Moscou guette le futur visage de l'Europe

Le traité de Lisbonne et la réforme des organismes dirigeants de l'Union européenne restent, bien entendu, une affaire interne pour l'association et ses pays membres. Or, les conséquences dґune « pérestroïka » institutionnelle au sein dґune puissante alliance telle que l'UE dépassent de loin ses frontières et affectent directement les relations entre l'Europe et la Russie.

C'est bien compréhensible, car la Russie fait aujourd'hui partie des trois principaux partenaires commerciaux de l'UE, se positionnant après les États-Unis et la Chine. Même en pleine crise mondiale, 50% du commerce extérieur de l'Union européenne se fait avec la Russie, plus de 80% des investissements dans notre économie proviennent des pays de l'UE et environ 60% des investissements russes à l'échelle internationale sont destinés à l'Europe. La Russie couvre 44% de la demande en gaz de l'UE et à peu près le même taux de sa demande en pétrole. Il est important de noter que c'est principalement dû au développement fructueux des relations bilatérales entre la Russie et les pays membres.

En ce qui concerne les relations entre Moscou et Bruxelles, les conflits sont fréquents et la concertation n'est pas toujours une règle. Par exemple, il n'y a toujours pas de réel changement au sujet des initiatives de la Russie relatives à la création d'un nouveau système de sécurité euro-atlantique, ni sur les relations énergétiques, bien que des propositions aient été formulées par le Président Medvedev depuis longtemps.

Avec l'obtention par l'UE du statut d'entité juridique international, Bruxelles va peser davantage sur les relations bilatérales entre la Russie et les pays membres. Moscou espère que l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne permettra, malgré tout, d'améliorer le partenariat avec Bruxelles. Dans ce sens, la Russie s'intéresse de très près à la personnalité du futur président et du ministre des Affaires étrangères de l'UE.

A une époque, le célèbre diplomate Henry Kissinger se posait la question de savoir qui appeler à l'UE en cas d'urgence. Désormais, l'Europe se voit dotée d'une personnalité représentant toute l'Union européenne que l'on pourra joindre en cas de besoin. Voilà qui arrange beaucoup la Russie, dans la mesure où cette personnalité, à l'autre bout du fil, sera à même de résoudre les problèmes de manière constructive, tout en respectant les intérêts du partenaire.

Dans cette hypothèse, il est probable que l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne va permette la ratification entre la Russie et l'UE d'un nouvel accord de base qui en est depuis longtemps au stade des négociations, lesquelles bien entendu se déroulent avec difficulté. Cela pourra-t-il faire évoluer de manière conséquente la coopération entre Moscou et Bruxelles? A voir.

Fedor Klimkine est un journaliste indépendant basé à Bruxelles.

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