Au carrefour des grandes armées (+Diaporama)



On a l’impression que chaque nouveau maître des lieux cherchait à marquer ceux-ci de ses symboles militaires, lesquels ne provoquent plus de passion, mais se partagent pacifiquement la ville.

Quand on arrive à Baltiisk, la première impression est que la ville est peuplée de lutins. De petites maisons aux toits verts de mousse, noyées dans les feuilles mortes, sont plantées en plein milieu de la forêt. Puis apparaissent les affreuses barres d’immeubles standard soviétiques. Ici, dans la ville la plus occidentale de Russie (dans l’enclave de Kaliningrad), des univers totalement différents cohabitent harmonieusement.

Pillau (nom de Baltiisk jusqu’en 1946) a une longue histoire militaire. Le lieu était apprécié des Suédois et des Prussiens, des Français et des Russes. D’où l’impression que chaque nouveau maître des lieux cherchait à les marquer de ses symboles militaires, qui ne font plus débat aujourd’hui, mais se partagent pacifiquement la petite ville.

Pour mieux visiter celle-ci, il faut commencer la promenade à partir du centre. Une fois sur le front d’eau, le risque est de ne plus vouloir en partir...

Non loin de la gare, sur le mont Chkolny (Scolaire), s’élève une église inachevée, consacrée au guerrier Fedor Ouchakov. Les 
riverains la dénigrent car elle fut érigée sur un cimetière allemand, sous lequel, assurent les autochtones, on trouve des labyrinthes souterrains, une ancienne galerie et même des revenants !

Les connaisseurs de villes provinciales russes chercheront en vain à Baltiisk les repères architecturaux habituels. Impossible d’identifier d’un coup d’œil un l’hôpital ou une préfecture. Ici, ce qui ressemble à une école est une caserne, une cabane avec un air de check-point abrite en fait une école d’art, ce musée est en fait un hôpital. On ne sera donc pas surpris que l’un des plus majestueux bâtiments abrite le parquet et les limiers de la police.

On avance vers le boulevard de la Mer. Les affiches, dessinées à la main, de la Maison de la culture des matelots invitent les « militaires et les habitants de la ville » à la bibliothèque ou au moins au cinéma.

Crédits photo : Lori/Legion Media

 

 

Avant la guerre, un lycée allemand occupait les locaux. Récemment, quand les étrangers ont enfin eu l’autorisation d’entrer à Baltiisk (ville fermée pendant toute la période soviétique), un des anciens élèves, un Allemand, est venu voir son alma-mater. La gardienne, une mère Nina débonnaire, a décidé d’enfreindre toutes les règles et de lui montrer ce qu’était devenue son école. L’étranger ne parlait pas russe. Mais, stupéfait, il jurait et se prenait la tête dans les mains en voyant les bas-reliefs de Lénine, les étendards rouges et la peinture craquelée. « Ce n’est pas de notre faute » , la mère Nina ne trouvant pas d’autres mots pour se justifier.

Le loisir principal des habitants locaux, c’est la pêche. Munis de cannes à pêche, des dizaines de gens se baladent dans la ville, roulent en voiture et à vélo, se déplacent en bateau pneumatique. Sur la jetée, des hommes en vestes ouatinées et hautes bottes se balancent en équilibre sur les brise-lames. Ils chassent le hareng baltique. Leurs femmes, qui sont là, sur la jetée, se plaignent : dans le temps, cent personnes se rangeaient en ligne et pêchaient tranquillement. Aujourd’hui, on est obligé de se jucher sur des saillies dangereuses. À noter que ces mêmes 
pêcheurs vendent le hareng sorti de l’eau à 1 euro le kilo.

Du boulevard de la Mer, on 
accède directement à la plage. Et même le froid de novembre n’entame pas le plaisir de s’asseoir au bord de l’eau. Le sable ici est particulier, fin, blanc et noir, poivre et sel. Au ras de l’eau, le sable pressé est moucheté de roux. Avec un peu de chance, la vague généreuse peut offrir un éclat d’ambre. Plus haut, où l’eau n’arrive pas, le sable est doux et léger, on a envie d’y plonger ses mains. Il ne colle pas aux doigts, mais glisse comme de la soie.

Commencez votre visite à partir du centre-ville, sinon vous courrez le risque de ne plus vouloir repartir des berges.






Pour se rendre à Baltiisk

En train jusqu’à Kaliningrad (le billet aller-retour, de Moscou, coûte entre 80 et 380 euros), puis de la Gare du Sud en train diesel ou en autobus.

Le logement

Une chambre à l’hôtel « Zolotoï Iakor » (l’ancre d’or), où a séjourné l’immense poète Iossif Brodsky, coûte entre 20 et 73 euros. Mais il faut réserver longtemps à l’avance, parce que l’hôtel est souvent occupé par les marins dont les navires sont à quai.

Que rapporter ?

Il y a toujours le poisson des pêcheurs du coin, bon marché et d’une fraîcheur imbattable, mais si vous craignez d’indisposer vos co-voyageurs, une poignée de sable fin fera bien l’affaire !



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