Mars comme si j’y allais (+Multimédia)

Les futurs marsonautes s’habituent aux scaphandres Orlan-Edans le module qui reproduit la surface martienne.Photo du site mars500.imbp.ru

Les futurs marsonautes s’habituent aux scaphandres Orlan-Edans le module qui reproduit la surface martienne.Photo du site mars500.imbp.ru

Romain Charles va réaliser son rêve d’être astronaute. Enfin presque. Avec six autres volontaires, il vivra dans les conditions d’un vol habité vers la planète rouge.

Depuis cinq ans, l’Institut biomédical de Moscou (IMBP) et l’Agence spatiale européenne (ESA) développent de concert le programme « Mars 500 ». Six volontaires (trois Russes, un Chinois, et deux Européens) vont être enfermés pendant 520 jours - le temps d’un aller-retour et d’un bref « amarsissage » - dans des conditions très proches de la réalité, l’apesanteur et les radiations cosmiques en moins. Les six hommes vivront dans un module compact, construit au cœur de l’IMBP, qui reproduit l’espace d’une navette spatiale et la surface de la planète rouge.

L’objectif de l’expérience est d’étudier les risques psychologiques et physiologiques que comporte une isolation totale, sur une très longue durée, dans l’espace confiné d’un vaisseau spatial, où tout est strictement rationné, de l’eau au sous-vêtements. Les volontaires prêteront aussi leurs corps à la science : une centaine d’expériences biomédicales seront menées par divers laboratoires.

« Tout contact avec l’extérieur sera totalement coupé, plus rien ne pénétrera dans le module une fois le voyage commencé », explique Romain Charles, un ingénieur français de 30 ans, en poussant une lourde porte blindée. L’accès au module se fait par la salle de sport. C’est ici que les volontaires passeront une grande partie de leur temps, pour se maintenir en forme, et procéder à des expériences. Un bonnet muni d’électrodes permettra, par exemple, de mesurer l’impact du sport sur l’humeur.

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Dans le module d’habitation, les conditions sont spartiates. L’équipement de la cuisine est réduit au micro-onde, celui du salon à la télé. Seules des chambres exiguës de 3 m² composent l’espace vraiment personnel. « Chacun emmène son ordinateur, chargé de musique, photos et films », (se) rassure Romain Charles, qui avoue ne rien craindre dans cette aventure, à part le manque de soleil et de la famille, un peu. Le contact sera maintenu, mais strictement rationné lui aussi. Elena Feichtinger, chef du projet pour l’ESA, sera le médiateur entre les captifs et le monde extérieur. « Ils pourront envoyer des messages succins à leurs proches. On les tiendra au courant de l’actualité dans le monde, mais l’information sera sélectionnée par des psychologues », précise-t-elle.

« Mars 500 », c’est un peu un Big Brother scientifique : la vie dans le module fera l’objet d’une surveillance vidéo 24h/24, par un médecin et un technicien, qui agiront en cas d’incident grave. Mais les volontaires sont entraînés pour parer à toutes sortes d’éventualités. « La spécificité d’un vol sur Mars c’est l’autonomie totale de l’équipage, aucun rapatriement précoce ne sera possible, aucune intervention extérieure », insiste Evgueni Demin, le directeur technique de 
l’IMBP.

« Mars 500 », c’est un peu un Big Brother scientifique avec une surveillance vidéo 24h/24

À partir d’une certaine distance, il y aura un délai allant jusqu’à 40 minutes dans la réception des messages, aucun travail ne pourra être accompli en communication directe avec la Terre. « Nous expérimentons des méthodes de premier secours utilisables sans formation médicale », explique Julien Graf, interne à l’université de médecine de Mayence. « Même s’il y aura toujours un médecin parmi les passagers, les membres de l’équipage doivent tous pouvoir se porter secours les uns aux autres ».

Les cosmonautes se prêtent très consciencieusement à tous les exercices. Bien sûr, l’impression de participer à un grand jeu de rôles ne leur est pas étrangère. Mais cette conscience de « jouer » ne devrait pas, selon Romain Charles, affecter fondamentalement les résultats de l’expérience. Un vrai voyage vers Mars comporte d’immenses dangers et d’énormes sacrifices. Mais la motivation est à la démesure du risque. La simulation suppose moins de risques et moins de motivation aussi. Pour autant, son impatience de fouler le sol de Mars n’est pas simulée, elle. Lors d’une mission de 30 jours, trois des volontaires débarqueront sur la surface de la planète recréée dans l’une des unités du module, vêtus de vrais scaphandres.

Depuis quatre mois, les futurs marsonautes s’entraînent quotidiennement et apprennent à se connaître, en attendant de « décoller » début juin. Que ce soit pour participer aux petits pas de l’humanité ou pour éprouver leurs propres limites, c’est avec satisfaction qu’ils se sont fait les fiers cobayes d’un projet vieux comme l’astronautique.







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