie a lancé une discussion concernant les questions de sécurité avec les autres pays des BRICS, et ses partenaires, inquiets de l’instabilité croissante dans le monde, ont soutenu cette initiative.

Une volonté partagée

Donner aux BRICS un format géopolitique peut paraître judicieux pour la Russie, mais aussi pour d’autres membres. Ainsi, lors du Forum académique des BRICS qui s’est tenu fin mai à Moscou, H H S Viswanathan, chef de la délégation indienne, a déclaré qu’« aucun pays ne peut faire face aux défis mondiaux tout seul » et c’est pourquoi « le changement de l’ordre mondial est en marche ».

La représentante de l’Afrique du Sud, Shisana Olive, a de son côté ajouté que les experts des cinq pays avaient défini cinq sphères d’activité pour les BRICS au cours de consultations : l’économie, la sécurité, la justice sociale et la qualité de vie, l’administration publique et les innovations. Selon elle, « les BRICS sont un outil très important qui offrira des moyens alternatifs de gouvernance mondiale».

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