L'Union eurasienne est modelée sur l'UE et non l'URSS

Crédit photo : Alexeï Nikolski / RIA Novosti

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La création au début de l’année prochaine, de l’Union eurasienne est la priorité absolue de la politique extérieure du Kremlin. Le projet d’accord de l’Union sera publié en mars 2014 et sera signé à l’été prochain par les dirigeants de la Biélorussie, du Kazakhstan et de la Russie. L’accord sera ensuite ratifié par les parlements des trois pays. L’Union eurasienne doit fonctionner dès le 1er janvier 2015.

L’idée de la création de cette association appartient au président du Kazakhstan Noursoultan Nazarbaïev. En mars 1994 déjà, lors d’un discours à l’Université de Moscou, il a détaillé les principales caractéristiques du processus d’intégration au sein de l’ancien espace soviétique.

Il s’agit de la création d’une zone économique commune, de la suppression des barrières au mouvement des biens, des capitaux et des personnes, de l’harmonisation des législations et des politiques macroéconomiques. Il a fallu 20 ans avant que l’initiative de Nazarbaïev ne soit mise en œuvre.

La Russie est l'incontestable leader de l'union. À cet égard, les observateurs étrangers se demandent si Moscou n’a pas décidé de recréer un empire et de porter atteinte à la souveraineté de ses voisins. Ce n'est pas le cas.

Premièrement, le projet de l’Union eurasienne est une copie conforme de l’Union européenne version 1985, avant la création du marché commun. À l'été 2010, trois États avaient déjà créé l’Union douanière, une zone de libre échange. À ce jour, la Biélorussie, le Kazakhstan et la Russie ont créé des structures équivalentes au Conseil de l’Europe, au Conseil des ministres, à la Commission européenne et à la Cour européenne.

Actuellement, la création d’un équivalent au Parlement européen est en cours de discussion. L’équivalent de la Commission européenne (la Commission économique eurasienne) contrôle 170 fonctions de l’Union, et est également le premier organe supranational de l’Union douanière.

Deuxièmement, la Russie souhaite que le système politique et économique devienne multipolaire. Le Kremlin estime que 6 à 8 pôles de puissance globaux sont en cours de formation et détermineront l’avenir de la planète pour des décennies à venir. Parmi les candidats au statut de tels centres, la Russie inscrit les États-Unis, l’UE, la Chine, l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud, l’Arabie Saoudite et, bien sûr, la Russie.

Troisièmement, la Russie propose à ses voisins d’élaborer un processus d’intégration basé sur un ensemble de valeurs modérément conservatrices. L’idéologie messianique de l’internationale prolétarienne a été remplacée par des normes du droit international telles que l’inviolabilité de la souveraineté, la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays, la protection de sa personnalité juridique internationale, et la construction de relations équitables entre États. 

 Quatrièmement, certains États apparus au sein de l’ancien espace soviétique considèrent la Russie comme un leader régional naturel. Novices dans la politique internationale, ils sont enclins à faire confiance au pouvoir russe actuel en matière d’intégration, de sécurité et des moyens de résoudre des conflits. 

Le Kirghizstan, l’Arménie et le Tadjikistan ont déjà annoncé leur intention de rejoindre prochainement l’Union eurasienne en tant que membres à part entière.

Le principal problème de la naissante Union eurasienne, qui la distingue de l’UE, est la domination évidente de la Russie. L’UE a été créée et fonctionne toujours comme une union au sein de laquelle la puissance de l’Allemagne de l’Ouest est équilibrée par la France, le Royaume-Uni, l’Italie, l’Espagne – des États comparables en envergure. Au sein de l’UE, l’Allemagne était et reste « première parmi les pairs ».

La situation de l’Union eurasienne est différente. Lorsqu’on compare les trois pays, tout indicateur objectif (PIB, budget national, population, volume du commerce extérieur) met la Russie dans une position dominante et exige des concessions des dirigeants politiques russes au profit de leurs partenaires dans la prise des décisions.

Aussi, le PIB russe atteint aujourd’hui 86% du PIB combiné des trois pays de l’Union. Les dépenses russes en défense (113,3 milliards d’USD en 2012) s’élèvent à 96% du montant global des dépenses en défense des trois pays. Dans ces conditions, assurer l’égalité des membres du processus d’intégration est une tâche difficile à laquelle s’est attelée la diplomatie russe.

Il convient de souligner que les questions de la protection des frontières, de la politique migratoire, de la défense et de la sécurité, ainsi que les questions de la santé, de l’éducation, de la culture ne feront pas partie du processus d’intégration de l’Union, mais resteront la prérogative des États-membres.

L’intégration dans le cadre de l’Union est un processus strictement économique. La Biélorussie et le Kazakhstan n’ont pas l’intention d’y renoncer. Cette position est respectée par Moscou.

Il l'a dit

Andrei Slepnev, ministre du Commerce de la CEE :

C’est bien la CEE qui élabore la réglementation du commerce extérieur de l’Union douanière entre la Bielorussie, le Kazakhstan et la Russie.

 Parmi les questions dont est chargée la Commission aujourd’hui figurent les mesures tarifaires et non-tarifaires, l’administration douanière, les normes et réglementations techniques, ainsi que sanitaires, vétérinaires et phytosanitaires. Par conséquent, la CEE, ayant assumé plusieurs competences des autorités russes, est chargée d’exécuter  certaines obligations que ce pays a contractées dans le cadre de son adhésion à l’OMC.

La Commission mène également des enquêtes et prend, le cas échéant, des décisions sur les mesures antidumping ou les sauvegardes – dites les instruments de défense commerciale.

En outre, la CEE est responsable de la mise en place de régimes commerciaux avec les pays tiers et d’une politique commune dans le cadre des négociations commerciales.

Actuellement, les représentants de la CEE, conjointement avec les experts des pays-membres de l’Union douanière, mènent des discussions sur l’accord libre-échange avec le Viêtnam, participent aux négociations avec l’AELE (qui comprend la Suisse, l’Islande, la Norvege et le Liechtenstein) et la Nouvelle-Zélande; en 2014, un groupe d’étude commencera son travail sur le potentiel de  création d’une zone de libre-échange avec Israël.

Pour les questions commerciales qui relèvent de son champ de competences, la CEE en réglera toutes entre les pays de l’Union douanière et l’Union européenne competences –  a cet effet, elle mène les consultations nécessaires. Cela inclue la participation des experts de la Commission aux negociations sur le nouvel accord de base pour les matières déja en compétence supranationale (de l’UD). 

Bien sûr que nous comptons sur le développement de la collaboration entre les organes supranationaux des deux unions.

Lors du Sommet Russie-UE en 2013, l’Europe a pris conscience de la place et du rôle de l’Union douanière et de la CEE en matière de développement de la coopération commerciale et économique entre les deux blocs régionaux. Pour notre part, nous sommes prêts à poursuivre le dialogue entre les deux unions et à soutenir ce coopération afin de promouvoir le commerce dans la région qui s’étend de Lisbonne à Vladivostok.

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