Des spécialités de terroir qui gagnent à être connues

La cuisine russe est abusivement considérée comme monotone. En réalité, nombre de recettes n’ont simplement jamais franchi ses frontières... pour cause d’étrangeté !
La cuisine d’un peuple reflète son territoire. Le territoire de la Russie est vaste mais sa terre peu fertile et la rigueur du climat en interdit la culture pendant la majeure partie de l’année. En revanche, le pays a toujours été riche en forêts. Les forêts de feuillus et la taïga conifère pouvaient fournir aux Russes le combustible nécessaire à l’utilisation quotidienne de l’élément central d’une maison traditionnelle russe, le poêle. Servant à la fois de chauffage et de four, le poêle russe a, selon les critères techniques modernes, un coefficient de rendement très faible, qui ne dépasse pas 30%. Il est si vaste qu’un adulte peut y pénétrer, par exemple pour s’y laver pendant les grands froids.

Pour atteindre la température nécessaire à la cuisson du pain, il faut y mettre au moins une dizaine de bûches, presque un arbre de petite taille. Mais quand un bon poêle est chaud, on peut y préparer en même temps plusieurs plats demandant une longue cuisson, faire du pain et des tartes pour une grande famille. C’est justement ce lent refroidissement permettant de maintenir la chaleur à l’intérieur du four jusqu’à 8-12 heures après l’allumage, qui a permis aux Russes de créer leur cuisine nationale. La cuisine traditionnelle n’a jamais connu la cuisson à feu vif : tous les plats mijotent pendant des heures dans le four, sans ajouts de graisse ou de beurre. C’est-à-dire dans leur propre jus.

La soupe russe la plus connue et la plus populaire est sans aucun doute le chtchi. Les étrangers ont du mal à en saisir la saveur. Ainsi, au XVIIe siècle, l’ambassadeur d’Italie à Moscou écrivait-il : « s’ils organisent un grand festin, ils préparent un brouet avec de la nourriture et quelques feuilles de chou découpées. Si ce plat ne s’avère pas à leur goût, alors ils y ajoutent beaucoup de lait fermenté ». En fait, il existe plusieurs variantes du chtchi. Et le penchant national pour les soupes a fait que la cuisine russe en compte 115.

La choucroute était le légume principal consommé pendant l’hiver et le printemps, car elle se conservait facilement. De plus, ce mode de préparation du chou accroît la quantité de vitamines. L’oignon et l’ail sont également utilisés depuis la nuit des temps, à l’inverse de la salade verte qui n’a jamais eu de succès en Russie où elle était considérée comme de « l’herbe ».

D’une façon générale, la salaison des légumes et des champignons, et la fermentation lactique ou « aigrissement », est une partie importante de la cuisine russe. La saumure des cornichons et du chou a jadis joué dans notre cuisine nationale le même rôle que la sauce de soja dans les pays du Sud-Est asiatique.

Il y eut une époque où l’on faisait beaucoup de salaisons de canards et d’oies. Et les poissons les plus nobles sont encore aujourd’hui abondamment et différemment salés. Dans « Domostroï », un traité du XVIe-XVIIe siècle sur la morale et l’économie domestique qui a marqué son temps, on trouve 10 méthodes de salaison du poisson. Et n’oublions pas le fameux caviar noir. Le lecteur contemporain sera probablement surpris d’apprendre qu’il y a quatre cents ans, dans certaines villes de l’Oural, pendant les années maigres on ajoutait du caviar d’esturgeon séché à la farine en tant que substitut le moins cher. Enfin, on utilise du poisson pour préparer des sortes de tourtes qui ne sont connues qu’en Russie : koulebiaka, rybnik, rasstiagaï.

« On peut de tout faire une tourte », dit-on chez nous. Il y a une grande variété de farces, de types de pâtes et de tourtes proprement dites : ouvertes ou fermées, au fromage blanc doux ou aigre (vatrouchki), sucrées ou salées. La pâtisserie demeure le fer de lance de notre cuisine nationale.

Il faut également mentionner les incontournables okrochka et botvinia, ces soupes froides à base de kvas de pain, la boisson nationale fabriquée avec du malt ou de la farine. Il semble que l’okrochka soit le seul plat laissant sceptiques - et c’est un euphémisme - les étrangers les plus intrépides. S’y accoutumer n’est pas chose aisée. Il vaut mieux y avoir trempé ses lèvres depuis sa plus tendre enfance avec le kvas préparé par mamie... Certains ont toutefois réussi à briser la barrière culinaire. Théophile Gautier, au terme d’un voyage en Russie au milieu du XIXe siècle, a conclu que le temps était un facteur clé pour apprécier la cuisine locale : « Après un séjour de quelques mois, on finit par prendre goût aux ogourtzis, au kvas et au chtchi, le potage national russe... ».

Maksim Sirnikov est l’auteur de plusieurs ouvrages culinaires




« A table ! » Les recettes de cuisine russe avec La Russie d'Aujourd'hui :

Le borchtch

Le bœuf Stroganoff

Les pelmeni

Le chachlik

L’okrochka

Les cornichons malossol




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