Un oiseau libre sur la scène lyrique internationale

Daniil Rabovsky
La soprano russe, qui a chanté sur toutes les grandes scènes d’opéra du monde, interprétera des extraits d’opéras de Rossini au théâtre des Champs-Élysées.

RBTH : Vous rêviez de devenir chanteuse dès l’enfance ?

Olga Peretyayko : Pas du tout ! Je voulais être danseuse. À Saint-Pétersbourg on habitait près de la célèbre Académie de ballet Vaganova. Mon père chantait dans le chœur du Théâtre Mariinski. Tout le monde se connaissait et on se rendait souvent visite les uns aux autres. J’ai commencé à chanter à l’âge de quatre ans : on me faisait monter sur une chaise lors des fêtes en famille. J’ai toujours aimé me produire en public. Et j’aime toujours.

Vous avez suivi une formation de chef d’orchestre. Pourquoi ?

Je suis entrée à l’école du Conservatoire à quinze ans, ce qui est trop tôt pour suivre des cours de technique vocale. Quant à ma formation de chef d’orchestre et de chorale, ces études musicales de base m’aident beaucoup. Tout comme la capacité de m’accompagner au piano, la connaissance des règles de l’harmonie et les exercices de solfège.

Vous êtes partie en Allemagne à 21 ans. Était-il difficile de vivre à l’étranger ?

L’essentiel, c’est d’intégrer le mode de vie européen. Au début, c’était très dur. Entrée au Conservatoire, je suis allée suivre des cours d’allemand à partir de zéro. Je me suis sentie plus ou moins à l’aise après neuf mois environ.

Une sorte d’enthousiasme se développe avec le temps. J’ai formé avec des amis un quatuor pour me faire de l’argent de poche en donnant des petits concerts dans des hôpitaux et des asiles : surtout Bach, Mozart et Haendel, ce qui se joue facilement. Je me souviendrai toujours d’un chiffre : 10 euros. C’était mon budget hebdomadaire pour l’alimentation. Je n’avais jamais 30 centimes de libres pour acheter un café dans un distributeur. Une telle expérience vous apprend beaucoup de choses.

Quand avez-vous commencé à vous produire sérieusement ?

À la même époque. Mon premier projet sérieux (de jeunesse bien entendu) remonte à 2004 avec Harry Kupfer. On chantait Haendel en allemand, rien que des jeunes. On a répété pendant deux mois dans un château près de Berlin puis on a donné des spectacles. J’ai récemment retrouvé un DVD avec ces enregistrements et j’ai pensé : « Mon Dieu, pourvu que personne ne puisse le visionner ! ».
Mais à l’époque, forte de trois ans d’études au Conservatoire, j’ai décidé qu’il était temps de chercher à donner des concerts. J’ai compris qu’il était inutile d’y rester six ans et j’ai passé de nombreuses auditions pour des studios d’opéra et des spectacles en version de concert. Cela existe dans chaque théâtre, surtout aujourd’hui, en pleine crise : les jeunes chanteurs sont souvent très bons et leurs cachets sont très peu élevés. Les théâtres profitent de belles voix presque gratuitement. Nous, nous gagnons de l’argent et nous accumulons une expérience d’interprétation en public.

L’Opéra d’État de Hambourg est devenu une étape importante dans ma carrière. J’y ai chanté pendant deux ans. En été 2006, je suis allée à l’Accademia Rossiniana à Pesaro. L’année suivante, j’ai eu l’occasion de jouer Desdémone avec Juan Diego Florez. En 2007 également, j’ai interprété chez Daniel Barenboim une des filles-fleurs dans Parsifal. Entre ces spectacles, je me rendais par train de nuit à Paris, à Operalia. Au lendemain de ce concours, je suis allée à Pesaro, en Italie, complètement malade, parce qu’il est impossible de vivre longtemps à un tel rythme. Mon corps m’a dit : ça suffit. J’estime que j’ai percé à Pesaro. C’est à ce moment que j’ai décidé de me lancer en indépendante.

Voudriez-vous être sous contrat avec une troupe précise ?

Non. S’il est possible de travailler comme soliste indépendante, il faut en profiter. En étant attaché à une troupe, on est dans l’obligation de chanter tout le répertoire. Les chanteurs optent habituellement pour cette formule en fin de carrière.

Le public, est-il différent dans des pays différents ?

Pas vraiment. Aux États-Unis, le public aime tout, il n’est pas trop exigeant. En revanche, les spectateurs américains réagissent vivement et rient très fort, comme au cinéma.
En Allemagne, le public est le plus averti : avec 80 théâtres, il a tout vu, tout entendu, rien ne peut l’étonner. Les Autrichiens sont des amateurs fervents. La France possède un public raffiné qui exige des œuvres moins connues, des perles rares… Les Français sont de fins mélomanes, très subtils.

Vous avez déjà chanté sur toutes les grandes scènes du monde. Reste-t-il un lieu, une œuvre, des partenaires qui vous fassent rêver ?

L’essentiel, c’est la santé. Tout le reste viendra s’y joindre. Pour ce qui est des rêves… Ce ne sont pas des rêves, mais des projets. Mon agenda est rempli jusqu’en 2020. Mais si, j’ai quand même un rêve : faire quelque chose avec un groupe de musique électronique semblable à Air. Je ne sais pas encore ce qu’on pourrait faire ensemble, mais je voudrais tant.

Agenda en France

Théâtre des Champs-Élysées
Concert Accademia Bizantina et Olga Peretyatko, Récital Rossini
11 janvier 2016

Opéra Bastille
Interprétation du rôle de Gilda dans Rigoletto de Verdi
Du 09 avril au 30 mai 2016

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