L’Ukraine face au spectre d'une pénurie de charbon

Un ouvrier de la mine Kommounarskaïa 22, dans la région de Donetsk. Crédit : Mikhaïl Pothouev/TASS

Un ouvrier de la mine Kommounarskaïa 22, dans la région de Donetsk. Crédit : Mikhaïl Pothouev/TASS

Cet hiver, l’Ukraine pourrait être privée d’électricité suite à un déficit de charbon. En raison du conflit militaire, la production de charbon ukrainienne a chuté. Par ailleurs, Kiev ne peut garantir le paiement régulier des importations. L’Afrique du Sud a ainsi déjà refusé de coopérer avec l’Ukraine. Tous les espoirs sont désormais tournés vers un nouveau crédit européen et les livraisons en provenance de Russie.

Cet hiver, la Russie pourrait devenir le principal garant de chaleur et de lumière en Ukraine. Outre du gaz, l’Ukraine devra sans doute acheter du charbon et de l’électricité à son voisin. « L’Ukraine ne dispose pas de réserves de charbon en quantité suffisante pour passer l’hiver », a déclaré le ministre ukrainien de l’Énergie Youri Prodan le 12 novembre dernier.

Actuellement, l’Ukraine a besoin de 1,5 million de tonnes de charbon par mois pour couvrir ses besoins en électricité, soit 10 millions de tonnes d’ici le mois de mars, explique Youri Platitkine, directeur adjoint de l’Institut des recherches énergétiques de l’Académie russe des sciences.

Un déficit de charbon pourrait affecter principalement les fournitures de l’énergie. En effet, ces dernières années, l’Ukraine s’est efforcée d'utiliser le charbon partout où c’était possible.

Charbon ukrainien

La production de charbon en Ukraine a fortement diminué en raison du conflit armé. « 99 des 150 mines ukrainiennes se trouvent dans le Donbass. Seules 28 d’entre elles assurent une production de charbon actuellement. La quasi-totalité du charbon déjà produit est resté dans la République populaire de Donetsk : en 2013, 37,5 millions de tonnes de charbon ont été produites sur le territoire de la région de Donetsk, 26 millions de tonnes – dans la région de Lougansk. Les compagnies ukrainiennes mènent actuellement des négociations avec les « républiques populaires » de Donetsk et Lougansk. Une source au sein du ministère ukrainien de l’Énergie a confirmé cette information dans un entretien avec le quotidien russe et a souligné que les « mines de RPD et de RPL sont des personnes morales ukrainiennes, il n’y aura donc aucun problème avec les contrats, l’essentiel étant d’obtenir l’autorisation de sortie auprès des personnes qui contrôlent la république ».

 

Au cours des 5-7 dernières années, les importations de gaz (principalement russe) en Ukraine ont reculé d’environ 4% par an. Parallèlement, la consommation de charbon russe a augmenté de 1, 3%. Une redistribution s’est ainsi opérée dans la composante importée de la balance énergétique.

Où l’Ukraine pouvait-elle acheter du charbon ?

Le gouvernement ukrainien a cherché à importer du charbon de Pologne. Les négociations ont échoué, car le charbon de marques T et A, demandé par l’Ukraine, manquait en Pologne pour les besoins propres du pays.

L’accord signé en septembre avec la compagnie sud-africaine Steel Mont Trading Ltd sur la livraison de près d’un million de tonnes (à 70 euros la tonne) a été rompu en novembre par le fournisseur. L’une des raisons évoquées est le non-paiement d’une partie des livraisons par Kiev. Le montant de la dette n’est pas précisé. 

Le charbon sud-africain est l’un des plus chers. L’Ukraine devait l’acheter à 70 euros la tonne. La Russie le vend à 65 euros, et le Donbass le vendait à 43 euros.

Fournisseurs alternatifs

Les experts expliquent que l’achat de combustible noir en Nouvelle-Zélande et en Australie pour 60 euros était également envisagé. Toutefois, en raison du coût élevé de transport (32-40 euros la tonne), ces solutions ont finalement été abandonnées.

Les États-Unis ont également été exclus en raison d'un prix trop élevé – 105 euros la tonne. L’Ukraine gardait un certain espoir à l’égard du marché vietnamien, riche en anthracite. Mais ce pays asiatique ne dispose pas de ressources disponibles suffisantes.

D’après le ministre ukrainien de l’Énergie, la Russie reste à ce jour le seul fournisseur possible. « Nous n’avons pas d’autre choix que de solliciter les fournisseurs russes et d’acheter le charbon en Russie », a expliqué Youri Prodan.

Youri Platitkine, de l’Institut des recherches énergétiques de l’Académie russe des sciences, explique que « la Russie livre déjà du charbon. Il provient des mines de Rostov et du Kouzbass ».  (Le Kouzbass est l’un des plus grands gisements de charbon au monde situé en Sibérie occidentale, ndlr).

D’où viendra l’agent pour le charbon ?

D’après les estimations d’Alexandre Sergueïev, président de l’Union indépendante des mineurs de Russie (UIMR), l’Ukraine devra trouver au minimum 400 millions d’euros avant la fin de l’année pour régler les livraisons russes. Mikhaïl Volynets, président de l’Union indépendante des mineurs ukrainiens, estime qu’il faudra prévoir 810 millions d’euros au minimum.

Comme le règlement des livraisons de gaz a déjà été entaché de nombreuses difficultés, celles-ci pourraient se reproduire pour le charbon également. Ainsi, les experts russes estiment que si les exportateurs russes veulent s’assurer d’être payés par les clients ukrainiens, ils devraient recourir au système du prépaiement.

Une autre source de financement possible est un crédit de l’Union européenne. Pour le moment, les Européens ne donnent pas de raisons de douter de ces attentes. L’UE a approuvé un plan d’aide macro-financière à l’Ukraine dans le cadre de deux programmes pour un montant total de 1,61 milliard d’euros. Un autre programme d’un montant de 2 milliards d’euros devrait être approuvé prochainement.

« L’UE et l’Ukraine pourraient s’accorder sur une nouvelle tranche d’aide financière. Je ne vois pas d’obstacles dans le processus de négociations », estime Dmitri Baranov, expert en chef de Finam Management.  

 

Réagissez à cet article en soumettant votre commentaire ci-dessous ou sur notre page Facebook


Dans le cadre d'une utilisation des contenus de Russia Beyond, la mention des sources est obligatoire.

Ce site utilise des cookies. Cliquez ici pour en savoir plus.

Accepter les cookies