La Banque mondiale prédit une explosion de la dette publique russe

Une mendiante dans une rue de Saint-Pétersbourg. Le 14 novembre 2014.

Une mendiante dans une rue de Saint-Pétersbourg. Le 14 novembre 2014.

Reuters
D'ici 2050, la corrélation entre les faibles prix du pétrole et une population vieillissante pourrait conduire à une hausse de la dette publique russe, qui passerait de 12% actuellement à 250%, concluent les experts du bureau moscovite de la Banque mondiale dans leurs prévisions. Toutefois, les analystes russes indiquent que les deux risques sont difficilement prévisibles, alors que le gouvernement du pays s'oppose systématiquement à l'accroissement de la dette.

D'ici 2050, le vieillissement de la population et la baisse des recettes pétro-gazières pourraient conduire à une stagnation durable de l'économie et à une hausse de la dette publique qui pourrait atteindre 250% du PIB. Telle est la conclusion d’un rapport du bureau moscovite de la Banque mondiale, cité par le quotidien économique Kommersant. Selon les informations des analystes, l'économie russe est confrontée à ses plus grands défis de ces 15 dernières années. Le rapport souligne notamment la contraction de la consommation la plus rapide depuis 1998. Emilia Sibirevaïa, directrice adjointe de FinExpertiza-Capital, estime que la dette publique intérieure pourrait augmenter à cause de l'émission d'obligations locales permettant de compenser le déficit du budget national en période de faibles prix du pétrole, comme c'était le cas dans les années 1990. Le gouvernement s'oppose toutefois frontalement à ce scénario. En 1998, la Russie a connu la plus grave crise économique de son histoire contemporaine, le pays ayant fait défaut sur les obligations d'État à court terme.

Scénario probable

Selon la Banque mondiale, la dévaluation du rouble russe fin 2014 n'a pas permis à la plupart des secteurs commerciaux, dont l'agriculture et l'industrie de transformation, de profiter de l'avantage concurrentiel des prix sur les marchés national et international, malgré le programme gouvernemental de substitution des importations. Ainsi, les économistes estiment que lors de la précédente crise économique, en 2009, l'État a pu compenser la chute de la consommation privée par une hausse des dépenses publiques, ce que la crise actuelle ne permet pas. Par conséquent, le taux de pauvreté est retombé au niveau d'il y a 10 ans : 15,1% au premier semestre contre 10,8% en 2013. Dans le scénario de base, le ratio dette-PIB atteindra, selon la Banque mondiale, 116% d'ici 2050, alors que si le prix du pétrole baisse encore, et que la population continue à vieillir, ce ratio pourrait dépasser 250%.

« Les risques annoncés (prix pétroliers faibles et vieillissement de la population) sont difficilement prévisibles. Il est assez difficile de prédire ce qui se passera avec le pétrole. Selon certaines suggestions, nous pourrions renoncer complètement au pétrole au profit d’un autre carburant ou devenir moins dépendants des exportations de gaz et de pétrole », explique Konstantin Korichtchenko, directeur du département des marchés boursiers et de l’ingénierie financière de l'Académie présidentielle russe d'économie nationale et d'administration publique, anciennement vice-gouverneur de la Banque centrale.  Il est d’autant plus difficile de faire des prévisions précises sur le vieillissement de la population. « Si nous prenons en compte les processus migratoires, constatés dans notre pays, il faut se rappeler qu’en 2014, la Russie a accueilli plusieurs centaines de milliers de réfugiés ukrainiens et il s’agit, pour la plupart d’entre eux, de personnes capables de travailler », ajoute Korichtchenko.

La dette publique en question

Pour autant, si les prix du pétrole restent durablement faibles, les experts russes n’excluent pas une hausse de la dette publique. « Théoriquement, le mélange entre des prix pétroliers faibles sur le long terme et l'absence de réformes de la part de l'État en matière de hausse de l'âge de la retraite pourrait conduire à un court accroissement de la dette publique russe par rapport au PIB », indique Emilia Sibireva. Elle précise que l’évolution des événements selon ce scénario n’est absolument pas prédéterminée.

L’expert prédit toutefois que la Russie n’est pas susceptible de se transformer en un pays super-débiteur, car ce scénario reposerait non seulement sur les prix pétroliers bas et une productivité faible, mais également sur l’absence totale de réformes structurelles pour les décennies à venir. En outre, la dette publique russe affiche actuellement un niveau exceptionnellement faible – 12% du PIB, alors que celle des Etats-Unis, à titre de comparaison, atteint 101% du PIB.

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