Livre sans photographies

Le roman de Sergueï Chargounov publié par Les Éditions de la Différence cet automne

AUTEUR Sergueï Chargounov

TITRE Livre sans photographies

TRADUIT du russe par Julia Chardavoine

Illustré par Vadim Korniloff

Éditions de la Différence

Les Éditions de la Différence publient cet automne deux textes, De gauche, jeune et méchant de Zakhar Prilépine et Livre sans photographies de Sergueï Chargounov, qui viennent illustrer l’essai de Monique Slodzian Les enragés de la jeune littérature russe paru en 2014 dans la même maison. Né en 1980, Sergueï Chargounov est le plus jeune de ces écrivains proches du parti national Bolchévique et qui rêvent de révolution. Il compte à son actif cinq romans sélectionnés pour des prix littéraires ; il est également journaliste et mène parallèlement une vie d’activiste.

Dans Livre sans photographies la narration est biaisée par un jeu : point de photographies certes, mais des dessins qui illustrent le propos d’un roman qui se donne à lire comme un journal car le narrateur qui est aussi le héros n’est autre que Chargounov. Il retrace ses souvenirs depuis l’enfance, à l’époque soviétique, où fils de pope il est élevé dans la haine du communisme et dans un esprit de résistance. Mais lorsque le pouvoir bascule et que sonne le glas du communisme, lui qui pourtant n’a été ni pionnier ni komsomol se découvre une nostalgie du monde soviétique et rejoint immédiatement l’opposition. À 27 ans il est propulsé numéro trois de la liste fédérale d’un parti d’opposition dont il se fait violemment écarter sous la pression du pouvoir. S’ensuivent des déboires en cascade : banni de la scène politique il se retrouve plus ou moins en cavale et sa femme le quitte. Commence alors une sorte de course effrénée à travers la Russie et les anciennes républiques soviétiques, entre guerre de Tchétchénie, révolution kirghize, les tentatives du héros pour lancer l’insurrection. « Je ne pouvais pas rester en place. J’avais compris pourquoi. J’étais comme un héros de conte, en quête d’une grande vérité. Je voulais découvrir quelque chose d’important qui me permettrait de continuer à vivre. »

Livre sans photographies est construit comme une sorte de journal où les faits sont donnés bruts, sans analyse, sans commentaire, sans jugement non plus, mais d’un point de vue qui éclaire l’histoire récente de la Russie. Plein de tendresse, de pudeur et d’une jeune énergie, souvent cocasse, le livre de Chargounov est traversé par un souffle de road-movie qui lui confère un certain charme : soif de liberté, rencontres de hasard, découverte de l’autre, changements fortuits de route, actions avortées et la mort qu’on défie sont autant d’occasions pour le jeune homme lancé dans la quête de soi d’expérimenter le monde et de se construire dans une société sans repères. Mais c’est dans cet entre deux narratif, dans la reconstruction de l’expérience vécue que l’écrivain Chargounov trace sa voie et on s’en réjouit.

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