La directrice de Roskino Ekaterina Mtsituridze devant l'affiche du film "Ici les aurores sont calmes" de Renat Davletyarov.
Vladimir Astapkovich / RIA NovostiQuelles sont vos impressions du festival de Berlin ?
Ekaterina Mtsituridze : D’un côté, compte tenu de la situation tendue et de nos problèmes financiers, la majorité des partenaires internationaux sont vers nous et s’efforcent de nous proposer des conditions avantageuses. Ils offrent des remises sur l’achat des films à nos distributeurs, sont plus souples en matière de délais de paiement. Nous avons eu bien plus de succès que nous l’espérions sur le marché européen. La somme des transactions conclues par certaines des compagnies qui vendaient leurs films sur le stand Roskino - Russian cinema worldwide a atteint plusieurs millions d’euros.
Il s’agit en premier lieu de ventes de projets d’animation par les producteurs Riki et Art-Pictures, le studio Wizart, la compagnie Mirsand de Timour Bekmambetov (réalisateur et scénariste russe, ndlr), ou de Central Partnership. Leur film L’équipage, dont la première projection a eu lieu en IMAX à Berlin permet déjà d’affirmer que ce sera l’un des projets les plus vendeurs de l’année. Le seul film attendu qui n’a pas encore été vendu à Berlin est Viking. Les producteurs Konstantin Ernst et Anatoly Maximov ont reçu une proposition de distribution mondiale de la part de l’un des trois grands studios hollywoodiens. Pour le moment, les négociations sont en cours. Les ventes commenceront sans doute à Cannes.
La Russie ne peut pas encore proposer aux marchés étrangers suffisamment de films de bonne qualité. 7-8 projets par an, c’est très peu pour réellement percer.
Combien un festival coûte-t-il à Roskino ?
E.M.: Prenons l’exemple de Cannes. Le budget de notre pavillon, comprenant la location, la construction, l’équipement technique, la publicité, les relations publiques, la logistique, l’organisation de conférences, le paiement de programmes de formation pour les étudiants, le voyage des étudiants, les frais de mise en place, la polygraphie, les impressions, l’édition de DVD de court-métrages Global Russians, de catalogues électroniques de l’industrie russe du cinéma, etc. est d’environ 300 000 euros. À titre de comparaison, le budget du pavillon britannique est d’un million de livres. C’est-à-dire quatre fois plus.
Il est plaisant de constater que depuis huit ans, tout le monde considère comme acquis qu’il y a un pavillon russe à Cannes, que nous avons depuis cinq ans l’un des stands les plus spacieux et confortables de Los Angeles, que nous donnons des conférences pertinentes à Berlin et Venise, que nous montrons nos films à Toronto et à Hong-Kong.
D’ailleurs, notre budget annuel est prévu pour neuf événements sur les principaux marchés, où grâce à nos efforts et à ceux des producteurs, la filière russe du cinéma fait plus que bonne figure. Notre budget représente à peine un cinquième des budgets de certains festivals russes, dont la résonnance dans le monde est nulle.
S’il n’est pas possible d’augmenter vos subsides, que ferez-vous ?
E.M.: Nous serons forcés de diminuer le nombre de festivals et la taille de nos stands.
Quels festivals risquons-nous de manquer cette année ? Le festival de Cannes est-il menacé ?
E.M.: Nous avons déjà signé un contrat avec le festival et la Russie est en tête d’affiche à Cannes cette année, c’est-à-dire qu’elle sera le centre de l’attention. Nous avons attendu cinq ans cette opportunité, et maintenant nous les supplions de nous faire une réduction. C’est indigne d’une industrie qui s’efforce de paraître comme l’une des meilleures du monde.
Quelle est l’influence des distributeurs sur nos films à l’étranger ? Y a-t-il en Russie des producteurs et distributeurs dont les affaires fonctionnent bien ?
E.M.:Léviathan a été vendu par les Français dans le monde entier dans les meilleures conditions. Aux Etats-Unis, c’est Sony Pictures Classic qui l’a diffusé, avec un résultat de plus d’un million de dollars. Ceux de nos distributeurs ayant des vues sur les marchés internationaux n’ont pas de telles possibilités. Ce travail dépend beaucoup des contacts, des relations personnelles. Avec le cinéma commercial, nous travaillons à peu près normalement. Mais des compagnies comme The Match Factory, Wild Bunch, Films Boutique, capables de rentabiliser des films indépendants, n’ont pas d’équivalent en Russie.
Cette année à Berlin, seul L’Union du Chiffon de Mikhaïl Mestetsky a été sélectionné pour l’un des concours. Les films russes pourront-ils concourir dans d’autres festivals ?
E.M.: Je tiens tout d’abord à faire remarquer que Mestetsky et sa « bande » ont été reçus avec enthousiasme à Berlin ! C’est un cinéma rare, qui a conquis le public du festival. J’espère que d’autres festivals trouveront leur bonheur. Nous avons discuté de Berlin avec Thierry Frémaux, directeur du Festival de Cannes, avec Alberto Barbera, directeur de la Mostra de Venise : ils sont tous ouverts et attendent de nouveaux projets. Parmi ceux que je peux évoquer, pour l’instant, les films de Valery Todorovsky, Andreï Kontchalovsky, Pavel Lounguine, sont en cours d’achèvement. Il y aura aussi quelques surprises.
Texte reproduit en version abrégée. Entretien original publié sur le site d'Izvestia
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