L'Armée rouge fait des bulles

Crédit : Éditions Casterman

Crédit : Éditions Casterman

Deux dessinateurs et une historienne sortent chez Casterman un album, La Chute du Reich, qui rétablit le rôle de l'Armée rouge dans la libération de l'Europe.

À l'approche des dates anniversaires de la victoire, on ne compte plus à la télévision les documentaires ou les fictions relatant l'héroïsme des troupes alliées qui ont débarqué le 6 juin 1944 en Normandie pour libérer la France et marcher jusqu'à Berlin.

« On ne parle que des Américains ! », note Yves Plateau, le dessinateur belge qui a réalisé la recherche documentaire et les crayonnés pour La Chute du Reich. Déjà familier de la BD historique avec plusieurs albums sur l'aviation, c'est lui qui a insisté pour remettre la libération de l'Europe en perspective.

Un héritage soviétique oublié

 Selon un sondage de l'agence britannique ICM Research mené auprès de 3 000 personnes du 20 mars au 9 avril 2015 au Royaume-Uni, en France et en Allemagne, la majorité pense que les principaux libérateurs de l'Europe sont les armées américaine et britannique. A contrario, le rôle de l'URSS dans la guerre est souvent minimisé en Europe.

En France, 61% des personnes interrogées considèrent que le rôle principal a été joué par l'armée américaine. 52% sont de cet avis en Allemagne. Seulement 8% des Français réalisent le véritable rôle de l'armée soviétique. 
Pourtant, l'importance des troupes de l'Union soviétique peut difficilement être passée sous silence.

Après la défaite de Stalingrad en 1942-43, l'Allemagne, puis le Japon, sont passés de l'offensive à la défensive. « Stalingrad est un véritable tournant dans la guerre », souligne Yves Plateau. 

Pour beaucoup, l'issue du conflit aurait pu être totalement différente si les Soviétiques n'avaient pas résisté : « C'est bien l'armée russe qui a éventré la machine de guerre allemande », admettait le chef d'État britannique Winston Churchill.

Au fil de l'album, on lira aussi que dans la bataille de chars de Koursk, les troupes soviétiques ont définitivement sapé le moral de l'armée allemande et le forçage du Dniepr a ouvert la voie à la libération de l'Europe. Qu'en 1944 les troupes soviétiques libéreront les camps d'extermination de Majdanek, Belzec, Sobibor ou encore Treblinka... avant Auschwitz le 25 janvier 1945. Le 2 mai 1945, les troupes soviétiques prenaient Berlin.

Bilan de la guerre pour l'URSS ? 27 millions de morts, soit le plus lourd tribut parmi les Alliés. 

Une guerre, deux fronts

 « Quand on constate les dégâts matériels et humains subis par l'URSS, on peut difficilement faire l'impasse. Il fallait mettre les choses au point. J'ai donc tenu à mettre en avant le rôle de l'armée soviétique, le front de l'Est », raconte Yves Plateau.

Résultat : un album complet sur cette phase de la Seconde Guerre mondiale, entre illustrations des scènes les plus marquantes et mises au point historiques par Isabelle Bournier, directrice culturelle et pédagogique du Mémorial de Caen, en France.

« Elle nous a apporté beaucoup de documentation - et j'ai été très surpris par les découvertes que j'ai faites ! Quand j'ai appris l'histoire à l'école, le front de l'Est était vraiment survolé », témoigne Olivier Weinberg, le dessinateur français qui a réalisé les encrages et retravaillé les plans de La Chute du Reich.

Ce dernier retiendra particulièrement « la force et la ténacité » des Soviétiques, et, en tant que dessinateur, les prouesses techniques inégalées de l'URSS comme les « orgues de Staline », de redoutables lance-roquettes multiples.

Une bande dessinée comme devoir de mémoire

 Pour lui, l'objectif de ce travail était clairement pédagogique. « Pour les jeunes de 12-13 ans, apprendre l'histoire en lisant seulement de gros pavés peut être un peu repoussant, explique-t-il. Avec la bande dessinée, l'approche est plus ludique, plus imagée »« La BD peut être un très bon outil pour les enseignants », ajoute Yves Plateau.

Surtout, Olivier Weinberg espère que le message va passer. « Pour moi, participer à cette bande dessinée était un devoir de mémoire. Car tous ces événements portent en eux les racines de l'Europe actuelle », rappelle-t-il. 
Et de conclure : « Il est important de savoir d'où on vient, de comprendre comment l'Europe actuelle a été construite. Si nous pouvons contribuer à cette compréhension, le pari sera gagné ».

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