Nouriel Roubini a commencé sa conférence par une blague : « On dit que lorsque Gorbatchev s’est rendu en visite aux Etats-Unis, on lui a demandé quel était l’état de l’économie russe et il a répondu par un seul mot : « Good ». Les dirigeants occidentaux l’ont invité à développer, ne serait-ce qu’en deux mots, à quoi il a répondu « Not good ».
Pour lui, l’économie mondiale est aujourd’hui dans un état similaire. « La bonne nouvelle pour l’économie mondiale est que la crise financière de 2008 a été suivie d’une récession, puis d’un retour de la croissance économique », a précisé l’économiste. L’économie chinoise a ralenti, mais l’effondrement n’a pas eu lieu, ce qui a permis d’éviter une deuxième récession globale.
« Le Brexit reste un choc régional et non global. Il ne peut pas être comparé à la faillite de Lehman Brothers qui a déclenché la crise mondiale de 2008 », assure l’économiste. Il estime que la réaction des marchés mondiaux aux résultats du vote britannique a été modérée. Le Brexit a certes déjà entraîné une hausse de la volatilité et une baisse du yen japonais, mais son influence sur les actifs des Etats-Unis et des pays en voie de développement reste relativement limitée. Pourtant, à l’avenir, les conséquences pourraient être considérablement plus graves : le Brexit pourrait déclencher un effet domino.
« Le désir de la Grande-Bretagne de quitter l’UE pourrait entraîner une désintégration des forces en Europe », estime Nouriel Roubini. Le Brexit est la crise qui pourrait compromettre le marché unique de l’Union et déclencher une explosion de l’accord de Schengen, estime l’économiste.
« Supposons que la Grande-Bretagne quitte l’Union. L’Ecosse et l’Irlande du Nord voudront alors faire sécession à leur tour. De la même manière, la Catalogne voudra se séparer de l’Espagne. La Suède et le Danemark pourraient dire que l’Europe sans la Grande-Bretagne, c’est la zone euro. Comme ils ne souhaitent pas faire partie de la zone euro, ils pourraient vouloir sortir à leur tour », estime-t-il.
Par ailleurs, les pays de l’Union européenne sont lassés par la politique de rigueur économique. Pour l’économiste américain, l’économie britannique sera la plus impactée par le Brexit, car elle sera confrontée à un ralentissement économique et à une baisse des investissements.
« Malgré les problèmes structurels qui existent en Russie, le système économique actuel est beaucoup moins vulnérable, plus stable, qu’il y a quelques années. Depuis deux ans, l’économie russe a souffert tant des sanctions occidentales et de la baisse des prix des hydrocarbures que du ralentissement économique en Chine », estime Nouriel Roubini qui pense toutefois que l’économie russe pourrait rapidement retrouver une croissance de 1% ou 2%.
« Contrairement à l’Arabie saoudite, qui a décidé que la chute des prix du pétrole était un phénomène temporaire et n’a rien voulu changer, la Russie a adopté la bonne réaction », se félicite Nouriel Roubini. Ainsi, confrontées aux prix bas du pétrole, les autorités russes ont modifié leur politique de crédit pour parier sur le ciblage de l’inflation, plutôt que sur la croissance économique. Aux yeux de l’expert, les risques principaux guettant la Russie sont la baisse des revenus réels de la population et l’instabilité sociale.
Pour les pays en voie de développement, les risques globaux restent toutefois réels. « Aujourd’hui, la mondialisation profite aux pays qui disposent de spécialistes hautement qualifiés capables de produire des biens techniquement sophistiqués. Les pays à la main d’œuvre peu qualifiée sont perdants dans la course de la mondialisation », explique Nouriel Roubini.
Le vieillissement de la population dans les pays développés entraîne une contraction des investissements et une baisse de la dynamique de consommation, ce qui conduit également au ralentissement de l’économie mondiale. La population vieillit aux Etats-Unis et au Japon, mais aussi en Chine et en Russie, estime encore l’économiste américain qui considère cependant que les risques globaux d’aujourd’hui ne pourront plonger le monde dans une nouvelle crise.
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