Qui menace la Russie?

DMITRI ROGOZINE, ambassadeur de la Fédération de Russie auprès de l'OTAN. Nos ennemis principaux sont la faiblesse, le manque de confiance en nous-mêmes et la corruption qui érode l'Etat. Si la Russie devient un pays fort, tout le monde le verra et l'envie passera de porter atteinte à la liberté et à la souveraineté du pays. Il est certain que la Russie aura toujours des ennemis, mais plus le pays sera faible, plus ils seront nombreux.
Rouslan Aouchev, président du comité des combattants internationalistes auprès du Conseil des chefs d'Etat de la CEI. Cette question touche à un secret stratégique et sa réponse est connue d'une poignée de personnes dans le pays. La grande menace émane non de l'Occident, comme auparavant, mais de l'Orient. Toute guerre commence là où il n'y a pas de politique cohérente, et c'est en Orient, justement, que nous avons ces problèmes. De plus, c'est en Orient que se trouvent les ressources importantes.

OLEG KOROLEV, gouverneur de la région de Lipetsk. Le manque d'estime envers nous-mêmes. Au cours du dernier siècle, nous nous sommes portés préjudice tous seuls, plus que quiconque ne nous a porté préjudice. Il suffit de se rappeler les années 1917 et 1991 ! Et pendant l'époque soviétique, avec une agriculture développée, nous nourrissions le monde entier tandis que nos propres citoyens ne mangeaient pas à leur faim. De plus, nous avons consacrés tous nos efforts à l'industrie de l'armement, tandis que les gens manquaient de casseroles et devaient faire la queue à chaque fois pour acheter quoi que ce soit. C'est contre ce manque de respect envers nous-même qu'il faut se défendre.

ANATOLI VASSERMAN, consultant politique. A court terme, les États-Unis resteront notre adversaire. Non parce qu'ils nous veulent quelque chose de particulier, mais parce que chaque rival des États-Unis s'appuie, d'une manière ou d'une autre, sur un partenariat avec la Russie. Tant que les États-Unis mettront tout en œuvre pour rester la seule force politique réelle, ils devront faire pression sur nous, non pas comme adversaire politique indépendant, car actuellement, sur le plan politique, nous avons justement beaucoup de choses en commun, mais comme soutien éventuel à leurs concurrents. Autrement dit, rien de personnel, ce n'est que du business.

VIKTOR OZEROV, président du Conseil fédéral pour la défense et la sécurité. Nous n'avons pas d'ennemis, mais des menaces militaires, mentionnées dans la doctrine militaire. Il s'agit tout d'abord du rapprochement des infrastructures de l'OTAN des frontières de la Russie. En outre, il ne faut pas oublier tous ceux qui ont des revendications territoriales envers nous, avec en première position, le Japon.

PAVEL BORODINE, secrétaire d'Etat de l'Union Russie-Biélorussie. Il est peu probable que, de nos jours ou dans un futur proche, quelqu'un veuille nous attaquer. Quand bien même on supposerait que quelqu'un ait des idées aussi absurdes, notre armée serait capable de riposter avec une telle puissance, que l'agresseur ne pourrait que regretter son geste. J'ai foi en notre armée.

LÉONID IVACHOV, président de l'Académie des problèmes géopolitiques. Tout dépend de l'état de la Russie et de sa politique. Si le pays est fort, nous aurons peu d'ennemis prêts à nous déclarer la guerre, mais s'il continue à se dégrader, de petits pays comme la Géorgie ou l'Estonie, pourraient tenter de nous attaquer. La nouvelle doctrine militaire est un pas en arrière. Pour la première fois dans l'histoire de la Russie, elle ne contient plus de notions telles que « opérations offensives », « contre-attaque », « mise en déroute de l'ennemi ». Si un agresseur nous attaque, le maximum que nous puissions faire, selon la doctrine, c'est de le contraindre à cesser les hostilités.

ALEXEÏ OSTROVSKI, président du Comité pour la CEI et des relations internes. Il faut protéger la Russie contre les bureaucrates corrompus jusqu'à la moelle, qui tirent le pays en arrière. Et contre les fonctionnaires qui se nourrissent de l'illusion que la Russie a des amis en Occident.

VLADIMIR SOROKINE, Directeur général de la société « AlfaStrakhovanie-Zhizn ». Nous n'avons qu'un seul concurrent sur le continent et son nom est la Chine. Espérons que les pays étrangers, et principalement l'Inde, nous aident !

BORIS TITOV, président de l'organisation « Delovaya Rossia ». Pour le moment, il n'y a pas de menaces extérieures, il y a des dangers à l'intérieur du pays. C'est pour cela que la fonction actuelle du défenseur se résumerait tout d'abord aux forces policières. Les forces armées doivent être compactes, professionnelles et bien élevées. Les militaires contemporains sont avachis, impolis et ne sont pas capables de défendre qui que se soit. Une telle armée gâche l'image de la Russie plus qu'elle ne la défend.

VLADIMIR CHAMANOV, commandant de l'armée de l'air, Héros de la Russie. L'expansion de l'OTAN vers l'Est n'est-elle pas une menace pour la Russie ? La fabrication incontrôlable d'armes nucléaires dans certains pays malgré les exigences du Conseil de sécurité de l'ONU n'en est-elle pas une également? La situation de l'Alliance atlantique en Irak et en Afghanistan est très compliquée. Toutes ces provocations constituent une menace potentielle pour la Russie également. C'est pourquoi nous avons besoin d'une armée puissante.

IVAN SOLTANOVSKI, directeur-adjoint du Département de la coopération européenne du ministère russe des Affaires étrangères. Aucun pays n'est pour nous un ennemi. En ce qui concerne la Chine, c'est un pays très puissant et un partenaire stratégique de la Russie, il ne faut pas la mettre sur la liste des ennemis en se basant uniquement sur le critère démographique. Malheureusement, les stéréotypes de la guerre froide nous empêchent de construire un système de sécurité basé sur la confiance en Occident, nos partenaires gardent encore une vision datant d'une époque révolue.

ANATOLI TSYGANOK, chef du Centre des prévisions militaires de l'Institut d'analyse politique et militaire. Le terrorisme, qui peut venir de n'importe où et une agression en soutien aux immigrés clandestins chinois en Extrême-Orient. Dans cinq ou six ans, nous verrons des guerres pour l'eau, qui manque en Afrique et en Asie, dans certaines anciennes républiques soviétiques. Dans sept ou huit ans, viendra le tour de la lutte pour les ressources des mers nordiques et nos adversaires seront les États-Unis et la Chine.

GLEB FETISSOV, membre de la Chambre civile, propriétaire du groupe bancaire « Ma banque ». Pour le moment, nos adversaires sont les États-Unis et la Suède, car ils ont de très bonnes équipes olympiques ! Mais il faut dire que depuis l'époque de Gogol, rien n'a changé en Russie.

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