Pourquoi les obligations russes attirent toujours les investisseurs étrangers

Le ministre russe des Finances Anton Silouanov.

Le ministre russe des Finances Anton Silouanov.

Stanislav Krasilnikov/TASS
Le ministère russe des Finances a émis des obligations pour un montant de 1,11 milliard d’euros, s’adressant sciemment aux acheteurs étrangers plutôt qu’aux compagnies russes.

Le ministère russe des Finances a émis des obligations sur le marché extérieur pour un montant de 1,11 milliard d’euros. Ainsi, le ministère a réalisé son plan annuel de vente de 2,68 milliards d’euros (montant maximum fixé par la loi) d’Eurobonds à l’étranger, informe le ministre russe des Finances Anton Silouanov, cité par l’agence Interfax.

Le ministre précise que les nouvelles obligations ont été principalement achetées par des investisseurs américains (53% des titres), la part des acheteurs européens s’élevant à 43% tandis que les investisseurs asiatiques se sont partagé les 4% restants.

Par ailleurs, les obligations n’ont aucun acheteur russe, alors que la demande représentait six fois le montant de l’offre, dépassant les 6,7 milliards d’euros. Cela permet au ministère des Finances de conclure que les obligations russes attirent toujours les investisseurs étrangers malgré les sanctions.

La première partie des titres russes a été émise en mai, il s’agissait d’obligations à dix ans pour 1,56 milliard d’euros à 4,75% annuels. C’est la première émission russe sur le marché international des capitaux depuis l’automne 2013.

Le montant total de l’émission s’élevait alors à 6,25 milliards d’euros et a été acheté par des investisseurs britanniques. Cette fois, le taux d’intérêt annuel des obligations s’élève à 3,9%. Cela signifie que la confiance des investisseurs vis-à-vis des obligations russes est en hausse.

Particularités importantes

Les sanctions ont contraint les autorités russes à apporter des nuances dans le prospectus financier, principale liste de règles accompagnant les émissions de tout emprunteur. 

Conformément à ce document, la Russie s’engage à ne pas utiliser les fonds levés pour aider les entreprises et les particuliers visés par les sanctions européennes et américaines. Par ailleurs, si les sanctions sont élargies, le ministère des Finances pourra rembourser les investisseurs dans des devises autre que le dollar : en livres sterling, en euros ou en francs suisses.

Tous les fonds levés seront utilisés pour servir la dette en devises du pays ou à renflouer les réserves de change, affirme le prospectus. En 2016, le ministère des Finances devra verser 2,28 milliards d’euros au service de la dette, informe le quotidien RBC.

Les experts estiment que le gouvernement russe a volontairement cherché à vendre les obligations aux étrangers. « Le gouvernement a tout intérêt à engager les fonds d’investisseurs extérieurs et à conserver les ressources des investisseurs russes.

Par ailleurs, l’achat de dette russe par les investisseurs extérieurs assure de fait un afflux de capitaux, ce qui n’est pas le cas concernant les fonds des résidents », nous explique Konstantin Bouchouïev, directeur du département d’analyse des marchés chez Otrkytie Broker. Il précise qu’alors que l’économie russe s’apprête à sortir de la récession, l’État pourrait avoir tout intérêt à souscrire de nouveaux emprunts.

Moment opportun

Les autorités russes ont choisi judicieusement le moment de l’émission, estiment les acteurs du marché. « Le ministère des Finances a profité d’un créneau pour cette émission : les prévisions de notation ont été relevées et on discute des effets néfastes des sanctions », précise Gueorgui Vachtchenko, responsable des opérations à la bourse russe chez Freedom Finance. L’agence S&P avait notamment confirmé la notation de la dette souveraine russe, relevant ses prévisions de négatives à stables. 

En outre, le vice-président américain Joe Biden avait annoncé que cinq pays membres de l’Union européennes étaient prêts à annuler les sanctions antirusses.

« La demande a représenté six fois le montant de l’émission, qui a été entièrement rachetée par des investisseurs étrangers. Cela prouve que malgré les exigences formulées par les autorités européennes et américaines, l’intérêt économique l’a emporté sur la composante politique », précise l’analyse de Finam Bogdan Zvaritch.

Il explique que les conditions actuelles sont particulièrement propices aux emprunts extérieurs. La rentabilité des obligations souveraines de certains pays européens étant actuellement négative, les Eurobonds russes constituent désormais un instrument attractif en rapport risque – rentabilité, estime Zvaritch.

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